Blaise PASCAL: Le coeur et la raison
Publié le 18/04/2009
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connues des notions telles celles d'espace, de nombre, etc.
qui sont des notions parfaitement claires en elles-mêmes et comprises de tous les hommes ; leur vérité est aussi assurée que si elle était fondée sur unedémonstration.Le coeur « sent » les premiers principes, dont la raison déduit les conséquences.
Il en résulte pour Pascal lacomplète séparation du coeur et de la raison (ou encore de l'esprit de finesse et de l'esprit de géométrie) : il estabsurde de demander des preuves des premiers principes, tout comme il est absurde de vouloir « sentir » lesconclusions.
Mais cette séparation a une signification bien précise : le coeur surpasse infiniment la raison ; cettedernière est impuissante à saisir certaines vérités que le coeur admet d'emblée.
Cette séparation prend alors toutson sens dans le projet pascalien d'une apologie de la religion chrétienne (dont les Pensées ne sont que le brouillon): le coeur sent les vérités de la foi, la raison ne peut pas les comprendre.
Par exemple, il est impossible d'expliquerrationnellement le dogme de la Trinité.
La séparation du domaine du coeur et du domaine de la raison est ainsi laséparation de la science et de la religion : le Pascal chrétien humilie la raison pour sauvegarder la pureté de la foi, etle Pascal savant (mathématicien et physicien) sépare foi et raison pour sauvegarder l'indépendance de la science.
Ils'agit donc d'une contradiction qui fut intérieure à Pascal lui-même, dont les écrits montrent toute la tension.
C'estun des intérêts de la lecture de Pascal.
« Nous connaissons la vérité non seulement par la raison* mais aussi par le cœur »
Il serait ridicule de douter de tout sous prétexte que la raison ne parvient pas à tout démontrer, « on ne prouve pasqu'on doit être aimé en exposant d'ordre les causes de l'amour » (298).
Ainsi, Pascal répond aux pyrrhoniens etadjoint à la raison une leçon d'humilité.
C'est que le vrai est affaire de sentiment et d'intuition, tout autant que dedémonstration.
Et si la raison déduit, c'est en partant de principes certains par sentiment et non par raisonnement.« La dernière démarche de la raison est reconnaître qu'il y a une infinité de choses qui la surpassent ; elle n'est quefaible si elle ne va pas jusqu'à connaître cela.
» (188) Cela lui permettra de comprendre sa propre incompétencedans la connaissance de Dieu, qui peut être senti par le coeur mais reste hermétique aux analyses de la raison.
PASCAL (Biaise). Né à Clermont-Ferrand en 1623, mort à Paris en 1662. Enfant précoce, il écrivit à onze ans un traité des sons, et retrouva tout seul, à douze ans, la trente-deuxièmeproposition du premier livre d'Euclide.
A dix-neuf ans, il inventa une machine arithmétique.
En 1646, il entre enrelations avec Port-Royal et fait sa première expérience sur le vide.
A partir de 1652, commence ce que l'on aappelé la « vie mondaine » de Pascal.
Ami du duc de Roannez, il fréquente les salons et les femmes, s'adonne aujeu, mais poursuit cependant la réalisation de ses travaux mathématiques : il se révèle le promoteur de l'analyseinfinitésimale et du calcul des probabilités.
Insatisfait de la vie qu'il mène, las du monde, le cœur vide, il éprouve lanostalgie de Dieu.
Pascal a une illumination dans la nuit du 23 novembre 1654, et trace quelques lignes sur unmorceau de papier, qu'il conservera cousu à l'intérieur de son vêtement.
Il se retire à Port-Royal-des-Champs, etparticipe avec ardeur à la polémique qui oppose les Jansénistes et les Jésuites, prenant la défense de Port-Royal(1656-1657).
La guérison de sa nièce, à la suite de l'attouchement d'une épine de la couronne de Jésus, le rendencore plus convaincu dans sa foi chrétienne.
Il abandonne ses recherches de mathématiques et de géométrie, etvit désormais dans l'humilité et la souffrance.
Il imagine la création de carrosses à cinq sols pour le déplacement despauvres, voitures qui sont à l'origine des transports publics en commun.
Il meurt le 17 août 1662.
— Bien entendu, iln'y a pas de système philosophique de Pascal, que Bayle a appelé « un individu paradoxe de l'espèce humaine ».Malade et las, Pascal a cherché en souffrant.
Il s'est approché de l'univers invisible, à tâtons.
Dieu est pour lui « ladernière fin, comme lui seul est le vrai principe ».
Polémiste, géomètre, physicien, Pascal est l'un des plus grandsécrivains français.
Sa distinction entre l'esprit de géométrie et l'esprit de finesse est célèbre.
L'esprit de géométrie,c'est celui qui procède par définitions et déductions rigoureusement logiques et qui s'étend jusqu'aux plus extrêmesconséquences.
L'esprit de finesse, c'est la « souplesse de pensée » qui permet, face à la complexité des choses,l'adaptation aux circonstances concrètes.
— Rappelons ici l'argument du pari, dans le problème de l'existence deDieu.
Ou bien Dieu est, ou bien il n'est pas.
Or, « il faut parier, cela n'est pas volontaire, vous êtes embarqué.Lequel prendrez-vous donc?...
Votre raison n'est pas plus blessée en choisissant l'un que l'autre, puisqu'il fautnécessairement choisir.
Voilà un point vidé ; mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix queDieu est.
Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien.
Gagezdonc qu'il est, sans hésiter...
Tout joueur hasarde avec certitude pour gagner avec incertitude : et néanmoins ilhasarde certainement le fini pour gagner incertainement le fini, sans pécher contre la raison...
Et ainsi, notreproposition est dans une force infinie, quand il y a le fini à hasarder à un jeu où il n'y a pareils hasards de gain quede perte, et l'infini à gagner ».
— La grandeur de Pascal est dans ce combat qu'il a mené, où il a engagé toutes lescontradictions de son être, dans cette quête gémissante de la vérité.
Elle est aussi dans cette sourde inquiétudequ'il a fait naître dans le cœur des hommes, même dans le cœur de ses adversaires les plus obstinés.
Comme l'a ditun philosophe contemporain, « Pascal a vécu intensément le combat du chrétien, la lutte avec l'ange de la foi, où laseule victoire est de se reconnaître vaincu.
».
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