Bertrand Russell - Problèmes de philosophie Chapitre VI : Sur l'induction
Publié le 08/11/2023
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Bertrand Russell - Problèmes de philosophie
Chapitre VI : Sur l'induction
L'intérêt du principe d'induction : L'expérience (connaissance immédiate des choses) immédiate se base sur des sensedata (données sensibles) et sur le Moi (cf chapitres précédents).
Pour dépasser l'expérience privée, il faut connaître des
principes généraux (ex : induction) qui permettent ces inférences (passer de l'individuel à du général).
Ex d'inférence : j'ai
toujours vu le soleil se lever -> il se lèvera demain.
Cette inférence est possible grâce au principe d'induction car la
croyance en les lois du mouvement s'explique par le fait que la nature y a toujours obéi par le passé.
Ce type
d'association est aussi présent chez les animaux.
Y-a-t-il une uniformité de la nature ? : La question est de savoir si tout événement est un instance d'une loi générale sans
exception.
Même si toute règle est sujette à des exceptions, on peut toujours trouver des lois plus générales qui elles sont
sans exception.
C'est le rôle de la science que de les trouver.
Si uniformité par le passé, y en aura-t-il une dans le futur ? : séquence argumentative qui mène au principe d'induction :
- Argument : le futur ressemblera au passé puisque le passé a été futur, et s'est déroulé comme le passé de l'époque.
- Objection : cet argument est circulaire et présuppose la réponse.
On peut pas savoir si les futurs actuels ressembleront
aux futurs passés.
- Solution : le principe d'induction : une association régulière ne prouve pas de façon certaine la répétition de
l'événement mais implique une certaine probabilité de cet événement.
- Objection : les événements sont soumis au règne des lois -> si une seule loi s'adapte, on peut être certain.
- Réponses qui assoient le principe d'induction : (1) On ne peut jamais être sûr d'avoir découvert la loi sans exceptions
(2) Notre croyance en le règne des lois est elle-même basée sur notre observation du passé donc sur le principe
d'induction -> la fiabilité du règne des lois même peut être mise en doute par les limites du principe d'induction.
Résumé du principe d'induction : + on trouve d'associations A / B, + il est probable de trouver A associé à B (à condition
qu'on n'ait jamais vu A sans B).
Un nombre suffisant d'associations fera que la probabilité de A avec B s'approche de la
certitude (mais jamais totale).
Remarques :
- La probabilité est toujours relative aux données disponibles : la prise en compte de nouvelles données rendre plus
précise la probabilité.
- Le fait que l'expérience réfute une induction ne permet pas de réfuter le principe d'induction lui-même : même si des
prévisions sont réfutées, cela n'est pas une preuve qu'elles ne seront pas confirmées probablement dans un certain
nombre de cas (le principe d'induction est protégé par le fait qu'il n'entraine qu'une probabilité).
- Mais l'expérience ne peut pas non plus prouver le principe d'induction puisque tout raisonnement qui se base sur
l'expérience présuppose le principe d'induction.
Donc 2 solutions sont possibles : accepter le principe d'induction car
il est intrinsèquement évident (ce qu'on fait ici) ou le rejeter (car impossible de le prouver) -> renoncer à justifier toute
prévision, mais aussi renoncer aux principes généraux car eux aussi dépendent de l'induction : on croit en leur
validité car on a vu un grand nombre d'exemples sans contre-exemples, mais au fond rien ne les infirme.
Chapitre VII : Notre connaissance des principes généraux
Intérêt d'une connaissance ferme des principes généraux : Dans nos raisonnements s'appuyant sur l'expérience, d'autres
principes que l'induction interviennent, qui sont ni réfutables ni déductible de l'expérience, et que nous acceptons aussi
fermement, voire plus.
Leur évidence est tout aussi nécessaire que celles des sens-data pour un raisonnement valide.
Il existe des principes généraux évidents, premiers : La méthode pour trouver des principes généraux semble être :
remarquer une application particulière puis comprendre qu'elle n'est pas pertinente et y voir une vérité générale.
Or la
validité de ce raisonnement, et même de tout raisonnement, présuppose notamment un principe logique ("ce qui s'est
suit d'une proposition vraie est vrai").
Il existe d'autres principes logiques évidents, comme ceux regroupés sous "lois de
la pensée" (appellation trompeuse car l'important n'est pas l'accord de nos pensées mais des faits à elles) : loi d'identité,
de non-contradiction et du tiers exclus.
Ces principes permettent de démontrer une certitude à partir de prémisses, mais
d'autres permettent de démontrer une certaine probabilité à partir de prémisses : par ex, le principe d'induction.
