Alain, Critique de l'inconscient freudien
Publié le 12/04/2005
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1° MOMENT DU TEXTE ( du début à " ...que je connais mal.
").
Dans un premier temps l'inconscient est présenté comme " une méprise sur le moi, " autrement dit croire en lui esttout d'abord une erreur.
En effet qu'est-ce que se méprendre sinon prendre une chose pour ce qu'elle n'est pas, etprécisément ici le Moi se prend pour autre chose que ce qu'il est véritablement, il se réduit à une partie de lui-même, à la partie peut-être la plus soumise et la plus passive: le corps.Cependant cette méprise est double car si le moi se prend uniquement pour le corps, il prend le corps pour ce qu'iln'est pas puisqu'oubliant l'âme véritable consciente et autonome, il dote le corps d'une âme qui lui serait propre etqui agirait à l'insu de l'âme consciente d'elle-même.C'est pourquoi Alain estime que la croyance en l'inconscient est " une idolâtrie du corps ".
Qu'est ce qu'une idolâtrie?Sinon l'adoration d'une idole c'est-à-dire d'une représentation du divin à laquelle on accorde les pouvoir du divin lui-même.
C'est donc prendre le morceau de bois ou de métal qui évoque un dieu pour ce dieu lui-même.Le corps ne serait donc qu'une représentation de l'âme qui se prendrait pour l'âme elle même, ou plus exactement àlaquelle l'âme accorderait une autonomie pour ne pas avoir à lutter contre ses tendances et ses appétits parfoisdémesurés.
Il convient de préciser qu'ici le terme d'âme doit être pris au sens cartésien du terme c'est-à-direcomme le siège de la pensée consciente, de la raison et de la volonté.Et ce qui est ici en cause c'est peut-être plus la volonté que la seule raison, la volonté qui refuse d'écouter la raisonet qui se laisse dominer par le corps et ses forces mystérieuses, forces qui lui font peur mais qui semblent en mêmetemps la fasciner, la paralyser.Alain nous dit " On a peur de l'inconscient: là se trouve logée la faute capitale.
", mais alors pourquoi y croyonsnous, et quelle est cette " faute capitale ", de quoi et pourquoi avons nous peur, et pourquoi adorons nous ce quinous fait si peur?D'une part si Alain voit dans l'inconscient une idolâtrie du corps c'est qu'il conçoit ce dernier d'une manière beaucoupplus cartésienne que freudienne, en effet dans une optique cartésienne l'inconscient concerne tout ce qui ne relèvepas de la pensée et donc de l'âme, il ne peut donc s'agir que des mécanismes du corps; or la conception freudienneva totalement à l'encontre de cette conception dans la mesure où l'inconscient est psychologique, c'est-à-dire lesiège d'une certaine forme de pensée qui cependant s'enracinerait dans le corps puisque l'une de ses instancesprincipales et originelles est le " ça " qui désigne l'aspect essentiellement pulsionnel de l'appareil psychique qui semanifeste en premier par l'expression des instincts du corps.Or précisément reconnaître à ce qui s'enracine dans le corps la capacité de penser n'est-ce pas de l'idolâtrie?D'autre part l'inconscient dit Alain nous fait peur: " là se trouve logée la faute capitale ", de quoi avons nous peur etquelle est cette faute?C'est de cet autre qui est en nous même dont nous avons peur, au point que nous n'avons pas le courage de luttercontre lui, et c'est là qu'est la faute dans l'abandon de soi par lequel l'âme refuse d'assumer sa propre existence enlaissant guider par les choix qu'elle seule peut faire et dont elle est seule responsable.En adhérant à la croyance en l'inconscient nous prétendons ne plus avoir à répondre de nos actes, puisque ce n'estplus Moi qui agit, mais " un autre moi " qui " me conduit et que je connais mal ", autrement dit un Moi qui n'est pasMoi, tout ce qu'il fait n'est pas de ma faute puisqu'il agit en moi sans moi.Mais précisément " la faute capitale " n'est-elle pas de vouloir que toutes mes fautes ne soient pas de ma faute?N'est-elle pas de se laisser guider par les appétits imprévisibles du corps qui nous font peur mais par lesquels nousnous laissons tenter et auxquels nous n'avons pas le courage de dire non.Croire en l'inconscient c'est donc s'inventer un maître dont " on a peur " afin de soumettre sa propre volonté et denier ses responsabilités; " Je ne suis rien, mais ça agit en moi ".
Mais comme ce " ça " n'est pas seulement conçucomme le corps on en fait une seconde conscience, une seconde pensée , " un autre Moi " contre lequel on ne peutrien, il est plus fort que moi, j'ignore ce qu'il est et je me satisfait de cette faiblesse.En ayant foi en l'inconscient je commet donc une erreur, mais cette erreur n'est pas théorique (c'est pourquoi Alainne s'attaque pas à l'inconscient à partir d'une analyse en règle des thèses freudiennes; le problème n'est pas là); ils'agit d'une erreur pratique, cette foi est mauvaise foi, elle est mensonge à soi-même car je me trompevolontairement et je commet donc une faute morale.Ainsi je n'ai pas à assumer mes actes librement et j'en fais porter la responsabilité à cet autre moi-même auquel jene puis résister.Cet abandon de soi est comparable à la croyance en l'hérédité qui nous déresponsabilise puisque ce n'est jamais lesujet qui agit, mais celui à qui il ressemble qui agit en lui.
2° MOMENT (de " L'hérédité est un fantôme...
" à " ...qu'une même vie va recommencer ").
Cette croyance en l'hérédité est tout aussi illusoire que la précédente, c'est " un fantôme " nous dit Alain, c'est-à-dire un être sans consistance émergeant du royaume des ombres, un mort-vivant qui exercerait sur nous un pouvoird'emprise mystérieux nous empêchant d'être nous-mêmes.Croire en l'inconscient ou croire en l'hérédité c'est devenir soi-même un fantôme, le fantôme de ceux qui nous ontélevé et qui ont inscrit en nous leurs traits de caractère, leurs espoirs ou leurs volontés, par le canal de latransmission génétique ou par celui de l'éducation, mais qu'importe la voie empruntée, le résultat est le même, jereste un enfant tant que je reste soumis à ceux que j'aime, tant que cet amour n'a pas fait de moi un êtreautonome.Aimer ceux qui nous ont donné le jour ce n'est pas s'effacer devant eux au point de redevenir ce qu'ils étaient, den'être plus maître de soi parce qu'un autre (celui dont je descend et à qui je ressemble) agit en moi et me voletoute responsabilité (" je n'y peux rien, je suis comme mon père ")..
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