A quelles conditions peut-on faire confiance à un témoignage?
Publié le 22/07/2009
Extrait du document
Le travail de l’historien consiste, à partir de témoignages d’un certain passé, à proposer une certaine version, une vision de ce passé. Mais ces témoignages posent problème. Tout d’abord, parce qu’ils peuvent prendre des formes variées: ce sont aussi bien des vestiges matériels (des ruines, un camp archéologique..) que des témoignages écrits (mémoires) ou oraux (légendes). Son matériel de départ est donc multiforme. Prenons l’exemple de témoignages écrits. Que prétend-il en faire? Est-ce qu’il prétend par exemple, à la lumière de ces documents, avoir une vision des choses aussi exacte que celle des contemporains? Cela semble une gageure impossible à tenir: il est à première vue trop mal placé, trop éloigné de son objet d’étude. Cela relèverait du tour de force: surmonter la distance temporelle, pour connaître les événements aussi bien que les protagonistes. Il semblerait donc que dans son projet même, l’histoire, en ce sens, soit grevé d’un défaut, d’une tare de départ. On y reviendra.
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Concours de fatalités inouïes!...
Grouchy!...
Ney!...
Derlon!...N'y a-t-il eu que du malheur!...
Ah, pauvre France!..."Il faut comprendre que Napoléon, qui était sans doute le mieux placé, n'y a pas compris beaucoup plus qu'un DelDongo.
Il a tout vu, mais ne comprend toujours pas, bien des années plus tard, ce qui s'est passé: pour lui, en yrepensant, il aurait dû, en toute logique, gagner cette bataille.
On pourrait conclure en disant que pour rendre compte d'un événement, il n'y a pas de "bon point de vue".
En fait, tous ces observateurs sont trop proches de l'événement, ils manquent de la distance nécessaire pourcomprendre ce qui se passe sous leurs yeux.
C'est-à-dire que, finalement, celui qui aura le meilleur point de vue, c'est justement l'historien.
Comme il n'a pasassisté à l'événement en question, il ne se laissera pas induire en erreur par sa vision personnelle.
Il ne faut doncpas dire que le métier d'historien consiste à pouvoir raconter un événement passé aussi bien que ceux qui y ontassisté, malgré la distance temporelle qui l'en sépare.
On pourrait presque dire qu'il s'agit de connaître les hommesdu passé mieux qu'ils ne se connaissaient eux-mêmes, ou comme ils ne se sont jamais connus eux-mêmes!
Au contraire, c'est cette distance temporelle qui va lui permettre d'en faire le récit mieux que tous ceux qui y aurontassisté en personne.
En quelque sorte, pour l'historien, cette distance temporelle est à la fois un obstacle qu'il fautsurmonter et un moyen, elle est un garant de son objectivité: il n'est pas impliqué.
D'autant plus que l'historien a un avantage évident sur tous les contemporains de l'événement: il en connaît lesretombées, les effets à long et court terme! C'est-à-dire justement ce par quoi cet événement est historique.
On a donc vu que l'historien ne se borne pas à reprendre à son compte ce qu'il aura trouvé dans les témoignagesd'époque, ni à en faire la synthèse.
Il transforme des témoignages subjectifs, toujours sujet à caution, en undiscours raisonné, un discours qui rend compte de ses raisons.
Par exemple, faire l'histoire de la bataille de Waterloo, cela consiste en même temps à tenir compte de ce qu'en ditNapoléon et à dire pourquoi Napoléon n'a pas compris ce qui se passait sous ses yeux, c'est-à-dire à donner uneévaluation, une critique de son témoignage...
Mais alors, est-ce que la science historique ne pourrait pas être définie comme un discours (celui de l'historien) surun discours (celui des témoins)? Peut-elle encore prétendre à un statut d'objectivité: il semble plutôt qu'elle ne faitque rajouter à la subjectivité des témoignages celle de leur interprétation!
SUPPLEMENT: le problème des témoignages en histoire
Le travail de l'historien consiste, à partir de témoignages d'un certain passé, à proposer une certaine version, unevision de ce passé.
Mais ces témoignages posent problème.
Tout d'abord, parce qu'ils peuvent prendre des formesvariées: ce sont aussi bien des vestiges matériels (des ruines, un camp archéologique..) que des témoignages écrits(mémoires) ou oraux (légendes).
Son matériel de départ est donc multiforme.
Prenons l'exemple de témoignagesécrits.Que prétend-il en faire? Est-ce qu'il prétend par exemple, à la lumière de ces documents, avoir une vision deschoses aussi exacte que celle des contemporains? Cela semble une gageure impossible à tenir: il est à première vuetrop mal placé, trop éloigné de son objet d'étude.
Cela relèverait du tour de force: surmonter la distance temporelle,pour connaître les événements aussi bien que les protagonistes.
Il semblerait donc que dans son projet même,l'histoire, en ce sens, soit grevé d'un défaut, d'une tare de départ.
On y reviendra.
Ensuite, remarquons qu'il ne peut pas admettre tous les témoignages tels quels: certains sont contradictoires entreeux, il faudra opérer des choix.
L'historien est volontairement partiel, est-il partial pour autant? Comment s'y prend-ilpour opérer ses choix?En fait, choisir certains témoignages contre d'autres, cela ne veut pas dire que l'historien admet ce qui est écrit ici,rejette ce qui se trouve là.Tout d'abord, il soumet ces documents à une critique: qui a écrit cela, dans quel but, l'auteur est-il de parti pris,quelle est son intention...
Or un document n'est jamais neutre, il reflète la position de son auteur.
On a mêmeparfois à faire à des "faux"! Par exemple, l'événement qui a déclenché la guerre de 1870 est une certaine lettreécrite par Bismarck depuis la ville d'Ems, qui contenait des termes injurieux pour la France et qui est tombée entre"malencontreusement" entre les mains des services secrets français.
Cette lettre a eu l'effet d'"un chiffon rouge surle taureau gaulois".
N'obtenant pas réparation, la France a déclaré la guerre à la Prusse.
Et ce n'est que récemmentque certains historiens ont pu établir que Bismarck avait écrit cette lettre intentionnellement et a tout fait pourqu'elle tombe entre les mains des français! Son but était de faire l'unification de l'Allemagne (à l'époque éclatée enquelque 300 Etats) dans une guerre contre la France! Pour cela, il fallait que ce soit la France qui déclare la guerre.On voit donc qu'un document n'exprime jamais un point de vue neutre, il est toujours à critiquer.
L'historien ne peutpas espérer y trouver la "vérité" de l'événement qu'il étudie: il y trouvera plutôt l'expression de la situation historiqueet idéologique de son auteur.
Sa vocation n'est pas de déterminer la véracité de certains documents pour entransposer le contenu comme vérité historique.
L'historien écrit l'histoire à partir de documents, mais contre ces.
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