Autrui peut-il m'aider ?
Publié le 04/06/2012
Extrait du document
N’est-il pas évident qu’en cas de défaillance de ma part que j’en appelle spontanément à autrui ? Dans la confrontation entre les possibles même dans une situation peu douloureuse, n’est-il pas un acte spontané d’en appeler à cet autre, à l’autre, pour ne pas dire aux autres ? Parfois même n’est-il pas heureux de demander, voire d’exiger qu’autrui nous aide ? Mais n’interpeller autrui qu’en cas de difficulté n’est-ce pas le nier dans sa propre humanité, une personne donc, pour le réduire à un simple instrument ? Ne voir en l’autre qu’une aide, un secours, pour ne pas dire un recours, n’est-ce pas nier autrui en que cet autre que je ne suis pas pour en faire un instrument, le ravalant au rang d’outil utile à ma propre convenance ? Aussi, autrui n’est-il pas un simple moyen pour parvenir à mes fins ? N’est-ce pas là le moyen le plus assuré de renvoyer mon alter ego au rang de chose parmi les choses en le déshumanisant ?
«
obstacle à l’ascension de mon être s’opposant à la réalisation d e Soi, il n’est pas une aide au sens
d’un secours, il n’est qu’un recours pour accéder pleinem ent à mon humanité.
Autrui a donc un
statut ambigu et paradoxal : il est tout à la fois obstacle, moyen nécessaire entre un moi spontané et
ascension à la conscience d e soi.
Car que serait une conscience qui ne pourrait pas, par la conscience
médiée, prendr e conscience d’être une conscience ? Une conscience pour devenir conscience de soi
requiert une autre conscience , celle d e cet autre que je n e suis pas.
N’est-ce pas dir e qu’autrui est le médiate ur entre moi et moi-même pour être ou devenir ce
que je suis ?
Suivant la ligne hégélienne, Sartre oppose la conscience solitaire à la conscience devant e t
pour autrui.
En effet , dans L’Etre et le néant ( L’Etre et le néant, 1943, Paris, Tel Gallimard , p.
306 sq),
l’existentialiste propose un scénario fictif sans être dépourvu d e réalisme pour montrer que la
conscience de soi requiert nécessairement le recours à une autre conscience.
Si par jalousie, j’ en
viens à coller mon oreille contre une porte, en regardant par le trou d e la serrure, je suis seul, ce q ui
signifie qu’il n’y a pas d e moi pour habiter cette conscience.
Si je suis l’ ensemble d e m es actes, il n’y a
personne pour attester l’acte .
Certes, ma conscience colle à ses actes, je ne suis que me s actes, mais
ses actes sont- ils mie ns ? Il faut l’ intervention d’une autre conscience pour prendre p le inem ent
conscience d e ma conscience.
J e lève la tête , quelqu’un est là qui m’ observe.
J’ai alors hon te de moi.
Mais la honte n’a de sens que dev ant autrui.
J’ai donc honte de mon indiscrétion.
Autrui dès lors
m’impose un jugement sur moi -même tout m’ élevant vers ma propre conscience d’être.
La présence d’autrui n’implique pas une simple révélation de ce que j e suis ; elle me
constitue, me construit comme être conscient de lui -même .
Autrui est nécessairem ent une aide
précieuse puisqu’il me permet de m’ élever à la conscience d e soi.
Celui que je ne suis pas n’est pas
uniquement une aide secondaire, contingente ou accidentelle, il est celui qui me permet d’être celui
que je suis.
Cet être que je suis devenu sous le regard d’ autrui est « solidification et aliénation de
mes propres possibilités », car, explique Sartre, « s’il y a un A utre, qu’il soit sans même qu’il agisse
autrement sur moi par le surgissement d e son être, j’ai un dehors, j’ai une nature : ma chute
originale, c’est l’ existence de l’autre ; et la honte est — comme la fierté — l’appréhension de moi -
même c o m me nature ».
( Ibid., p.
307).
Il est clair que « le conflit est le sens originel de l’être -pour -
autrui ».
En effet , justifie l’auteur, autrui est de prime abord pour moi l’être qui me chosifie, sa
présence me transforme e n objet, car je ne suis pour lui qu’une chose qui lui nuit.
Il menace
uniquement par sa seule présence ce que j e suis pour faire de moi un objet d e son regard.
Mais
aussi et su rtout, par son simple regard , il me retire ce que j e suis dans mon être, c’est -à -dire un être
l i bre en m e réifiant.
La notion d’aide comme mo yen et son contraire, celle de buttoir, nous l’avons vu, ont en
commun d’ être relatives à une finalité qui leur est extérieure.
Nous comprenons alors dans cette
recherche du fondement de la relation primitive de ce que nous sommes avec, pour ou contre autrui,
si autrui peut fondalement m’aider.
La question se pos e d e savoir , dans la relation que j’entretiens
avec l ui, autrui peut être autre qu’un être relatif à une fin autre que lui ? Autre qu’un être dont la
rencontre concerne mon être.
Autre que relatif à mon être , à moi comme moi : c’est-à -dire une fin
ultime.
Autre que répondant à ce que je suis pour pouvoir penser ma relation à l’autre sur le monde
non d’un moyen, mais d’une fin ?
Par delà le fond ontologique de mon rapport avec autrui, ne doit- on pas penser que la
relation authentique entre moi et l’autre ne relève pas de l’amitié profonde ?.
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