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Art et représentation

Publié le 05/01/2020

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ture est abstraite ou non figurative, une difficulté apparaît. Il ne semble plus y avoir de critère pour apprécier la réussite d'une œuvre, elle ne peut plus être jugée à l'aune de la représentation. D'un autre côté, un tel critère risque de nous égarer, et de conduire à une vision trop schématique de la figuration artistique.

 

En effet, si l'art doit avant tout représenter au sens de copier, l'idéal de la peinture sera le trompe-l'œil. Or, si ce dernier peut constituer un genre qui présente toujours un attrait de curiosité, il est difficile de prétendre qu'il constitue l'achèvement de cet art. Il ne faut pas oublier, par exemple, que la peinture hollandaise du xvne siècle, qui excella dans la représentation réaliste d'objets quotidiens, ne saurait se réduire à la prouesse de l'exactitude de la représentation, et doit aussi sa beauté à la méditation sur les séductions du monde sensible dont elle témoigne.

 

Ce que l'art représente, quelles que soient ses formes et ses styles, est toujours au-delà du monde visible et tangible que nous croyons réel : le vrai dans l'art, si l'on peut s'autoriser l'emploi de ce terme souvent réduit à désigner le réalisme, vient, plus que de l'habileté à produire une illusion, de la pensée, des valeurs, des choix qui sont à la source de la représentation : plus qu'une image de la réalité, celle-ci est la présentation d'une manière de la vivre et de l'appréhender. Penser que l'art consiste à produire une représentation, au sens de copie du réel, est réducteur; en revanche, il faut préciser la place de l'imitation dans la représentation et, si représenter n'est pas uniquement copier, ce qui est en question dans la démarche de représentation.

 

Représenter, c'est produire un artifice. C'est justement cette capacité que possède l'art de produire un équivalent illusoire du réel qui est visée par Platon. La présentation qu'il propose de l'imitation comme copie du réel est faussement naïve, puisqu'il ne conteste pas le pouvoir de l'artiste, mais met en évidence, à l'aide de cette notion, certaines conséquences de l'émotion esthétique. L'art détourne de la froide réflexion pour céder à la séduction de l'irrationnel. La célèbre condamnation de l'artiste, que Platon souhaite exclure de sa cité idéale, vient du lien qu'il établit entre la représentation du sensible et l'illusion : le philosophe souhaite détourner les hommes des satisfactions illusoires d'un monde sensible opposé au monde intelligible que révèle la recherche de la

Quel rapport, en tant qu'imagé ou apparence, l'œuvre d'art doit-elle entretenir avec le réel ? Quelle place doivent occuper dans la création artistique l'imagination de l'artiste et la fidélité aux éléments fournis par la réalité extérieure à l'esprit du créateur?

 

On entend souvent dire que les arts représentent le réel, c'est-à-dire qu'ils en donnent une image qu'on peut supposer élaborée par l'artiste, mais qui prend corps dans une œuvre. Précisons que la représentation peut être comprise comme une imitation de la nature ou d'un modèle, ou bien encore, si elle équivaut à la représentation intérieure, à l'idée que l'artiste s'est faite de la réalité : cela signifie que l'image, la figuration ou la forme qu'il crée révèle ce que ce réel représente pour sa conscience.

 

En ce sens, il y a des arts que l'on peut appeler « arts de la représentation » ou arts d'imitation, et d'autres qui ne le sont pas ou le sont moins : la peinture propose des images, le théâtre également, mais la musique ou l'architecture n'adressent aux sens que des constructions pures qui ne renvoient à rien de préexistant, sauf dans le cas où elles sont délibérément imitatives, comme lorsque la musique intègre la reproduction de chants d'oiseaux.

 

Mais faut-il opposer de manière rigide ce qui fait appel à la représentation au sens d'imitation et ce qui n'y fait pas appel ? Il vaut mieux se demander dans quelle mesure il fait intrinsèquement partie de la démarche artistique d'imiter, et les raisons pour lesquelles l'imitation est recherchée. En même temps, si cette démarche suscite des objections, il faudra aussi en préciser les raisons.

 

On peut évoquer ici le problème de l'abstraction (voir aussi chapitre 5) : quand les arts dits d'imitation renoncent à donner un équivalent identifiable du réel, comme lorsque la pein

« ture est abstraite ou non figurative, une difficulté apparaît.

Il ne semble plus y avoir de critère pour apprécier la réussite d'une œuvre, elle ne peut plus être jugée à l'aune de la repré­ sentation.

D'un autre côté, un tel critère risque de nous éga­ rer, et de conduire à une vision trop schématique de la figuration artistique.

En effet, si l'art doit avant tout représenter au sens de copier, l'idéal de la peinture sera le trompe-l'œil.

Or, si ce dernier peut constituer un genre qui présente toujours un attrait de curiosité, il est difficile de prétendre qu'il constitue l'achèvement de cet art.

Il ne faut pas oublier, par exemple, que la peinture hollandaise du xv11° siècle, qui excella dans la représentation réaliste d'objets quotidiens, ne saurait se réduire à la prouesse de l'exactitude de la représentation, et doit aussi sa beauté à la méditation sur les séductions du monde sensible dont elle témoigne.

Ce que l'art représente, quelles que soient ses formes et ses styles, est toujours au-delà du monde visible et tangible que nous croyons réel: le vrai dans l'art, si l'on peut s'auto­ riser l'emploi de ce terme souvent réduit à désigner le réa­ lisme, vient, plus que de l'habileté à produire une illusion, de la pensée, des valeurs, des choix qui sont à la source de la représentation : plus qu'une image de la réalité, celle-ci est la présentation d'une manière de la vivre et de l'appréhender.

Penser que l'art consiste à produire une représentation, au sens de copie du réel, est réducteur; en revanche, il faut préciser la place de l'imitation dans la représentation et, si représenter n'est pas uniquement copier, ce qui est en ques­ tion dans la démarche de représentation.

Représenter, c'est produire un artifice.

C'est justement cette capacité que possède l'art de produire un équivalent illusoire du réel qui est visée par Platon.

La présentation qu'il propose de l'imitation comme copie du réel est faussement naïve, puisqu'il ne conteste pas le pouvoir de l'artiste, mais met en évidence, à l'aide de cette notion, certaines consé­ quences de l'émotion esthétique.

L'.art détourne de la froide réflexion pour céder à la séduction de l'irrationnel.

La célèbre condamnation de l'artiste, que Platon souhaite exclure de sa cité idéale, vient du lien qu'il établit entre la représentation du sensible et l'illusion : le philosophe souhaite détourner les hommes des satisfactions illusoires d'un monde sensible opposé au monde intelligible que révèle la recherche de la. »

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