Participation des écoles rationaliste et empiriste dans la connaissance des principes : les rationalistes ont principalement
raison car les principes généraux sont connus a priori, mais l'expérience est participative :
-> Les rationalistes ont raison car les principes logiques ne peuvent être prouvés par l'expérience puisque tout
raisonnement par l'expérience les présuppose.
Même si l'expérience exemplifie les lois générales, et cause et suscite
notre connaissance de celles-ci, cette-dernière reste a priori : ø preuve demandée à l'expérience.
-> Mais les empiristes ont raison dans la mesure où la connaissance ne pourrait exister sans l'expérience : la
connaissance a priori seule en ce qui concerne l'existence est hypothétique donc elle est limitée, et là se trouve l'erreur
des rationalistes.
L'expérience des données est comptées au nombre des prémisses du jugement.
=> Ainsi, connaissance empirique = savoir immédiat par l'expérience seule / connaissance a priori seule = hypothétique /
Finalement, connaissance a priori + l'expérience permet de prouver une existence (des principes notamment).
Types de connaissance a priori (associée à l'expérience) :
- Principes logiques : par exemple, les mathématiques pures ou la géométrie : on a besoin d'instances particulières, mais
elles deviennent inutiles dès voit le principe général.
- Principes éthiques : par exemple, savoir ce qui est bon ou mauvais : jugement a priori et même si il est suscité par
l'expérience, celle-ci ne peut le démontrer.
Raisonnement associé à la connaissance a priori : la déduction : La connaissance a priori dépasse l'instance particulière
et devient une nécessité, que ne pourrait jamais atteindre une généralisation empirique.
En effet, celle-ci fonctionne par
induction donc on ne pourra jamais atteindre la certitude (cf chapitre VI).
Pour les connaissances a priori, c'est la
déduction qui est la bonne méthode de raisonnement (du général au général ou au particulier), d'autant plus que la
déduction permet dans certains cas de créer des connaissances nouvelles (pas dans celui des syllogismes, exemple
fréquent de déduction qui passe inutilement par le général, réduisant la probabilité de certitude).
Chapitre VIII : Comment une connaissance a priori est-elle possible ?
Processus historique en philosophie qui a permis de conclure que les connaissances a priori ne sont pas analytiques :
- Avant on pensait que les connaissances a priori étaient analytiques : le prédicat, contenu dans le sujet, s'obtient en
l'analysant.
- Puis Hume a montré que la relation de causalité n'était pas analytique mais synthétique : il est faux de croire que
l'effet peut être déduit de la cause pourvu que notre connaissance est suffisante.
Mais il en a conclu que rien n'est
connaissable a priori du lien de cause à effet (ce qui est plus contestable).
- Kant a voulu répondre à ce scepticisme et a montré que toutes les propositions d'arithmétique et de géométrie sont
synthétiques : aucune analyse ne montre que le prédicat y est contenu (ex : dans 7 + 5 = 12).
Un argument plus simple
suffisait à fonder la vérité de toute connaissance a priori (i.e.
pas de contraire possible) : si les connaissances a priori
étaient analytiques, elles possèderaient un contraire contradictoire en lui-même puisque cela nierait et affirmerait une
même chose (ex : un homme chauve n'est pas chauve) or ceci est impossible selon le principe de non-contradiction.
Nouvelle question posée par Kant : comment la mathématique pure est-elle possible ?
- Réponse des empiristes radicaux : par l'induction, la généralisation empirique, en dérivant des instances particulières.
- Objection à la réponse empiriste : 2 raisons : (1) la validité du principe d'induction (ce qu'on cherche à prouver) ne
peut être prouvée par induction, et (2) les mathématiques n'ont pas besoin de plus d'un cas pour comprendre les lois
générales.
En somme, partir de l'expérience pour comprendre du général pose problème d'où disqualification réponse.
- Réponse kantienne : distinction de l'objet physique (ou chose en soi) et de nous, qui sont deux éléments qui
contribuent à l'expérience : l'objet possède le matériau brut donné dans la sensation, et nous apportons un ordre car
nous avons une connaissance a priori de l'espace et du temps, de la causalité et de la comparaison des phénomènes,
et non du matériau brut -> tentative de réconciliation des prétentions du rationalisme et des objections empiristes.
L'objet physique est alors inconnaissable, ce qui peut être connu est le phénomène (objet tel qu'il apparait dans
l'expérience), conforme à nos connaissances a priori, en dehors desquelles nous ne pouvons rien connaître.
- Objection à la réponse kantienne : (1) si nous importons la logique et l'arithmétique, connaissances a priori, on a....
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