Affirmer des droits de l'homme universels, est-ce méconnaître la diversité des cultures ?
Publié le 01/03/2009
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L’apparition et la définition de droits de l’homme universels semble voir le jour dès le milieu du XVIIIème siècle comme on peut le constater dans la Constitution américaine ou dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; et encore aujourd’hui puisque l’on fête les soixante ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 au siège de l’ONU. Pourtant, depuis son apparition la notion de droits de l’homme universels n’a cessé de faire débat. En effet, affirmer des droits de l’homme universels c’est tout d’abord reconnaître l’existence d’une nature humaine et en définir l’essence ; mais aussi c’est définir l’existence d’un droit naturel, c’est-à-dire d’un droit antérieur à la constitution de la communauté en tant que société, donc anhistorique, servant de modèle idéal au droit positif, le droit de chaque état. Mais surtout le problème de l’existence de ces droits et de son universalité est opposée à la réalité de la diversité culturelle de la famille humaine. Autrement dit, le sujet prend toute son acuité dans l’opposition entre l’universel et le particulier, l’idéal et le réel. Et cela d’autant plus que certains penseurs y ont vu non pas une universalité mais une arme idéologique afin d’imposer un modèle de penser et d’existence. C’est donc bien dans ce cadre que le sujet « affirmer des droits de l’homme universels, est-ce méconnaître la diversité des cultures ? « prend tout son sens.
Ainsi dans une première partie il conviendra d’étudier et d’analyser toutes les implications majeurs de la définition de droits universels notamment autour des axes de l’universalité, de l’idéalité et du droit. Or si l’on parle d’idéal peut-être faudra-t-il si ce projet n’est pas d’essence utopique et ne correspondant pas la réalité de la diversité culturelle, donc produire une critique de l’universalité des droits de l’homme au nom de la diversités des cultures (2ème partie). Pourtant force est de constater que la majorité des pays ont ratifié la Déclaration de 1948 voire qu’il s’agit d’un besoin exprimé par toutes les cultures. Dans ce cas, on pourrait donc y voir une universalité qui ne se ferait pas malgré la diversité culturelle mais avec elle, sans la méconnaître et se fondant sur le respect et la dignité de la personne humaine (3ème partie).
I – Universalité, idéal, droit naturel et implications
II – Critique au nom de la diversité culture et idéalité des droits universels
III – Dépassement dialectique de l’opposition, nécessité de ces droits et respect de la personne
«
Transition :Ainsi, affirmer des droits de l'homme universels c'est faire référence à un type d'homme idéal, à une essence del'humanité, et à des valeurs au-delà de la diversité des cultures.
C'est donc définir projet commun en tout temps eten tout lieu, passant outre les problèmes historiques, ethniques etc.
Cependant, si ce projet est louable, ne peut-onpas se demande s'il n'est pas illusoire ? Ne pourrait-il pas être un instrument idéologique cherchant à unifier sous unmême type les diversités culturelles qui font pourtant la richesse de ce monde ? En effet, comment affirmer un droituniversel, alors que chaque droit est relatif à sa propre culture ? II – Critique au nom de la diversité culture et idéalité des droits universels a) C'est en effet ce type de critique qui a été adressé aux théoriciens des droits de l'homme universels et ceux dèsles débuts de la Révolution française.
Effectivement Burke dans ses Réflexions sur la Révolution de France montre que faire référence à un homme universel c'est produire un homme idéal donc méconnaître la diversité culturelle.L'homme est dans ce cas une abstraction et dans ce cas, on fonderait la liberté sur des idées abstraites, c'est-à-dire des illusions.
Pour affirmer de tels droits, il faudrait pouvoir saisir l'homme dans son universalité ; hors nul partnous ne rencontrons un tel homme, c'est une vue de l'esprit.
C'est pourquoi Joseph de Maistre à la suite de Burke dira dans ses Considérations sur la France : « il n'y a point d'homme dans le monde.
