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analyse linéaire prologue Juste la fin du monde

Publié le 28/10/2021

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?Explication linéaire n° 9 Prologue Juste la fin du monde Juste la fin du monde est une pièce de Jean-Luc Lagarce écrite en 1990 et jouée pour la première fois en 1999. L'extrait à analyser est la scène d?exposition qui est la toute première scène d?une pièce de théâtre et qui a pour fonction d?informer et d?intéresser le spectateur (ou le lecteur). Cette scène d?exposition prend la forme ici d?un Prologue, forme héritée de l'Antiquité, qui a pour fonction traditionnelle d'exposer le sujet. Ce prologue est pris en charge par Louis, le personnage principal de la pièce qui raconte qu?il va annoncer sa mort prochaine à sa famille. En quoi cette scène de théâtre contemporain qui annonce une crise à venir est-elle à la fois traditionnelle et moderne ? On remarque à la lecture du texte que le monologue se déploie sur une phrase unique d'une quarantaine de lignes. Lagarce adopte la forme du verset (= selon son étymologie latine - versus, le verset se définit par le fait de revenir à la ligne) ; la parole qu'il fait entendre est une parole qui avance par répétitions, corrections, parenthèses... qui échoue à clairement dire les choses et pose finalement le spectateur face à une ambiguïté : quel sera le sujet de la pièce ? Lignes 1 à 21 : Premier mouvement Ligne 1 : La phrase de Louis commence par des repères temporels, livrés ici sous la forme de deux compléments circonstanciels de temps : « plus tard », « l'année d'après ». Mais dès cette première ligne, le spectateur est placé face à des repères qui, malgré la précision affichée, demeurent confus dans la mesure où ils ne sont pas rattachés à un moment déterminé, à une année précise qui permettrait de les situer dans une chronologie. La pièce refuse d'inscrire l'action dans une temporalité réaliste (voir la didascalie initiale) ? Modernité du texte (brouillage de la temporalité) Lignes 1-2 : - Aposiopèse (voir fiche sur les figures de style employées par Lagarce) : la phrase aussitôt commencée, est suspendue, dans la mesure où une parenthèse (rendue visible par les tirets) y est insérée, marquant déjà une première rupture dans son déroulement non linéaire. - Il est étonnant que l'information importante qui y est livrée figure dans une parenthèse, reléguée au statut d?information secondaire - car nous apprenons la mort du personnage principal. - L'emploi du verbe « aller » à l'imparfait permet d?envisager le futur à partir d'un repère passé « j'allais mourir » = « Je vais mourir » au passé). Associé au complément « l'année d'après », il pose problème car l?ensemble donne comme acquise et effective la mort de Louis qui est en train de s'exprimer devant nous (prosopopée : figure de style qui consiste à faire parler un mort, un animal, une chose personnifiée, une abstraction). Nous avons donc affaire à un personnage qui est dans un entre-deux à la fois mort et encore vivant. - La mort à venir d'un personnage est un élément traditionnel la tragédie antique (fatalité = destin inexorable). L?annonce de cette mor...

« qui consiste à faire parler un mort, un animal, une chose personnifiée, une abstraction). Nous avons donc affaire à un personnage qui est dans un entre-deux à la fois mort et encore vivant.

- La mort à venir d'un personnage est un élément traditionnel la tragédie antique (fatalité = destin inexorable).

L’annonce de cette mort peut se faire dès le prologue (Antigone ) - Ce n'est pas la première fois qu'un mort assure le Prologue dans l'histoire du théâtre. Dans Thyeste de Sénèque, l’ombre (le fantôme) de Tantale sorti des Enfers, prononce la première tirade de la pièce.

(Résumé sur la dynastie d’Argos : https://www.theatre- contemporain.net/spectacles/Thyeste/videos/media/tmpurl_EC3Zi7Y2 ) Teaser du spectacle de Thomas Joly (Avignon, 2018) : https://www.theatre- contemporain.net/spectacles/Thyeste/videos/media/Thyeste-Extraits ) → Modernité (temporalité confuse, irréaliste ; difficulté à mettre en mots) et tradition (un mort ouvre la pièce ; mort à venir du personnage). Lignes 3-4 - Le personnage donne son âge : on retrouve là la fonction traditionnelle du prologue qui consiste en l'exposition, c'est-à-dire le fait de livrer des informations. - Louis connaissant son âge, cette information est évidemment destinée au public, selon le procédé traditionnel de la double destination (le personnage s'adresse à lui- même ici, mais ses propos sont en réalité destinés au spectateur). - La phrase commence au présent d'énonciation, qui ancre le propos dans un « maintenant » (nouveau complément circonstanciel de temps) et un lieu problématiques, non précisés, situés à la fois avant et après la mort de Louis.

La phrase se finit avec l'emploi du futur (« c'est à cet âge que je mourrai ») qui donne cette fois la mort comme non advenue à partir d'un repère présent. - Cette mort à venir, donnée comme inévitable au début de l'œuvre, s'inscrit dans la tradition de la tragédie : le spectateur sait que le personnage tragique est généralement voué à mourir dès le début de la pièce.

( Antigone ) → Tradition (exposition, double énonciation, fatalité de la mort) et modernité (brouillage des repères, personnage qui semble à la fois déjà mort et encore vivant).

Ligne 4 - Reprise de « l'année d'après » un élément du premier verset, qui montre un retour au point de départ.

L'expression « l'année d'après » va désormais constituer un leitmotiv (formule qui revient à plusieurs reprises - Motif musical répété dans une œuvre, caractérisant un personnage, une situation : Pierre et le loup de Prokofiev) dans la tirade et suggérer que la prise de parole est difficile.

Un entre-deux entre une parole qui se répète et qui avance. → Modernité (difficulté à mettre en mots).. »

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