ZOLA Émile (1840-1902) : sa vie et son oeuvre
Publié le 12/11/2018
Extrait du document
«
venir
idéalisé du passé et de la nature provençale, tout
autre est sa vie.
Il est fasciné par Paris, que les travaux
d'Haussmann métamorphose nt, et par le bouillonnement
culturel et politique qui caractérise les années 1859-
1860.
Il fréq uente les ateliers, reçoit ses amis, assiste
aux «conférences de la rue de la Paix », fondées par des
opposants à l'E mpire, est un lecteur assidu du Siècle,
cherche à entrer dans les équipes de journalistes républi
cains.
Il lit b�aucoup, découvre, entre autres, Michelet.
En un mot, Emile Zola, qui a eu vingt ans en 1860,
appartient à cetre génération qui a ressenti, probablement
plus que les autres, l'impression d'assister et de partici
per à l'enfantement de quelque chose de nouveau.
Il ne
milite pas, mais ses sympathies vont vers les opposants
au régime et vers ceux -ce sont les mêmes -qui
défendent l'« esprit nouveau ».
Comme ceux de sa géné
ration, il vit dans un véritable bain scientifique.
Les quatre années passées à la librairie Hachette,
foyer de libé!alisme et de positivisme, où il connut
Taine, Littré, Emile Deschanel, Jules Simon et bien d'au
tres, confirmèrent ces choix.
Le projet zolien
Il a décidé de vivre de sa plume, d'être «homme de
lettres ».
De 1862 à 1868, il mOrit ce projet : ce sont six
années d'intense activité intellectuelle, de réflexion, de
recherche, d'essais, qui aboutiront, en 1867, à Thérèse
Raquin, son premier grand roman, et, peu après, à la
mise en place de la grande fresque des Rougon
Macquart, qu'il mettra vingt-cinq ans à écrire.
Durant
cette période, la réflexion critique l'emporte sur l'acti
vité créatrice.
Elle s'exprime à travers lettres et articles
de journaux.
Zola suit deux maîtres : Littré, pour lequel
son admiration ne se démentira jamais, et Taine, auquel
il reconnaît d'immenses qualités, mais dont l'esprit de
système lui fait peur.
Il reprend à son tour la comparaison, constante à cette
époque, du romancier ou du critique avec le médecin :
romancier ou critique, « scalpel à la main », sont comme
le médecin qui « fouille les chairs » du cadavre humain,
en cherche les «ressorts avec passion »; ils font l'anato
mie de la névrose qui secoue le siècle -névrose morale
et névrose sociale.
Comme ses contemporains, en effet,
Zola a conscience de vivre dans une époque de transition
où s'accélèrent, d'une part, les mutations entraînées par
la révolution de 1789 et la disparition de certaines
valeurs sociales, morales ou religieuses, et, d'autre part,
les découvertes scientifiques et leurs applications.
Le
roman doit s'attacher à l'étude de cette génération
d'« esprits affolés et hystériques >>.
Mais ce recours à la physiologie ne doit pas servir à
«c ontenter les appétits grossiers de la foule >>.
Il doit
aider à la grande enquête scientifique sur l'homme.
Zola
refuse aussi b1en les œuvres qui se servent de la physio
logie à des fins commerciales que celles qui, à l'opposé,
se développent en pleine imagination, répondant aux
goûts d'un public avide «de mensonge, de vertu et de
grandeurs fausses ».
Si le romancier doit se fier aux seuls faits, il ne doit
pas se borner à les accumuler.
Son but est « la recherche
de la vérité à 1 'aide de 1 'analyse des êtres et des choses >>.
En Littré, ce n'est pas l'érudition que Zola admire, mais
la méthode : la déduction, 1' > qui « lui a
permis de classer scientifiquement les matières et de
marcher droit et ferme dans cette immensité vague et
trouble qu'on appelle un dictionnaire ».
Aussi va-t-il ten
ter d'appliquer cet effort de rationalisation à la produc
tion de l'œuvre d'art en général et à la production d'une
œuvre romanesque en particulier.
