bergson
Publié le 02/01/2016
Extrait du document


«
conscience qui ne conserverait rien de son passé, qui s'oublierait sans cesse elle-même, périrait
et renaîtrait à chaque instant : comment définir autrement l'inconscience ? Quand Leibniz
disait de la matière que c'est " un esprit instantané " , ne la déclarait-il pas, bon gré, mal gré,
insensible ? Toute conscience est donc mémoire − conservation et accumulation du passé dans le
présent.
Mais toute conscience est anticipation de l'avenir.
Considérez la direction de votre esprit à
n'importe quel moment : vous trouverez qu'il s'occupe de ce qui est, mais en vue surtout de ce qui
va être.
L'attention est une attente, et il n'y a pas de conscience sans une certaine attention à la vie.
L'avenir est là ; il nous appelle, ou plutôt il nous tire à lui : cette traction ininterrompue, qui nous
fait avancer sur la route du temps, est cause aussi que nous agissons continuellement.
Toute action
est un empiétement sur l'avenir.
Retenir ce qui n'est déjà plus, anticiper sur ce qui n'est pas encore,
voilà donc la première fonction de la conscience.
Il n'y aurait pas pour elle de présent, si le présent
se réduisait à l'instant mathématique.
Cet instant n'est que la limite, purement théorique, qui sépare
le passé de l'avenir ; il peut à la rigueur être conçu, il n'est jamais perçu ; quand nous croyons le
surprendre, il est déjà loin de nous.
Ce que nous percevons en fait, c'est une certaine épaisseur de
durée qui se compose de deux parties : notre passé immédiat et notre avenir imminent.
Sur ce passé
nous sommes appuyés, sur cet avenir nous sommes penchés ; s'appuyer et se pencher ainsi est le
propre d'un être conscient.
Disons donc, si vous voulez, que la conscience est un trait d'union entre
ce qui a été et ce qui sera, un pont jeté entre le passé et l'avenir.
Bergson « la conscience et la vie » L’Energie Spirituelle
B) L’activité intellectuelle fonde le sujet : la transparence à soi du sujet pensant
Je ne sais si je dois vous entretenir des premières méditations que j'y ai faites; car elles sont si
métaphysiques et si peu communes, qu'elles ne seront peut-être pas au goût de tout le monde.
Et
toutefois, afin qu'on puisse juger si les fondements que j'ai pris sont assez fermes, je me trouve en
quelque façon contraint d'en parler.
J'avais dès longtemps remarqué que, pour les mœurs, il est
besoin quelquefois de suivre des opinions qu'on sait fort incertaines, tout de même que si elles
étaient indubitables, ainsi qu'il a été dit ci-dessus; mais, parce qu'alors je désirais vaquer seulement
à la recherche de la vérité, je pensai qu'il fallait que je fisse tout le contraire, et que je rejetasse,
comme absolument faux, tout ce en quoi je pourrais imaginer le moindre doute, afin de voir s'il ne
resterait point, après cela, quelque chose en ma créance, qui fût entièrement indubitable.
Ainsi, à
cause que nos sens nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu'il n'y avait aucune chose qui
fut telle qu'ils nous la font imaginer.
Et parce qu'il y a des hommes qui se méprennent en raisonnant,
même touchant les plus simples matières de géométrie, et y font des paralogismes, jugeant que
j'étais sujet à faillir, autant qu'aucun autre, je rejetais comme fausses toutes les raisons que j'avais
prises auparavant pour démonstrations.
Et enfin, considérant que toutes les mêmes pensées, que
nous avons étant éveillés, nous peuvent aussi venir, quand nous dormons, sans qu'il y en ait aucune,
pour lors, qui soit vraie, je me résolus de feindre que toutes les choses qui m'étaient jamais entrées
l'esprit n'étaient non plus vraies que les illusions de mes songes.
Mais, aussitôt après, je pris garde
que, pendant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallait nécessairement que moi, qui le
pensais, fusse quelque chose.
Et remarquant que cette vérité : "je pense, donc je suis", était si ferme
et si assurée, que toutes les plus extravagantes suppositions des sceptiques n'étaient pas capables de
l'ébranler, je jugeais que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de la
philosophie que je cherchais.
Descartes, Discours de la méthode , IV
a) l'expérience du doute : évidence du cogito comme 1ere certitude, séparation de âme et du corps
b) la souveraineté du moi pensant (csce de soi = pensée intellectuelle) sur sensations et affects.
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