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Blaise PASCAL: De l'identité du moi ?

Publié le 01/04/2005

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Qu'est-ce que le moi ? Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants, si je passe par là, puis je dire qu'il s'est mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier ; mais celui qui aime quelqu'un à cause de sa beauté, l'aime-t-il ? Non : car la petite vérole qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu'il ne l'aimera plus. Et si on m'aime pour mon jugement, pour ma mémoire, m'aime-t-on ? moi? Non, car je puis perdre ces qualités sans me perdre moi-même. Où est donc ce moi, s'il n'est ni dans le corps ni dans l'âme ? et comment aimer le corps ou l'âme, sinon pour ces qualités qui ne sont point ce qui fait le moi, puisqu'elles sont périssables ? Car aimerait-on la substance de l'âme d'une personne, abstraitement, et quelques qualités qui y fussent ? Cela ne se peut, et serait injuste. On n'aime donc jamais personne, mais seulement des qualités. Qu'on ne se moque donc plus de ceux qui se font honorer pour des charges et des offices, car on n'aime personne que pour des qualités empruntées. Blaise PASCAL

Le texte ne dissocie pas le problème de la relation interpersonnelle d'une approche de la condition humaine. Ceux qui prétendent définir le moi ou la personne d'autrui comme points de repère « absolus « tombent sous le coup d'une relativisation ontologique de toute réalité humaine. Ce qui est constitutif de l'être est éphémère, vulnérable, apparent. D'où la vanité d'une affectivité qui s'attache au relatif, au transitoire, en s'illusionnant sur son objet. Un texte très typé de l'oeuvre pascalienne, tiré des Pensées, et qu'on pourra rapprocher d'autres passages caractéristiques (comme celui où Pascal tourne l'amour en dérision : « Ce je ne sais quoi, si peu de chose qu'on ne peut le reconnaître, remue toute la Terre... «, Pensées 162, 163).

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« en matière de sentiments. • La distinction traditionnelle substance-qualités, appliquée à l'être humain, ne peut recouvrir qu'une illusion.L'homme ne voit que des qualités, et tout ce qu'il suppose ou imagine au-delà de celles-ci est arbitraire.

Ilapparaît ainsi comme fondamentalement limité dans sa connaissance et dans sa vie affective, même s'il nourritdes illusions sur lui-même et se gargarise d'absolu (cf.

le thème du divertissement). • La conception en jeu dans le texte est une problématique de la finitude, qui réduit l'« existence mondaine »de l'homme à un jeu d'apparences doublées de processus dérisoires d'idéalisation et de mystification.

r amour,le moi, la personne sont hypostasiés (érigés en absolu) dans le divertissement où l'homme s'efforce d'oublier safinitude.

Le renversement d'une telle aliénation ne peut se produire que dans une foi inconditionnelle (thèmejanséniste) où l'homme, conscient de sa finitude et de sa misère, abandonne les mirages du divertissement,relativise toute donnée temporelle, et se consacre à ce véritable absolu qu'est l'éternité divine. • Un horizon religieux de Pascal, vivifié par une acerbe critique du laxisme des jésuites (cf.

Les Provinciales),aboutit dans ce texte à de curieuses conséquences, dont on saisira le caractère paradoxal : d'un côté, Pascaldémystifie tous les processus idéologiques par lesquels des réalités temporelles - autorité, loi, « puissancesd'établissement », etc.

- sont érigées en absolus et respectées comme tels ; de l'autre, parvenu pourtant àune conscience très critique, il semble s'en tenir à ce qui est, comme si aucune action « terrestre » n'avaitréellement d'enjeu, et, tout étant égal, le réalisme pouvait aisément s'installer dans le conformisme.

Ceparadoxe n'est cependant qu'une conséquence de la conception religieuse propre à Pascal.

