ANGLE TERRE
Publié le 23/09/2013
Extrait du document
«
En théorie la responsabilité ministérielle existe, mais elle est de moins en moins effective .
Principalement 2 instruments sont
offerts au Parlement pour contrôler le gouvernement :
· Tout d’abord, les questions au gouvernement permettent à n’importe quel député d’interpeler un membre du
gouvernement.
Mais leur efficacité est difficile à évaluer.
En obligeant les ministres à prendre position sur des
questions sensibles, elles constituent un outil efficace pour l’opposition.
Mais cette efficacité est à relativiser .
Pour
preuve, la décision symbolique et révélatrice de Tony Blair de réduire de 2 à 1 par semaine le nombre de séances de
questions au gouvernement (à cette occasion, un politicien britannique a déclaré que le meilleur moyen de garder un
secret était de l’annoncer l’après midi à la Chambre des Communes, alors que peu de députés sont présents ! ).
· Il y a ensuite la motion de censure , mais elle est très difficile à faire adopter.
Le scrutin majoritaire octroie souvent
une large majorité au PM , il est donc très difficile de rassembler une majorité hostile au gouvernement (en outre, en
provoquant des élections anticipées, les députés courent le risque de ne pas être reconduits).
D’autre part, le PM étant
quasiment élu au suffrage universel , il a une légitimité populaire ; censurer le gouvernement revient, d’une certaine
manière, à remettre en cause le vote du peuple (légitimité du PM supérieure à celle du Parlement, bien que
juridiquement il soit élu en premier).
Notons aussi que le rejet d’un projet de budget ou le vote d’un amendement à
l’Adresse ont des effets similaires au vote d’une motion de censure.
Résultat : le PM n’est plus responsable devant le Parlement , mais directement devant l’opinion ou devant son propre
parti (ainsi, Margaret Thatcher est désavouée par son parti, et remplacée par John Major en 1990).
Ensuite, il existe au RU une
véritable culture du secret.
L’ « Official Secret Act » , notamment, en vigueur depuis 1911 contribue à limiter le contrôle du
gouvernement par le Parlement.
Enfin, l’organisation du premier referendum de l’Histoire du RU en 1975 à propos de l’Europe
constitue un symbole fort.
Ce scrutin, qui établit un lien direct entre le PM et le peuple, est contraire à l’esprit
parlementaire.
Face à ce déséquilibre flagrant , 2 mesures ont été entreprises pour tenter de rééquilibrer les rapports entre les 2
organes :
· L’ ombudsman , instauré en 1965, possède des attributions similaires à celles du Médiateur de la République français.
· Les Select Committees (ou Commissions parlementaires spécialisées par ministère), instaurées en 1979, ont permis
de renforcer le contrôle du gouvernement , particulièrement dans le domaine des dépenses publiques .
2.
Une stabilité réelle mais pas inaltérable
Aucun gouvernement renversé entre 1895 et 1979, puis entre 1979 et aujourd’hui, soit 1 seul gouvernement renversé en plus
d’un siècle.
Le régime est donc relativement stable.
Cette stabilité, elle est due à :
· droit de dissolution détenu par le PM qui représente une menace constante pour les députés d’être renvoyés devant
leurs électeurs avec risque de ne pas être réélu s’ils ne votent pas les projets de lois gouvernementaux
· whips , qui sont des députés de la majorité chargés de veiller à la présence des députés lors des votes importants et
du respect de la discipline parlementaire
Enfin, la présence de nombreux ministres à la Chambre des Communes en tant que députés facilite les échanges entre le
gouvernement et la majorité parlementaire, et l’adoption des projets de lois gouvernementaux.
Et en effet, aujourd’hui,
la majorité des lois proposées par le gouvernement sont adoptées telles qu’elles, sans aucune modification .
Au RU il y
a fusion des pouvoirs exécutif et législatif ; le Cabinet est conçu comme une émanation du Parlement ; le
gouvernement gouverne et légifère sous le contrôle du Parlement.
Ainsi, René Capitant écrit, en 1934, dans La Réforme du
parlementarisme :
« Le gouvernement britannique se caractérise par la concentration des pouvoirs aux mains du Premier ministre.
Il gouverne et
légifère.
Appuyé sur sa majorité, c’est lui qui dresse et impose aux Communes le programme législatif de la session.
L’initiative
parlementaire ne s’exerce plus et le vote des Communes se borne à faire écho au programme du Cabinet.
Le pouvoir législatif,
comme le pouvoir exécutif, est devenu un pouvoir gouvernemental .
Déformation, usurpation ? non pas.
Ces formules traduisent
l’idée, l’essence même du parlementarisme moderne , tel qu’il doit, tel qu’il peut aujourd’hui fonctionner.
»
D’un point de vue théorique , le régime britannique est clairement parlementaire.
En outre, de par son Histoire, le Parlement
garde un grand prestige au sein du système politique du pays.
Mais la faible utilisation de la motion de
censure et l’inefficacité du contrôle du gouvernement par le Parlement remettent en cause la nature parlementaire du
régime.
Cependant, entre 1922 et 1935, puis lorsqu’aux élections de 1974 aucun des deux principaux partis n’a obtenu
la majorité absolue à la Chambre des Communes, le bipartisme a montré ses faiblesses .
Ces crises récurrentes du Two Party
System montrent bien que le régime britannique demeure profondément parlementaire.
Le Royaume-Uni est donc bien un régime
parlementaire, mais un régime parlementaire moderne qui allie contrôle et stabilité..
»
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