J'ai vu, dans ma vie, des Français, des Italiens, des Russes, etc.; je sais même, grâce à Montesquieu, qu'on peut être Persan : mais quant àl'homme, je déclare ne l'avoir rencontré de ma vie; s'il existe, c'est bien à mon insu.
» Parler d'universalité del'homme c'est méconnaître sa diversité culturelle et vouloir imposé un modèle unique, un schème.
Autrement dit, leproblème est qu'une constitution qui est faite pour toutes les nations, n'est faite pour aucune : c'est une pureabstraction ; « une œuvre scolastique faite pour exercer l'esprit d'après une hypothèse idéale; et qu'il faut adresserà l'homme, dans les espaces imaginaires où il habite ».b) De plus, cela méconnaît la spécificité culturelle de chaque droit positif.
En effet, affirmer l'existence de droit del'homme universels c'est dire que les règles de droit de chaque pays devraient tenir compte d'un droit antérieur etsupérieur c'est-à-dire un droit naturel.
Le droit de chaque pays serait définit comme arbitraire sans lui.
Et c'estnotamment sur ce point que Bentham produit sa critique dans son ouvrage Sophismes anarchiques .
D'après son analyse des droits de l'homme universels, ces droits constituent une ingérence dans les affaires internes de chaquepays et peuvent donc être perçu comme une destruction culturelle.
En effet, penser qu'un droit puisse êtreuniversel c'est croire qu'il puisse ou doive s'appliquer partout donc remettre en cause la souveraineté nationale etméconnaître les aspects spécifiques de chaque culture.
Et c'est bien ce que l'on peut voir avec l'article 2.2 de la déclaration de 1948 : « il ne sera fait aucune distinction fondée sur le statut politique, juridique ou international dupays ou du territoire dont une personne est ressortissante, que ce pays ou territoire soit indépendant, sous tutelle,non autonome ou soumis à une limitation quelconque de souveraineté.
»c) Le problème est alors que pour définir des droits universels, il faut croire que l'on tient une véritable définition del'homme et de ses besoins, donc des droits inaliénables et imprescriptibles.
Et peut-être que de ce point de vuec'est l'article 16 qui peut sans doute poser le plus de problèmes.
En effet, le premier aliéna pose que : « A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme, sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit dese marier et de fonder une famille.
Ils ont des droits égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sadissolution.
» Or force est de constater que ce droit va bien à l'encontre de traditions ou de coutumes culturellesdans certains que ce soit en Occident ou en Orient.
De même, l'article 17 propose que : « Toute personne, aussi bien seule qu'en collectivité, a droit à la propriété.
» Pourtant, certaines cultures méconnaissent le droit à lapropriété, dans ce cas peut-on dire encore qu'il s'agit de droits de l'homme universels ? Et c'est bien la question quese posait déjà, bien plus tôt, Marx dans La question juive .
En effet, pour lui le problème est de savoir si les droits de l'homme ont une valeur universelle ou sont des outils idéologiques ? PourMarx il s'agit très clairement d'outils idéologiques pour imposer dans le mondeune vision capitaliste, empreinte d'un esprit religieux puisque la conceptionlibérale des droits de l'homme reproduit, sous une forme apparemment nonreligieuse, le modèle chrétien.
Transition : Ainsi, on peut effectivement dire qu'affirmer des droits de l'homme universelsc'est méconnaître la diversité culturelle donc aussi fournir un modèled'ingérence dans le droit d'un Etat (en le relativisant) et cela d'autant plusque l'on peut y voir un modèle idéologique occidental et de l'esprit chrétien.Pourtant force est de constater que la Déclaration universelle des droits del'homme a été ratifiée par une grande majorité des pays dans le mondereconnaissant dès lors le bien fondé et la valeur de ses droits.
Dans ce caspeut-être ne faut-il pas voir une opposition ou une méconnaissance entreuniversalité et diversité culturelle, mais bien une complémentarité, ces droitsde l'homme universels étant un modèle transcendant.
III – Dépassement dialectique de l'opposition, nécessité de ces droitset respect de la personne a) Il est important de voir qu'en fait il n'y a pas lieu d'opposer les droits de l'homme universels à la diversité.
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