Aristote : la main, l'intelligence et la technique
Publié le 01/02/2013
Extrait du document
«
La seconde grande ph ase tire une conséquence de l’idée énoncée précédemment : parce que
l’homme a des mains qui lui permettent de déployer son intelligence, il n’est pas, comme on le prétend, le
plus ma l loti de tous les animaux ; il est au con traire le mieux équipé par la nature.
Cette hypot hèse se
déplie en trois moments.
Aristote ann once une critique de la position de ceux qui pensent que l’homme est
l’animal le plus défavorisé par la nature.
Il est i ci fait allusion au mythe rapporté dans le Protagoras de
Platon : les titans Épiméthée et P rométhée sont chargés par les dieux de distribuer à chaque espèce les
moyens de sa conservation.
Dans son étourderie, Épi méthée oublie l’homme : celui-ci ne dispose ni d’une
grande force physique, ni d’une course rapide ; il n’a ni cornes, ni fourrure, etc.
Pour réparer cette faute,
Prométhée donne aux hommes le feu, c’est -à -dire la connaissance des techn iques et la « vertu politique »,
autrement dit la capacité de vi vre ensemble au sein d’une Cité qu’ il vole aux dieux.
Ainsi, selon le mythe,
l’homme est l’an imal par nature le plus démuni et c’est pour surmonter ce ha ndicap qu’il développe son
intelligence .
Nous ret rouvons là la concepti on « évolutionniste » critiquée par Aristote.
Par la suite,
Aristote prol onge son hypothè se en en mesurant la conséquence.
Les animaux sont en défin itive les moins
favorisés que l’homme, car il ne peuvent changer l’ unique moyen de défense qu’ils ont reçus.
La seconde
implication qui en découle c’est que l’homme est le mieux pourvu de tous les animaux puisqu’il dispose
de nombreux moyens de défense qu’il peut changer à sa guise, et ce en raison de l’adaptabilité de la main
à toute sorte d’usage.
Il faut ici établir une distinction entre « utilisation » et « fabrication ».
En effet, un
singe peut se servir, avec ses mains, d’un bâton qu’il a ramassé, mais il ne le fabrique pas.
Alors que
l’homme préhistorique, dès qu’il a su tailler des silex, était déjà en cela différent du singe.
On peut donc
dire pour consolider la thèse d’Aristote que « l’homme est le seul animal qui fabrique des outils » (Kant,
Idée d’une histoire universelle).
Ce qui a pour conséquence de démarquer l’humanité de l’animalité.
Nous percevons mieux depuis lors la thèse essentielle de l’auteur qui fait l’unité du passage : la
main n’ est naturellement destinée à aucun usage déterminé, mais cette absence de spécialisation ne doit
pas être une faiblesse de l’homme par rapport aux animaux ; elle contient au contraire la possi bilité de
s’ adapter à tout type de fonctions.
Elle est donc l’ outil le plus perfectionné que la nature a réservé à l’être
animé qui, par son intelligence , est le seul capable de s’en servir : l’homme.
Question 2 :
Tout au long du texte, le Aristote parle de la m ain comme d’un outil.
Ce qui peut nous étonner, car
un outil est un inst rument fabriqué par l’industrie humaine alors que la main est un organe naturel.
Remarquons toutefois que outil et organe (organon) se rejoignent en se définissant tous l es deux par
rapport à une fonction : la notion d’outil rattrape celle d’utilité, d’adaptation d’un moyen en vue d’une fin
donnée ; de même, l’ organe est détermi né par la finalité qu’elle assure au sein de l’organisme.
Aristote a
donc une conception « finaliste » de la nature qui légitime, dans une certaine mesure, l’assimilation de
l’organe à l’outil : l’œil sert à voir comme le marteau sert à enfoncer des clous.
Dans le cas de la main, ce
n’est pas parce qu’ elle n’a pas de fonctionnalité spécifique qu’elle se situe en dehors de la finalité ; bien
au contraire, elle est conçue pour servir à une multitude d’usages.
Sa fonction première est l’ adaptation à
toute fonction.
La main est ainsi l’ outil à usage multiple.
Le conc ept d’ « outil », dans le cas de la m ain, reçoit une seconde justific ation.
La main est ce par
quoi l’outil existe.
L’homme ne pourrait se servir d’outils s’il n’avait pas de mains : l’outil prolonge la
main.
La main, par sa fonction préhensible , apparaît donc comme un intermédiaire entre l’o rgane et
l’outil.
Elle est ce qui, dans la nature de l’homme, permet le passage vers la culture.
Elle est donc bien de
l’o rdre de la nature, mais elle rend possible ce qui n’est pas la nature : la te chnique.
C’est pourquoi, par
assimilation avec l’inst rument qui la prolonge, on pourra l’appeler « outil »..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- ARISTOTE, Des parties des animaux: En quoi la technique est-elle révélatrice de l'intelligence humaine ?
- Aristote- La Main et l'Intelligence
- En quoi la technique révèle-t-elle l'intelligence humaine ?
- ARISTOTE. La technique ; la nature.
- En quoi la technique est-elle révélatrice de l'intelligence humaine ?