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BERGSON: Pensée, langage et création

Publié le 27/02/2008

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L'oeuvre géniale est le plus souvent sortie d'une émotion unique en son genre, qu'on eût crue inexprimable, et qui a voulu s'exprimer. Mais n'en est-il pas ainsi de toute oeuvre, si imparfaite soit-elle, où entre une part de création ? Quiconque s'exerce à la composition littéraire a pu constater la différence entre l'intelligence laissée à elle-même et celle que consume de son feu l'émotion originale et unique, née d'une coïncidence entre l'auteur et son sujet, c'est-à-dire d'une intuition. Dans le premier cas l'esprit travaille à froid, combinant entre elles des idées, depuis longtemps coulées en mots, que la société lui livre à l'état solide. Dans le second, il semble que les matériaux fournis par l'intelligence entrent préalablement en fusion et qu'ils se solidifient ensuite à nouveau en idées cette fois informées par l'esprit lui-même : si ces idées trouvent des mots préexistant pour les exprimer, cela fait pour chacune l'effet d'une bonne fortune inespérée ; et, à vrai dire, il a souvent fallu aider la chance, et forcer le sens du mot pour qu'il se modelât sur la pensée. L'effort est cette fois douloureux, et le résultat aléatoire. Mais c'est alors seulement que l'esprit se sent ou se croit créateur. BERGSONLe projet de la philosophie de Bergson est de penser la vie comme évolution, dans le but de parvenir à expliquer l'intelligence, la science et la technique de l'homme en tant qu'être créateur. L'extrait choisit pour notre analyse est à ce titre exemplaire de la pensée de l'auteur, car il part de l'expérience créative de l'homme pour en comprendre le processus évolutif,  et ainsi déterminer les conditions inhérentes à la vie et à l'homme qui permettent à l'être humain d'accomplir des oeuvres, et par conséquent de développer ses capacités et de donner un sens à la vie à travers l'émergence de la nouveauté.
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« de l'homme ne consiste alors qu'en un simple assemblage.

Ce résultat est celui d'une production de l'intelligencelivrée à elle-même, qui est donc incapable de faire œuvre de création à elle seule, sans l'intuition. - Par opposition, la véritable création consiste à faire « fusionner les matériaux fournis par l'intelligence » pour lestransformer, et les « solidifier » sous une forme originale, grâce à l'esprit de l'artiste qui est alimenté par l'émotionoriginale. 3ème partie : conséquence = la création comme expression de la liberté. Après avoir établit cette distinction fondamentale entre simple production sans création et la véritable création, quidoit être absolument originale, Bergson concède pourtant qu'il peut arriver que certaines idées provoquée parl'émotion originale à l'origine de la création trouvent déjà leur expression dans des mots existants.

Cela semblecontredire sa théorie, car alors on ne peut plus parler de création, et on se retrouve dans le cas de la premièresituation décrite, celle d'une production sans création, simple assemblage de matériaux déjà existants.

Néanmoins,l'auteur poursuit que l'usage de mots existants préalablement nous donne plus l'illusion d'une satisfaction d'un donné déjà fournit pour la production de l'œuvre, mais qu'en réalité, le mot est rarement utilisé comme il avait pu l'êtreauparavant.

La création est donc assurée dans l'usage qui est fait du mot, qui est lui-même original, même si le motlui-même ne l'est pas.

Si le mot reste le même, le sens du mot est modifié, transformé, « forcé », et donc le motpeut être considéré comme nouveauté, et comme création originale. - Bergson réintroduit donc le rôle créatif de l'artiste, qui ne doit pas être pensé comme un simple agent ouvrier auservice d'une émotion qui le dirigerait, mais doit lui-même participer à l'invention de l'œuvre, et décider de la formede l'œuvre.

La création nécessite donc deux principe : l'émotion et l'intelligence de l'artiste, rassemblés dansl'intuition.

Bergson est donc opposé à un asservissement de l'artiste, et affirme au contraire sa liberté à déterminerl'œuvre par son choix.

C'est ce qui fait la véritable création, son indétermination, sa possibilité à être ou ne pasêtre. - Bergson s'appuie sur cette situation limite de la création pour montrer à quel point la création originale peut êtredifficile, et relever d'un véritable « effort », susceptible d'engendrer une douleur chez l'artiste qui peine à trouver laforme capable d'exprimer l'émotion qui cherche à s'extérioriser. - Néanmoins, cet effort témoigne de l'esprit véritablement créateur de l'homme, car il lui permet de sentir l'acte decréation.

Cette création est alors l'affirmation même de la liberté de l'homme. Conclusion : En expliquant le principe de la création à l'appui de l'exemple de l'œuvre littéraire, Bergson dans ce texte développesa théorie de l'évolution créatrice, qui n'est autre que l'essence de la vie elle-même.

Bergson annonce ce qu'ildéveloppe dans l'ensemble de son ouvrage L'évolution créatrice : la vie est comme l'œuvre de l'artiste qui fait advenir le radicalement nouveau, ou plus exactement l'original.

La création, si elle dépend d'une émotion originale etunique qui cherche à s'exprimer, est cependant l'œuvre de l'homme, et la conséquence de sa liberté à déterminer saproduction, à instaurer le changement, à accoucher d'une nouveauté singulière et unique.

L'homme est doncpuissance créatrice au sens fort, c'est-à-dire non plus seulement fabriquant, mais créateur, innovant.

Cette analysede la création artistique permettra à Bergson d'en venir ensuite à l'analogie avec la vie elle-même, qui est créationincessante de soi par soi.

Car pour Bergson, « nous sommes, dans une certaine mesure, ce que nous faisons et nousnous créons continuellement nous-mêmes ».. »

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