Devoir de Philosophie

Vous expliquerez, discuterez et commenterez cette affirmation de Paul Valéry dans son Introduction à une édition des Fleurs du Mal (Collection Vers et Prose, Payot) : ... Baudelaire, quoique romantique d'origine, et même romantique par ses goûts, peut quelquefois faire figure d'un classique...

Publié le 05/05/2011

Extrait du document

baudelaire

 

Les termes romantique et classique embrassent un champ si vaste et si divers, qu'il importe de les définir, dès l'abord, dans le sens où Paul Valéry les entend. L'étude de l'Introduction permettra cette délimitation.

Explication. • Très habilement, Paul Valéry n'a pas tenté de définir le Romantisme en soi, mais seulement en fonction de Baudelaire, qui devait normalement chercher à être différent des maîtres antérieurs : Des poètes illustres s'étaient partagé depuis longtemps les provinces les plus fleuries du domaine poétique. Il m'a paru plaisant, et d'autant plus agréable que la tâche était plus difficile d'extraire la beauté du Mal... (Projet de Préface). 

baudelaire

« Baudelaire a vécu toute sa jeunesse dans une période où le Romantisme n'est plus discuté.

Chateaubriand, Lamartine, bientôt Hugo et Vigny, puis Musset s'imposent à l'opinion publique.Quand Baudelaire est à même de former son goût, le lyrisme est à sonapogée.

Le héros romantique, solitaire, fatal et désespéré hante toutes lesimaginations de la jeunesse.Or que lit-on dans les souvenirs de collège de Baudelaire? Lourdesmélancolies, à propos du collège royal de Lyon, et encore : Sentiment desolitude dès mon enfance, malgré la famille et au milieu des camaradessurtout — sentiment de destinée éternellement solitaire...

Cette fatalité etcette solitude n'étaient pas uniquement le fruit de l'imagination.

Interne,Baudelaire a souffert d'être séparé de sa mère qu'il adorait.

A son beau-père,officier rigide, il oppose le souvenir de son père, ancien précepteur du duc deChoiseul-Praslin, chef de bureau au Sénat sans doute, mais peintre amateuret lecteur des philosophes Condorcet, Cabanis, qu'il avait connus avant laRévolution.

A la nostalgie de l'orphelin s'ajoute la jalousie de l'enfant contrecelui qui prend sa part de l'affection maternelle.

Sur ce remariage, d'après unde ses amis, J Buisson, il était inépuisable et sa terrible logique se résumaittoujours ainsi : quand on a un fils comme moi — comme moi était sous-entendu — on ne se remarie pas.

Toute sa vie, il prendra plaisir à contre-carrer les projets de M.

Aupick, à railler ses idées.

Plus la carrière de sonbeau-père est brillante —le commandant Aupick devient général, puisambassadeur à Constantinople — plus Baudelaire affecte des allures bohèmeset artistes : en face de l'ordre que représente M.

Aupick, son beau-fils incarne la révolte. • Romantique par ses goûts : Plusieurs aspects de la vie et de l'oeuvre de Baudelaire dénotent non seulement unromantisme extérieur, mais des goûts romantiques.Ce n'est pas uniquement M.

Aupick qui exaspère Baudelaire, mais les bourgeois de son temps.

Depuis 1830, lesétudiants, les artistes se sont moqués des « philistins » et ont voulu les étonner par leur cynisme tapageur.

«Bousingots » et « Jeune-France » font fi de la morale et de la mode.

Théophile Gautier, Gérard de Nerval, PétrusBore veulent vivre en artiste.

Baudelaire s'amuse de leur mise pittoresque, mais ne partage pas leur gaîté un peuvulgaire, et à la Bohême préfère le dandysme.Dandysme extérieur.

Balzac a donné du dandysme l'ironique définition suivante : Le dandysme est une hérésie de lavie élégante.

En se faisant dandy un homme deviendra meuble de boudoir, un mannequin extrêmement ingénieux quipeut reposer sur un cheval ou sur un canapé, qui mord ou tette habilement le bout d'une canne, mais un êtrepensant? (Traité de la vie élégante).

Les élégants du temps, les dieux de la jeunesse, Brummel et le Comte d'Orsayméritent largement ce reproche : La couleur des gilets, le vernis des bottes et les basques de l'habit occupent dansleur existence une place démesurée.

Mais à ce dandysme extérieur, qui dépend de la mode et des manières, s'ajouteun dandysme intérieur, celui des Namouna et des Mardoche (voir XIXe siècle, tome II), qui prend modèle sur Byron.Baudelaire appartient à cette seconde catégorie, avec moins de fantaisie et de spontanéité que Musset, et plus devolonté étudiée.Le portrait que son ami Nadar a laissé de lui, donne une idée de l'élégance apprêtée du poète.

Le seul aspect decelui-ci le distingue du vulgaire : ...

Tout de noir, sauf la cravate de sang-de-boeuf, en habit qui dut être médité,démesurément évasé du torse en un cornet d'où émergeait, comme bouquet, la tête, et à basques infinitésimales ensifflet; — l'étroit pantalon sanglé sous le sous-pied sur la botte irréprochablement vernie.

Col de chemise largementrabattu, manchettes non moins amples en linge très blanc de fine toile...

A la main, gantée de rose pâle, il portaitson chapeau, superflu de par la surabondance d'une chevelure bouclée et très noire qui retombait sur les épaules. A ce costume hors du commun correspond un idéal aristocratique; le poète ne doit pas penser, ni sentir comme levulgaire.

Le dandysme impose une discipline interne, une rigueur plus exigeante que celle de la morale; l'artiste nepeut accepter de compromission avec la société matérialiste; il ne vit que pour l'art, et sa première création, sapremière composition, c'est lui-même : Le dandy doit aspirer à être sublime sans interruption.

Il doit vivre et dormirdevant un miroir (Baudelaire).Ce culte du « Moi » découle du sentiment de solitude et s'accompagne d'orgueil et de timidité.

On sentconstamment chez Baudelaire l'appréhension d'être vaincu.

M.

Sartre a noté avec raison que ses violences à l'égardde M.

Aupick ou de M.

Ancelle, son notaire, sont les manifestations d'un velléitaire et non d'un volontaire.

De mêmela foule l'attire et le repousse à la fois.

Baudelaire est incapable de se retirer comme Vigny dans la solitude et decomposer à loisir, sûr de sa supériorité.

Il a besoin du peuple qu'il méprise, de ses compagnons de café, dont il raillela médiocrité : il lui faut un public qu'il étonne par sa mise, ses propos et ses oeuvres.

Aussi dandysme extérieur etdandysme intérieur sont-ils inséparables; ils constituent l'épanouissement d'un tempérament soigneusement cultivépar l'artiste pour sa satisfaction et peut-être même une tentative pour se dépasser soi-même.

Le dandysme deBaudelaire n'est pas une simple parade.

Faut-il conclure avec M.

Ferran qu'il donne son unité au personnagecomplexe de l'écrivain, homme avec le souci de distinction, aristocrate dédaignant bourgeois et foule, chrétien quise singularise pour s'élever, mystique qui repousse l'instinct, artiste qui a horreur du banal?Le mysticisme, l'amour du Moyen âge, l'exemple des littératures étrangères ont développé au rixe siècle lesatanisme.

Les sorcières de Macbeth, le spectre d'Hamlet et le sabbat de Faust ne cessent de hanter lesimaginations.

Mais ces conceptions naïves et pittoresques font bientôt place à des préoccupations philosophiques.Au diable grimaçant des gargouilles médiévales succède un Lucifer étincelant et énigmatique, qui suscite l'intérêt et. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles