Comment Giraudoux dans ce dénouement revisite-il le myhe de la famille des Atrides ?
Publié le 15/04/2009
Extrait du document
- Extrait scène 9, acte 2 de Electre de Griaudoux
Le mendiant : Alors voici la fin. La femme Narsès et les mendiants délièrent Oreste. Il se précipita à travers la cour. Il ne toucha même pas, n'embrassa même pas Electre. Il a eu tort. Il ne la touchera jamais plus. Et il atteignit les assassins comme ils parlementaient avec l'émeute, de la niche en marbre. Et comme Egisthe penché disait aux meneurs que tout allait bien, et que désormais tout irait bien, il entendit crier dans son dos une bête qu'on saignait. Et ce n'était pas une bête qui criait, c'était Clytemnestre. Mais on la saignait. Son fils la saignait. Il avait frappé au hasard sur le couple, en fermant les yeux. Mais tout est sensible et mortel dans une mère, même indigne. Et elle n'appelait ni Electre, ni Oreste, mais sa dernière fille Chrysothémis, si bien qu'Oreste avait l'impression que c'était une autre mère, une mère innocente qu'il tuait. Et elle se cramponnait au bras droit d'Egisthe. Elle avait raison, c'était sa seule chance désormais dans la vie de tenir un peu debout. Mais elle empêchait Egisthe de dégainer. Il la secouait pour reprendre son bras, rien à faire. Et elle était trop lourde aussi pour servir de bouclier. Et il y avait encore cet oiseau qui le giflait de ses ailes et l'attaquait du bec. Alors il lutta. Du seul bras gauche sans armes, une reine morte au bras droit avec colliers et pendentifs, désespéré de mourir en criminel quand tout de lui était devenu pur et sacré, de combattre pour un crime qui n'était plus le sien, et, dans tant de loyauté et d'innocence, de se trouver l'infâme en face de ce parricide, il lutta de sa main que l'épée découpait peu à peu, mais le lacet de sa cuirasse se prit sans une agrafe de Clytemnestre, et elle s'ouvrit. Alors il ne résista plus, il secouait seulement son bras droit, et l'on sentait que s'il voulait maintenant se débarrasser de la reine, ce n'était plus pour combattre seul, mais pour mourir seul, pour être couché dans la mort loin de Clytemnestre. Et il n'y est pas parvenu. Et il y a pour l'éternité un couple Clytemnestre-Egisthe. Mais il est mort en criant un nom que je ne dirai pas.
La voix d'Egisthe, au dehors : Electre…
Le mendiant : J'ai raconté trop vite. Il me rattrape.
- Introduction:
Avec la montée du totalitarisme en Europe au 20ème siècle, le théâtre connaît un certain renouveau. Ainsi Electre, pièce de Giraudoux est représentée pour la première fois en 1937 en collaboration avec Louis Jouvet. Giraudoux revisite le mythe de la famille maudite des Atrides. Dans la pièce, Electre, fille de Clytemnestre et d'Agamemnon, retrouve son frère Oreste après des années d'absence. Elle le convainc de la culpabilité de leur oncle Egisthe et de Clytemnestre, amants, dans la mort d'Agamemnon. Elle pousse Oreste à la vengeance, aidé par les mendiants de la ville menés par la femme Narsès. L'extrait de la scène 9 acte 2 met en scène le Mendiant, personnage mystique, relatant les meurtre de Clytemnestre et d'Egisthe, alors repenti de ses actions passées.
Dans un premier temps, nous étudierons l'aspect narratif et le rôle du Mendiant, et dans un second temps, nous développerons le dénouement tragique de la scène.
«
- Mendiant omniscient, car sait tout des évènements antérieurs et futurs : « Il ne la touchera jamais plus »- Le décalage entre le récit du mendiant et l'action en train de se dérouler renforce cette idée « J'ai raconté tropvite »- Utilisation de plusieurs points de vue Egisthe « désespéré de mourir en criminel » - Oreste « Oresteavait l'impression »- Rôle explicatif du Mendiant car il rapporte les faits tels qu'ils se produisent- Mais subjectivité de sa part puisqu'il prend parti et juge les personnages « Il a eu tort » + ironie par rapport àClytemnestre : « Mais tout est sensible et mortel chez une mère, même indigne »- Joue le rôle du Coryphée mais à la différence de la tragédie antique, il intègre son point de vue et donc celui deGiraudoux II- Dénouement tragique : double meurtre A) Meurtre de Clytemnestre- contraste brutal : passage d'une situation sereine et pacifique « désormais tout irait bien » à une situationbarbare et sanglante- anaphore du verbe « saignait » souligne brutalité et l'absence d'humanité de Clytemnestre- meurtre qui s'apparente à une scène de carnage dans un abattoir avec champ lexical de la boucherie « bête »« saignait »- Puis Clytemnestre retrouve peu à peu son humanité et redevient sensible et mère, sa dernière parole étantpour Chrysothémis, sa dernière fille, en dehors de l'horreur des Atrides- Essaye de tenir debout gagner du temps pour mourir dignement- Sentiment de pitié et de sympathie envers Clytemnestre : registre pathétique employé B) Meurtre d'Egisthe- se débat et lutte courageusement contre la mort sa résistance est souligné avec le verbe « lutter »répété deux fois- Mais tout se ligue contre lui : Clytemnestre qui l'encombre et l'empêche de dégainer, l'oiseau symbole du destin,son lacet qui se prend dans l'agrafe de Clytemnestre- Meurtre qui apparaît comme la fatalité du destin- Lorsque Egisthe sait qu'il va mourir, il cherche à se débarrasser de Clytemnestre symbole de son passé de «jouisseur, de parasite et de fourbe »- Mal être intérieur de Egisthe souligné par les antithèses « criminel » et « pur et sacré », « loyauté « et «infâme », « innocence » et « parricide »- Sa dernière pensée est pour Electre qui représente la vérité, dernier hommage pour elle- Mort qui s'apparente au registre tragique Conclusion : Giraudoux ne transgresse pas les règles de bienséance du théâtre classique.
Mais il s'amuse à détourner ces règlesgrâce au récit du mendiant, qui suscite effroi et horreur auprès du lecteur spectateur.
Le double meurtre d'Egistheet de Clytemnestre s'accomplit selon la légende, mais Giraudoux intègre son point de vue au récit du mendiant : ildonne une dimension pathétique à la mort de Clytemnestre, et une dimension tragique à la mort d'Egisthe.
Sujet désiré en échange : Aragon, « Ce que dit Elsa »..
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