"Vraiment, puisqu’on crie tant sur ces fichues Lettres, je me repens bien de ne pas en avoir dit davantage !" écrit Voltaire dans sa correspondance (phrase citée par le critique J. Van Den Heuvel, notice pour les Lettres Philosophiques, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard). Dans quelle mesure le fait de choquer permet-il aux écrivains de faire progresser les idées qu’ils défendent ? Vous appuierez votre développement organisé sur des exemples tirés du corpus, sur des textes étudiés
Publié le 08/09/2018
Extrait du document
■ Formuler la problématique
• Type de sujet : question qui contient une thèse.
• Problématique : pour défendre ses idées et les faire admettre par les lecteurs, l'usage de la violence verbale eVou idéologique est-il un moyen efficace ? ou au contraire, cette véhémence dessert-elle l'auteur ?
■ Exploiter les textes du corpus et mobiliser ses connaissances
• Dans le texte 1, on peut noter l'absence d'un ton polémique prononcé. Seuls quelques termes sont ouvertement péjoratifs (« vers de terre », « infâme »). Si Voltaire choque par ce texte, c'est davantage en raison des i dées qu'il avance. En effet, on voit une très nette désacralisation des rites et sacrements catholiques (le baptême est réduit au fait de « jeter de l'eau froide sur la tête, avec un peu de sel ») ainsi qu'une remise en cause de la politesse et des normes sociales (dernier paragraphe). Mais, par cet extrait, on voit aussi la force de la persuasion calme et raisonnée : on est impressionné par le discours structuré et logique du quaker sur les mœurs sociales et séduit par l'anecdote à valeur didactique que nous narre l'auteur. On voit donc que le récit pédagogique et le dialogue argumentatif permettent efficacement de défendre ses idées.
• Dans le texte 2 à nouveau, la violence est moins dans le ton que dans les idées. La politique belliqueuse de Louis XIV est critiquée mais sur un mode calme et posé. Voltaire élabore une comparaison entre l'Angleterre et la France et invite donc le lecteur à conclure rationnellement. Peu de termes forts apparaissent pour critiquer le système absolutiste (« pouvoir despotique ») ; le « convaincre » l'emporte sur le « persuader ». Si le texte est choquant, c'est aussi parce qu'il remet en cause des idées établies : ainsi, le système politique romain a souvent été perçu comme un modèle à suivre ; or Voltaire décrie ce système qui manque selon lui de « balance » et accuse les Romains d'avoir méprisé le « peuple ».
• Dans le texte 3, la critique est plus acerbe. Les noblesses française et allemande sont stigmatisées car entichées de leurs « quartiers ». C'est donc au sommet de la pyramide sociale que Voltaire s'attaque. Ce dernier condamne le mépris des aristocrates pour les « négociants » qui travaillent et ne sont pas bien nés. Pour le philosophe, ces grands seigneurs sont des parasites sociaux, plongés dans l'oisiveté. Les termes employés par Voltaire pour les désigner peuvent choquer : ils sont dits « esclaves » d'un ministre ou d'un grand par exemple.
• D'autres textes peuvent bien sûr être convoqués. Pensez par exemple au chapitre XIX de Candide, dans lequel Voltaire dénonce avec une très grande violence l'exploitation des esdaves (« C'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe »). Si on recherche des textes choquants, on pourra aussi convoquer Detesdavage des nègres de Montesquieu, texte ironique dans lequel l'esclavage paraît être justifié. Les textes d'Aimé Césaire sur la condition de l'homme noir sont aussi de bons exemples ou encore ceux de Hugo contre la peine de mort. N'oubliez pas que la critique peut aussi prendre d'autres voies, qu'il n'est pas toujours nécessaire de choquer pour faire avancer les idées d'une société. Pensez aux atouts de la critique implicite (voile de la fiction, recours à l'allégorie...). Le texte de Lesie Kaplan L'Usine texcès (1982) propose ainsi une critique acerbe du monde de l'usine mais sur un mode poétique (métaphore de l'enfermement, structures anaphoriques...).
■ Élaborer le plan
La problématique étant une alternative interrogative, le plan est analytique. Plan de la dissertation
I-Certes, un discours violent et ouvertement engagé est efficace dans le combat d'idées
Il - Mais, le recours à l'implicite est aussi un bon moyen de convaincre et de persuader
«
sans plis dans les côtés et sans boutons sur les poches ni sur les manches,
et portait un grand chapeau à bords rabattus, comme nos ecclésiastiques ;
il me reçut avec son chapeau sur la tête, et s'avança vers moi sans faire la
moindr e inclination de corps ; mais il y avait plus de politesse dans l'air
15 ouvert et humain de son visage qu'il n'y en a dans l'usage de tirer une jambe
derrière l'autre et de porter à la main ce qui est fait pour couvrir la tête.
Ensuite il me rendit raison en peu de mots de quelques singularités qui
35 exposent sa secte7 au mépris des autres..
»
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