Il permet decomprendre le statut qu'il réserve à l'imagination comme « maîtresse d'erreur et de fausseté », faculté parlaquelle l'homme transfigure sa finitude (divertissement) mais se méprend ainsi sur sa condition réelle : «l'imagination dispose de tout ; elle fait la beauté, la justice, et le bonheur qui est le tout du Monde ». PASCAL (Biaise). Né à Clermont-Ferrand en 1623, mort à Paris en 1662. Enfant précoce, il écrivit à onze ans un traité des sons, et retrouva tout seul, à douze ans, la trente-deuxièmeproposition du premier livre d'Euclide.

A dix-neuf ans, il inventa une machine arithmétique.

En 1646, il entre enrelations avec Port-Royal et fait sa première expérience sur le vide.

A partir de 1652, commence ce que l'on aappelé la « vie mondaine » de Pascal.

Ami du duc de Roannez, il fréquente les salons et les femmes, s'adonne aujeu, mais poursuit cependant la réalisation de ses travaux mathématiques : il se révèle le promoteur de l'analyseinfinitésimale et du calcul des probabilités.

Insatisfait de la vie qu'il mène, las du monde, le cœur vide, il éprouve lanostalgie de Dieu.

Pascal a une illumination dans la nuit du 23 novembre 1654, et trace quelques lignes sur unmorceau de papier, qu'il conservera cousu à l'intérieur de son vêtement.

Il se retire à Port-Royal-des-Champs, etparticipe avec ardeur à la polémique qui oppose les Jansénistes et les Jésuites, prenant la défense de Port-Royal(1656-1657).

La guérison de sa nièce, à la suite de l'attouchement d'une épine de la couronne de Jésus, le rendencore plus convaincu dans sa foi chrétienne.

Il abandonne ses recherches de mathématiques et de géométrie, etvit désormais dans l'humilité et la souffrance.

Il imagine la création de carrosses à cinq sols pour le déplacement despauvres, voitures qui sont à l'origine des transports publics en commun.

Il meurt le 17 août 1662.

— Bien entendu, iln'y a pas de système philosophique de Pascal, que Bayle a appelé « un individu paradoxe de l'espèce humaine ».Malade et las, Pascal a cherché en souffrant.

Il s'est approché de l'univers invisible, à tâtons.

Dieu est pour lui « ladernière fin, comme lui seul est le vrai principe ».

Polémiste, géomètre, physicien, Pascal est l'un des plus grandsécrivains français.

Sa distinction entre l'esprit de géométrie et l'esprit de finesse est célèbre.

L'esprit de géométrie,c'est celui qui procède par définitions et déductions rigoureusement logiques et qui s'étend jusqu'aux plus extrêmesconséquences.

L'esprit de finesse, c'est la « souplesse de pensée » qui permet, face à la complexité des choses,l'adaptation aux circonstances concrètes.

— Rappelons ici l'argument du pari, dans le problème de l'existence deDieu.

Ou bien Dieu est, ou bien il n'est pas.

Or, « il faut parier, cela n'est pas volontaire, vous êtes embarqué.Lequel prendrez-vous donc?...

Votre raison n'est pas plus blessée en choisissant l'un que l'autre, puisqu'il fautnécessairement choisir.

Voilà un point vidé ; mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix queDieu est.

Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien.

Gagezdonc qu'il est, sans hésiter...

Tout joueur hasarde avec certitude pour gagner avec incertitude : et néanmoins ilhasarde certainement le fini pour gagner incertainement le fini, sans pécher contre la raison...

Et ainsi, notreproposition est dans une force infinie, quand il y a le fini à hasarder à un jeu où il n'y a pareils hasards de gain quede perte, et l'infini à gagner ».

— La grandeur de Pascal est dans ce combat qu'il a mené, où il a engagé toutes lescontradictions de son être, dans cette quête gémissante de la vérité.

Elle est aussi dans cette sourde inquiétudequ'il a fait naître dans le cœur des hommes, même dans le cœur de ses adversaires les plus obstinés.

Comme l'a ditun philosophe contemporain, « Pascal a vécu intensément le combat du chrétien, la lutte avec l'ange de la foi, où laseule victoire est de se reconnaître vaincu.

». »

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