Toutefois, même s'il reconnaît l'influence détermi
nante du moment et du milieu sur le plan général et s'il est
tenté par une énonciation mathématique du réel, il
refuse, pour ce qui est de l'individu, d'en arriver aux
conclusions ultimes de Taine, qui s'interdit de «parler
de personnalité ».
«Tempéramen t>>, «originalité>>,
«p ersonnalité>>, « individualité», «nature indivi
duelle >>, ces termes reviennent constamment sous la
plume de Zola.
Ce qu'il affirme, c'est le pouvoir du romancier, son
rôle de constructeu r.
Le romancier est « un créateur qui
tente, après Dieu, la création d'une terre nouvelle [ ...
],
qui essaie de nous dire ce qu'il a vu, de nous montrer
dans une synthèse Je monde et ses habitants.
Mais il ne
saurait reproduire ce qui est dans la réalité; il n'a aperçu
les objets qu'au travers de son propre tempérament; il
retranche, il ajoute, il modifie, et, en somme, le monde
qu'il nous donne est un monde de son invention » (le
Salut public de Lyon, 29 avril 1865).
Un tel pouvoir n'est pas illimité:« L'imagination est
réglée par la vérité; elle a pour inventer le vaste champ
des réalités humaines >> (ibid.).
Le pouvoir du romancier
est celui de monter une expérience en fonc tion d'une
hypothèse qui soit la plus générale possible, qui puisse
donc rendre compte du plus de réel possible, en emprun
tant aux sciences la méthode expérimentale, à laquelle
Zola fait référence depuis 1866.
Le recours au modèle
scientifique ne signifie donc pas pour lui impassibilité,
obj ectivité, soumission aux faits, etc.
Rien, au contraire,
de plus voulu, de plus concerté pour Zola que la création
romanesque, qui est expérience non du réel mais d'une
forme nouvelle, à partir d'une analyse nouvelle des horn
mes, entièrement expliqués par leur physiologie et le
milieu dans lequel ils vivent.
L'essentiel donc, pour lui,
c'est le «r egard>> de J'écrivain, c'est-à-dire l'intensité
et l'extension de sa vision, le choix de son hypothèse de
départ, Je travail romanesque consistant essentiellement
dans le montage et le développement d'une expérience
et non dans une description, qui se voudrait fidèle, du
réel.
Une fois l'hypothèse choisie, le «c as posé », Zola
introduit en effet la rigueur de la déduction, de l'enchaî
nement des causes et des effets, qui vient corroborer la
justesse de J'hypothèse initiale.
Il insiste sur l'analyse
des mécanismes qui produisent le personnage; la logique
de l'enchaînement des faits et des réactions devient un
sujet constant de réfl exion dans les dossiers prépara
toires, car il s'a git de permettre au lecteur de compren
dre, de remonter de l'ef fet à la cause.
Transposant dans le domaine de la création littéraire
les théories de l'économie libérale, Zola affirme, dès
1865 : « Une œuvre d'art est un coin de la création vu à
travers un tempérament».
Comme le note Henri Mille
rand dans le Discours du roman, « le travail de 1' énoncia
tion est affirmé trois fois dans cette formule : dans "vu",
dans "tempérament" et dans "à travers".
C'est peut-être
devant cet "à travers" que la critique d'aujourd'hui pour
rait rester le plus longtemps en arrêt.
Car tout tient à la
structure et au fonc tionnement du filtre par lequel passe
la matière "naturelle et sociale", avant de devenir
"matière scripturale" >>.
L'ambition des Rougon-Macquart
C'est à la fin de 1867 ou au début de 1 868 que Zola
songe à étudier dans une suite de romans « les fatalités
de la vie, les fatalités des tempéraments et des milieux >>.
« Je ne veux pas peindre la société contemporaine,
affirm e-t-il dans ses "Différences entre Balzac et moi",
mais une seule famille, en montrant le jeu de la race
modifiée par les milieux.
[ ..
.
] Ma grande affaire est
d'être purement naturaliste, purement physiologiste ».
Aussi consac re-t-il J'année 1868 à lire de nombreux
ouvrages de physiologie, parmi lesquels la Physiologie
des passions de Charles Letourneau et le Traité de l'hé-.
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