Auguste RENOIR: TORSE DE JEUNE FILLE AU SOLEIL

« Contrairement aux autres impressionnistes, Renoir a consacré une grande partie de son oeuvre aux portraits.

Lafemme — synonyme de grâce joyeuse — y est tout naturellement à l'honneur. L'OEUVRE Il dit lui-même vouloir peindre les femmes « comme de beaux fruits ».

Et d'ajouter : « Moi, j'aime les tableaux qui medonnent envie de passer ma main sur un téton ou sur un dos, si c'est une figure de femme.

» Selon diverstémoignages, c'est Anna Leboeuf qui aurait servi de modèle pour ce nu.

Elle devait poser pour Renoir à plusieursreprises, avant de mourir à 23 ans.

L'artiste s'intéresse moins à son visage — dont les traits restent flous — qu'auxjeux de lumière sur son corps.

Quant au fond du tableau, il est si indistinct qu'il en devient presque abstrait : lesfeuillages ne sont figurés que par des hachures irrégulières.Le peintre, d'ordinaire si prudent, ne manqua pas d'audace en présentant cette toile à la Deuxième Expositionimpressionniste, en 1 876, à Paris.

Elle allait heurter de front la critique, qui lui reprocha d'emblée son manque de «fini ». LA CRITIQUE Comme bon nombre de ses pairs, Albert Wolff, du journal [e Figaro, accueillit le tableau avec un mépris cinglant : «Essayez donc d'expliquer à M.

Renoir que le torse n'est pas un amas de chairs en décomposition, avec des tachesvertes, violacées, qui dénotent l'état de complète putréfaction dans un cadavre.

»« Une grande étude de femme nue et à laquelle, certes, on aurait mieux fait de passer une robe nous attriste parses tons violacés de chair faisandée », renchérit Louis Enault, du Constitutionnel.

Un autre critique, ArmandSilvestre, écrit néanmoins : « M.

Renoir peint les chairs dans une gamme de roses tout à fait aimable.

J'aimeinfiniment son ébauche de femme nue...

C'est un morceau de coloriste.

» L'HISTOIRE Achetée par le peintre Gustave Caillebotte après l'exposition de 1 876, la toile fut léguée à l'Etat français, avec denombreux autres tableaux, en 1 894.

D'abord exposée au musée du Luxembourg, elle fut ensuite transférée auLouvre, puis au Jeu de paume, avant de rejoindre le musée d'Orsay.Des traits diffus, à peine esquissés...La critique reproche à Renoir de n'avoir pasterminé son tableau ! LA COTE Une Baigneuse de dimensions un peu plus modestes que ce nu s'est vendue près de 8 millions de francs auxenchères à New York, en 1992.

Un Renoir de taille moyenne coûte de 1 à 10 millions de francs.. »