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Autrui est-il limite ou condition de ma liberté ?

Publié le 11/03/2004

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On définit souvent la liberté comme l'absence de contraintes, la liberté de faire ce que l'on veut, à condition d'être un homme libre. La liberté est alors l'absence d'obstacles.  Or, autrui peut lui-même être présenté comme une certaine forme d'obstacle, puisque il m'empêche, indirectement, de faire tout ce que je veux. Il semble alors légitime de s'interroger sur la véritable valeur d'autrui quant à sa relation avec la liberté. Limite t il ma liberté, ou au contraire est il une condition nécessaire à ma liberté?  

  • I. Autrui limite, voire interdit ma liberté

a) une place que je ne peux pas occuper b) le désir mimétique 1° la honte et la jalousie 2° le désir mimétique c) le regard d'autrui est conflictuel d) le respect d'autrui m'interdit toute violence ( Kant > impératif catégorique ) e) le solipsisme comme connaissance de soi

  • II. Autrui m'est indispensable dans la vie en société

a) l'insociable sociabilité de l'homme b) dialectique du maitre et de l'esclave c) la vie en société passe par autrui

  • III. Autrui me permet d'accéder à mon humanité

a) aider autrui à atteindre sa liberté, c'est m'aider à l'atteindre moi-même b) la solidarité entre consciences c) le langage d) La dimension culturelle

« L'enfer c'est les autres 1.

« L'enfer c'est les autres »Cette célèbre formule de Huis clos est présentée de façon plus théoriquedans L'Être et le Néant.

Les autres existent autour de moi et viennentremettre en cause la liberté de ma conscience.

Et si autrui est un objet pourmoi, je suis moi-même un objet pour autrui : autrui me chosifie par sonregard, il me « vole le monde », ce monde dont je croyais être jusqu'à présentle centre.

Le conflit est ainsi le mode premier du rapport à autrui, maiségalement l'essence des relations entre les consciences : dans l'amour, parexemple, une conscience demande à l'autre sa liberté. 2.

La remise en question du sensCependant, la notion de groupe permet de penser des formes d'actionscollectives dans l'histoire.

Sartre oppose l'unité apparente de la « série » (unefile d'attente, par exemple, qui rassemble des individus qui sont tous là pourdes besoins différents) à celle du groupe, unité réelle d'individus participant àune action commune.

Cette nouvelle relation à autrui permet de comprendrel'histoire comme action de la liberté humaine. Ma chute originelle, c'est l'existence de l'autre... Sur la question d'autrui, Sartre souligne que seul Hegel s'est vraiment intéressé à l'Autre, en tant qu'il est celui parlequel ma conscience devient conscience de soi.

Son mérite est d'avoir montré que, dans mon être essentiel, jedépends d'autrui.

Autrement dit, loin que l'on doive opposer mon être pour moi-même à mon être pour autrui, «l'être-pour-autrui apparaît comme une condition nécessaire de mon être pour moi-même » : « L'intuition géniale deHegel est de me faire dépendre de l'autre en mon être.

Je suis, dit-il, un être pour soi qui n'est pour soi que par unautre.

»Mais Hegel n'a réussi que sur le plan de la connaissance : « Le grand ressort de la lutte des consciences, c'estl'effort de chacune pour transformer sa certitude de soi en vérité.

» Il reste donc à passer au niveau de l'existenceeffective et concrète d'autrui.

Aussi Sartre récupère-t-il le sens hégélien de la dialectique du maître et de l'esclave,mais en l'appliquant à des rapports concrets d'existence : regard, amour, désir, sexualité, caresse.

L'autredifférence, c'est que si, pour Hegel, le conflit n'est qu'un moment, Sartre semble y voir le fondement constitutif dela relation à autrui.

On connaît la formule fameuse : « L'enfer, c'est les autres ».

Ce thème est développé sur unplan plus philosophique dans « L'être & le néant ».

Parodiant la sentence biblique et reprenant l'idée hégélienne selonlaquelle « chaque conscience poursuit la mort de l'autre ».

Sartre y affirme : « S'il y a un Autre, quel qu'il soit, quelsque soient ses rapports avec moi, sans même qu'il agisse autrement sur moi que par le pur surgissement de sonêtre, j'ai un dehors, une nature ; ma chute originelle, c'est l'existence de l'autre...

»J'existe d'abord, je suis jeté dans le monde, et ensuite seulement je me définis peu à peu, par mes choix et par mesactes.

Je deviens « ceci ou cela ».

Mais cette définition reste toujours ouverte.

Je suis donc fondamentalement libre« projet », invention perpétuelle de mon avenir.

Et je suis celui qui ne peut pas être objet pour moi-même, celui quine peut même pas concevoir pour soi l'existence sous forme d'objet : « Ceci non à cause d'un manque de recul oud'une prévention intellectuelle ou d'une limite imposée à ma connaissance, mais parce que l'objectivité réclame unenégation explicite : l'objet, c'est ce que je me fais ne pas être...

»Or je suis, moi, celui que je me fais être.

Et c'est précisément parce que je ne suis que pure subjectivité et liberté,que le simple surgissement d'autrui est une violence fondamentale.

Peu importe qu'il m'aime, me haïsse ou soitindifférent à mon égard.

Il est là, je le vois et je découvre que je ne suis plus centre du monde, sujet absolu.

Il mevoit, et avec son regard s'opère une métamorphose dans mon être profond : je me vois parce qu'il me voit, jem'appréhende comme objet devant une transcendance et une liberté.Si chaque conscience est une liberté qui rêve d'être absolu, elle ne peut que chercher à transformer la liberté del'autre en chose passive.

Sartre illustre d'abord ce conflit à travers l'expérience du regard.

Qu'est-ce qui, en effet,me dévoile l'existence d'autrui, sinon le regard ? Si je regarde autrui, ce dernier me regarde aussi.

C'est la raisonpour laquelle Sartre envisage les deux moments.Dans un premier moment, je vois autrui.

Imaginons : « Je suis dans un jardin public.

Non loin de moi, voici unepelouse et, le long de cette pelouse, des chaises.

»Situation paisible.

Le décor est neutre, la trame est inexistante : « Un homme passe près des chaises.

Je vois cethomme...

»Finie la quiétude ! Pourquoi ? Tout simplement parce que je ne le saisis pas seulement comme un objet, mais aussiet en même temps comme un homme.

Si je pouvais penser qu'il n'est rien d'autre qu'un objet, un automate, parexemple, je le saisirais « comme étant « à côté » des chaises, à 2,20 m de la pelouse, comme exerçant une certainepression sur le sol, etc.

».

Autrement dit ce ne serait pour moi qu'un objet comme les autres, qui s'ajouterait auxautres : « Cela signifie que je pourrais le faire disparaître sans que les relations des autres objets entre eux soientnotablement modifiées.

En un mot, aucune relation neuve n'apparaîtrait par lui entre ces choses de mon univers...

»Le saisir comme homme, qu'est-ce que cela signifie, sinon saisir une « relation non additive » des objets à lui, unenouvelle organisation des choses de mon univers autour de cet objet privilégié ? Autrement dit, avec l'apparitiond'autrui dans mon champ de vision, une spatialité se déploie qui n'est pas ma spatialité, un autre centre du mondeapparaît et du même coup un autre sens du monde.

Les relations que j'appréhendais entre les objets de mon universse désintègrent : « L'apparition d'autrui dans le monde correspond donc à un glissement figé de tout l'univers, à unedécentration du monde qui mine par en dessous la centralisation que j'opère dans le même temps.

». »

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