COMMENTAIRE DE TEXTE : LE LANGAGE CHEZ NIETZSCHE
Publié le 10/07/2016
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COMMENTAIRE DE TEXTE : LE LANGAGE
“Pensons encore en particulier à la formation des concepts. Tout mot devient immédiatement concept par le fait qu’il ne doit pas servir, justement pour l’expérience originale, unique, absolument individualisée, à laquelle il doit sa naissance, c’est-à-dire comme souvenir, mais qu’il doit servir en même temps pour des expériences innombrables, plus ou moins analogues, c’est-à-dire, à strictement parler, jamais identiques et ne doit donc convenir qu’à des cas différents. Tout concept naît de l’indentification du non-identique. Aussi certainement qu’une feuille n’est jamais tout à fait identique à une autre, aussi certainement le concept feuille a été formé grâce à l’abandon délibéré de ces différences individuelles, grâce à un oubli des caractéristiques, et il éveille alors la représentation, comme s’il y avait dans la nature, en dehors des feuilles, quelque chose qui serait “la feuille”, une sorte de forme originelle selon laquelle toutes les feuilles seraient tissées, dessinées, cernées, colorées, crêpées, peintes, mais par des mains malhabiles au point qu’aucun exemplaire n’aurait été réussi correctement et sûrement comme la copie fidèle de la forme originelle. (Nietzsche)
(Série A, Aix-Marseille).
PREMIER TEMPS: TOUT CE QUI TOURNE AUTOUR DU LANGAGE
Procès Nietzschéen du langage
D’abord des images... Puis des mots appliqués aux images. “Enfin des concepts, possibles seulement dès qu’il y a des mots, une façon de ramasser beaucoup d’images sous une réalité non-concrète, mais audible (le mot). Le petit peu d’émotion que produit “le mot” c’est-à-dire la vue d’images analogues pour lesquelles il existe un seul mot, cette faible émotion est le fond commun, la base du concept ...” (Volonté de Puissance).
Le langage nous induit en erreur :
a- Il nous incite à penser l’identité de l’être et du concept. Grave erreur ! Car le mot ne désigne que les états et les besoins. Celui qui parle ne se rend pas compte que c’est de lui-même qu’il parle. Qu’au fond c’est de lui qu’il s’agit et non de la chose désignée. Le mot est ce qui permet à l’instinct de s’exprimer. Excitation nerveuse qui consiste en un phénomène sonore, le mot n’identifie point le réel.
«
b- Le langage nous invite à confondre frauduleusement la grammaire avec la struc·
ture même de la réalité :
"Nous projetons spontanément dans le réelles articula
tions grammaticales de la langue, de sorte que toutes nos spéculations sur l'être
ne sont, en dernier ressort, que de simples exercices grammaticaux
".
c-Le langage entraîne une dangereuse illusion, notamment lorsqu'il procède à l'identification de réalités singulières qui, dans leur texture intime, sont néces
sairement dissemblables (il
n'y a nulle part, dit Nietzsche, de cas absolument
identiques).
Ce qui laisse présumer illégitimement qu'il existe un archétype ou prototype idéal
des choses, placé dans une sphère intelligible ou dans un arrière-monde.
C'est ce qui est exprimé fondamentalement dans le texte : "Tout concept résulte
de l'opération par laquelle on réduit à l'identité ce qui n'est pas identique".
d-Caractère arbitraire et anthropomorphique du langage en ce sens qu'il met
au masculin et au féminin des choses inertes.
e-Solidarité entre le langage et les conventions socio-historiques constatée et con
firmée
par la diversité des langues et des systèmes linguistiques.
f-Sacralisation infondée du langage qui ne repose que sur des entités fictives
et imaginaires et non sur l'état des choses.
Dans
Humain, trop humain Nietzsche écrit :
"C'est parce que l'homme a cru, durant de longs espaces de temps, aux idées
et aux noms des choses comme
à des "aeternae veritates", qu'il s'est donné cet
orgueil avec lequel il s'élevait au-dessus de la bête : il pensait réellement avoir
dans le langage la connaissance du monde.
Le créateur de mots n'était pas assez
modeste pour croire, qu'il ne faisait que donner aux choses des désignations,
il se figurait au contraire exprimer par les mots la science la plus élevée des choses".
(Ire partie, t.
2, chap.
Il)
g-Les concepts ont pour fonction "cachée" d'altérer et de transfigurer le réel,
afin de le plier aux exigences de la raison.
Avec les concepts, la raison parvient
à figer le flux du devenir.
h-
Il n'y a dans le réel ni unité, ni simplicité, ni identité, "Tout ce qui est simple
est purement imaginaire, n'est pas
"vrai".
Mais ce qui est réel, ce qui est vrai,
n'est pas un, ni réductible
à l'unité" (Volonté de Puissance).
i-"Tout parle" mais tout ce qui parle ne cesse de modifier, simplifier, schémati
ser, interpréter
le réel mouvement des choses.
j-"Cela est" se ramène, selon Nietzsche, à "cela signifie"..
»
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