Aristote- La Main et l'Intelligence
Publié le 18/11/2012
Extrait du document
«
possibles de la main n'en est alors que plus grand et par conséquent la nécessité d'user de réflexion
également.
Sans intelligence, les mains ne sont rien, mais guidées par un être doté d'intelligence,
elles sont capables de beaucoup de choses.
Réciproquement, l'intelligence n'a que peu l'occasion de
s'exprimer sans des mains, cependant, avec, elle peut s'exprimer à profusion.
La nature, qui pour
Aristote, ne fait rien en vain, ne peut gâcher ainsi tout à la fois l'intelligence en la privant de la
possibilité de s'exercer et la main en la retirant à ce qui seul peut s'en servir : c'est donc pour cela
qu'elle a confié la main à l'être le plus intelligent, parce-qu'il est intelligent.
II.
Mais comment Aristote considère-t-il cette main dont il ne cesse de parler ?
Aristote accord à la main un statut très particulier dans l'ensemble de ce que l'homme a reçu
de la nature : tout au long du texte, il en parle comme d'un outil et il la surnomme même « l'outil le
plus utile ».
On peut s'en étonner, car la main paraît plutôt être un organe naturel.
On appelle organe
un partie différenciée du corps d'un être vivant remplissant une fonction bien déterminée en
interdépendance avec les autres organes de manières à assurer totalement le fonctionnement de
l'ensemble de l'organisme de cet être vivant.
On distingue les organes vitaux tels que le cœur ou le
foie, de ceux qui ne le sont pas, mais dont l’absence constitue tout de même un handicap pour l'être
vivant qui perd donc un certain nombre de possibilités d'action.
Or la main semble bien
correspondre à la définition d'un organe : elle est une partie naturelle du corps de l'homme et elle est
bien solidaire de l'ensemble de ce corps dont elle reçoit des informations et à qui elle transmet
également des informations en tant qu'organe de la sensibilité, du toucher.
Par exemple, lorsqu'elle
touche une surface brûlante, elle transmet des informations jusqu'au cerveau disant que la surface
est brûlant et c'est alors qu'elle obéit à un réflexe commandé par des nerfs de se retirer.
Comment comprendre alors qu'Aristote en parle comme un outil ? Car organe et outil ne
peuvent pas se confondre.
Un outil est un objet fabriqué par l'homme et dont l'homme se sert pour agir efficacement
sur la matière, pour la transformer ou d'une manière générale pour faire un travail.
L'outil est donc
acquis par l'homme, prolongeant artificiellement et occasionnellement son corps et il n'a pas sa
force motrice en lui-même mais hors de lui-même dans la force de l'homme qui le manie.
L'organe,
tout à l'inverse, est inné, naturel et partie intégrante du corps de l'homme et de par sa solidarité avec
l'ensemble de l'organisme, il y puise l'autonomie de son fonctionnement.
Cependant, si l'on accord
au propos d'Aristote un attention plus grande, on peut voir qu'il n'associe la main avec un outil
qu'avec prudence dont témoignent les formules « semble bien être […] plusieurs outils » ou encore
« elle est pour ainsi dire un outil qui tient lieu des autres ».
On constate que c'est donc en un sens
figuré que la main est rapportée à l'outil.
Sa fonction est comparable à elle d'un outil sans que la
main en soit un en elle-même.
En effet, sa fonction d'organe du toucher et de la préhension la met
directement en prise avec le monde extérieur au corps, la matière sur laquelle elle intervient, qu'elle
peut transformer comme le fait un outil, contrairement à d'autres organes dont le fonctionnement est
purement interne sans conséquence sur le monde extérieur.
Nous pouvons donc bien nous en servir
comme nous nous servons d'un outil, pour creuser la terre par exemple.
De plus, si elle est
naturellement inscrite dans notre corps et que nous ne pouvons pas en disposer à notre guise, sa
capacité de préhension n'est donc pas entièrement définie par l'instinct.
Certes si nous prenons un
objet brûlant, nous aurons spontanément le réflexe de le lâcher, donc l'usage de notre main est guidé
par notre intelligence et notre volonté, ce qui n'est pas le cas pour des organes tels que l'estomac ou
le rein.
C'est à nous qu'il revient de savoir de quelle manière nous allons prendre tel ou tel objet,
c'est nous qui décidons de poser les doigts sur telle ou telle touche du piano par exemple.
La main
est ainsi toute entière ou presque à la disposition de notre volonté et nous en usons librement tant
ses capacités sont nombreuses : c'est en cela encore qu'elle est pour nous comme un outil et même
plusieurs.
La main est donc bien pour Aristote un organe naturel, mais un organe spécial,
comparable à un outil, sûrement le premier outil de l'homme qui lui a certainement donné l'idée
d'inventer tous les autres..
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