ARON Raymond : sa vie et son oeuvre
Publié le 14/11/2018
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ARON Raymond (1905-1983). Philosophe et essayiste, Raymond Aron suit d'abord la filière universitaire classique : École normale supérieure, agrégation de philosophie. Un séjour d’étude en Allemagne (1930-1933) lui fait découvrir la philosophie et la sociologie allemandes contemporaines (Dilthey, Max Weber, Simmel, Rickert), et le sensibilise à la politique (montée du nazisme). Sa thèse, Introduction à la philosophie de l'histoire. Essai sur les limites de l'objectivité historique (1938), se présente comme une « critique de la raison historique », et marque une rupture décisive avec le positivisme historique et sociologique qui sont encore dominants en France. La guerre va détourner Aron de la carrière universitaire qui s’offre à lui. Rédacteur en chef de la France libre, à Londres, il se consacre au journalisme dès son retour en France. Combat, puis le Figaro (1947-1977), enfin l'Express jusqu’à sa mort, accueillent ses articles, où la lucidité et l’indépendance du « commentateur », comme il aimait à se définir, s’allient à des prises de parti politiques et intellectuelles fermes, amenant en particulier sa rupture avec Sartre, son ancien condisciple et ami. L'Opium des intellectuels (1955), qui s’attaque à l’idéologie « de gauche » et à ses complaisances à l’égard du régime soviétique, lui vaut des inimitiés tenaces. Vingt-cinq ans plus tard, ces positions « iconoclastes » deviendront, pour des générations nouvelles, des vérités premières.
L’année 1955 le voit réintégrer l’Université, sans qu’il interrompe son activité journalistique. A la Sorbonne, à l'École pratique des Hautes Études, au Collège de France, son enseignement a une influence considérable.
«
Ses
cours et publications portent sur la société indus
trielle moderne, l'histoire de la pensée sociologique, la
théorie des relations internationales.
La guerre d' Algé
rie, les événements de mai 68, donnent au polémiste et
au citoyen l'occasion de manifester une fois de plus son
indépendance et son refus de transiger avec ce qu'il croit
juste et raisonnable.
Avec Penser la guerre, Clausewitz
( 1976), il revient sur les problèmes de la stratégie, et
aussi sur cette pensée allemande qui l'a si profondément
marqué, sans jamais le « fasciner>>.
Dans ses Mémoires
( 1983), parus très peu de temps avant sa mort, il fait un
retour sur son itinéraire intellectuel et sur « cinquante
ans de réflexion politique ».
Le succès de cet ouvrage,
l'hommage presque unanime rendu à Aron quand il
meurt, montrent que désormais le temps de la « recon
naissance» est venu pour celui qui ne se voulait ni
«confident de la Providence>>, ni «conseiller du
Prince », mais «spectateur engagé >>.
Une œuvre aux facettes aussi multiples devrait, bien
entendu, être abordée du point de vue du philosophe, du
sociologue, du politologue, du théoricien des relations
internationales.
Il faut souligner à quel point Aron, dont
la pensée était par ailleurs nourrie de la lecture des
auteurs allemands et anglo-saxons, appartient à une tra
dition profondément française.
Il se refuse à confondre
pensée et littérature, mais, si l'on ne trouve chez lui
aucune « volonté de style>>, aucun esthétisme, la
sobriété, la précision de son écriture, l'adéquation par
faite de la pensée et de l'expression, une certaine séche
resse qui laisse parfois filtrer l'émotion, atteignent à une
forme de beauté, et le situent du côté d'écrivains qui lui
étaient chers, comme Montesquieu et Tocqueville.
Aron
est un homme des Lumières ayant perdu les « illusions
du progrès >>,débarrassé de toute utopie, mais conservant
une foi obstinée dans la raison.
Une raison prudente, et
non sceptique ou désabusée, comme on l'a cru parfois,
une raison informée et courageuse qui ne renonce jamais
à sa tâche propre, qui est de comprendre.
BrBLIOGRAPIIffi On trouve une bibliographie des écrits de Raymond Aro n à la
fin de ses Mémoires.
Parmi ses œuvres principales, toutes
publiées à Paris, on peut citer : la Sociologie allemande contem
poraine, 1935, rééd.
P.U.F ..
1981; Introduction à la Philosophie
de l'histoire, 1938, rééd.
Gallimard, 1981; Essai sur une théorie
de l'histoire dans l'Allemagne contemporaine; la philosophie
critique de l'histoire, 1938; l'Homme contre les tyrans, 1944,
1945; le Grand Schisme, Gallimard, 1948; les Guerres en chaîne,
1951; l'Opium des Intellectuels, 1955; Dix-huit leçons sur la
société industrielle, 1962.
rééd.
Gallimard, 1970; la Lutte de
classes, Gallimard, 1964; Démocratie et totaliwrisme, 1966; la
Tragédie algérienne, 1957; Dimensions de la conscience histori
que, 1960; Paix et guerre entre les nations.
1962, rééd.
Cal mann
Lévy, 1984; le Grand Débat, initiation cl la stratégie atomique,
Calmann-Lévy, 1963; Essai sur les libertés, 1965.
rééd.
Hachette, 1977; les Étapes de la pensée sociologique, 1967.
rééd.
Gallimard, 1976; la Révolution incrouvable, Fayard, 1968; les
Désillusions du progr�s.
Calmann-Lévy, 1969; D'tme Sainte
Famille à l'awre.
Essais sur les marxismes imaginaires, Galli
mard, 1969; Études politiques, Gallima rd , 1972; Histoire et dia
lectique de la violence, Gallimard, 1973; Penser la guerre, Clau
sewitz, 2 vol., Gallimard, 1976: Mémoires, Ju ll iar d, 1983.
A consult er.
- A.
Piquemal, Raymond Aron et l'ordre interna
tional, Paris, Albatros, 1978; G.
Fessard, la Philosophie histori·
que de Raymond Aron, Paris, Julliard, 1980: S.
Mesure, Raymond
Aron et La raison historique, Paris, Vri n , 1984; « Raymond Aron
( 1905-1983).
Histoire et poli tiqu e>> (témoignages, hommages de
l'étranger, études, textes), n° spécial de Commentaire, Paris,
1985; N.
Baverez, R.
Aron.
Un moraliste au temps des Idéolo
gies, Flammarion.
1993..
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