BERGSON: l’observation (l’expérience) et l’intelligence (la théorie)
Publié le 13/01/2020
Extrait du document
Dégagez l’intérêt philosophique de ce texte en procédant à son étude ordonnée.
Trop souvent nous nous représentons encore l'expérience comme destinée à nous apporter des faits bruts : l'intelligence, s'emparant de ces faits, les rapprochant les uns des autres, s'élèverait ainsi à des lois de plus en plus hautes. Généraliser serait donc une fonction, observer en serait une autre. Rien de plus faux que cette conception du travail de synthèse, rien de plus dangereux pour la science et pour la philosophie. Elle a conduit à croire qu'il y avait un intérêt scientifique à assembler des faits pour rien, pour le plaisir, à les noter paresseusement et même passivement, en attendant la venue d'un esprit capable de les dominer et de les soumettre à des lois. Comme si une observation scientifique n'était pas toujours la réponse à une question, précise ou confuse ! Comme si des observations notées passivement à la suite les unes des autres étaient autre chose que des réponses décousues à des questions posées au hasard ! Comme si le travail de généralisation consistait à venir, après coup, trouver un sens plausible à ce discours incohérent.
Bergson
Comment le savoir scientifique s'élabore-t-il ? Pour bâtir une théorie, il faut, semble-t-il, commencer par rassembler des faits par l'observation, avant de les organiser et de découvrir les rapports qu'ils entretiennent entre eux.
C'est contre cette vision commune du processus de la connaissance que Bergson part en guerre dans le texte que nous allons étudier; selon lui, il est particulièrement dommageable de dissocier la démarche de l’observation et celle de l'élaboration conceptuelle.
Sa critique s'établit ici en trois temps : après avoir évoqué la conception commune, il la dénonce comme fausse, nuisible et « paresseuse », pour affirmer enfin qu'il n'y a pas d'observation scientifique qui ne soit guidée par un questionnement de l'intelligence.
«
++++~++++++++++++++++++++
REPERER LE MOUVEMENT DU TEXTE
Le texte se répartit très clairement en trois moments argu
mentatifs:
Thèse : on se représente encore trop souvent une séparation
des fonctions d'observation et de généralisation.
Critique de Pargument : « Rien de plus faux [.
..
]J> : les
conséquences de cette façon de voir.
Réfutation : « Comme si [.
..
]» : Bergson oppose à celle qu'il a
critiquée sa conception de ce qu'est véritablement l'observation
des faits.
+++++++++++++++++++++++++
EXPLICITER LES TERMES
-« des faits bruts » : à quoi s'oppose l'adjectif« brut » ? En
quoi marque-t-il l'opposition courante entre /'expérience et la
théorie? Quel adjectif opposé pourrait caractériser les faits dont
s'est « emparée» l'intelligence?
-« des lois de plus en plus hautes » : autrement dit de plus en
plus abstraites et générales, englobant de plus en plus de faits.
-«travail de synthèse» :précisez le lien entre cette expression
et l'idée de « généralisation J>.
-« rien de plus dangereux pour la science et pour la philoso
phie » : pourquoi aussi pour la philosophie?
-« noter paresseusement » : c'est-à-dire sans effort de trans
formation de la réalité observée.
Or cela suppose que les faits
se présentent à nous tels quels, en quelque sorte prédécoupés,
ce que Bergson conteste : pour « voir » des faits et pouvoir les
noter il faut déjà faire un travail de découpage du réel et donc
adopter une attitude d'interrogation.
G.
BACHELARD, Le Nouvel Esprit scientifique, PUE
H.
BERGSON, La Pensée et le Mouvant, PUE
1
1
~
•
j
l 1.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Bergson: l’expérience et la théorie
- MÉMOIRE SUR LA THÉORIE MATHÉMATIQUE DES PHÉNOMÈNES ÉLECTRODYNAMIQUES UNIQUEMENT DÉDUITE DE L’EXPÉRIENCE.
- Trop souvent nous nous représentons encore l'expérience comme destinée à nous apporter des faits bruts : l'intelligence, s'emparant de ces faits, les rapprochant les uns des autres, s'élèverait ainsi à des lois de plus en plus hautes.
- La théorie et l’expérience - E. Kant, Critique de la raison pure, préface de la seconde édition.
- Une théorie sans expérience