Vous établirez le portrait de Chateaubriand, les désirs de sa sensibilité, les tendances de son imagination, le sentiment de l'honneur, le goût de la grandeur.
Publié le 17/03/2011
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Plan proposé : Introduction. — Comment nous connaissons Chateaubriand : ses confidences directes (Mémoires d'outre-tombe) et indirectes (par exemple ses romans personnels). I. — Désenchantement très sincère. Avant tout, Chateaubriand a été un grand mélancolique. L'ennui, ce mal incurable que René va exprimer si poétiquement, qui va devenir le mal du siècle, a réellement désolé le grand écrivain. On connaît ce joli mot d'une Anglaise : «Vous portez votre cœur en écharpe. Lui-même prétend que ce mal le prit quelques instants après sa naissance. « Je n'avais vécu que quelques heures, et la pesanteur du temps était déjà marquée sur mon front. « «Je m'ennuie, dit-il sans cesse, je bâille ma vie ; qui me délivrera de la manie d'être ? «
«
IV.
— Honneur chevaleresque.
Dans un cours donné à Lausanne en 1844, A.
Vinet disait, à propos de Chateaubriand : « Au-dessous des opinionsun peu factices, au-dessous, dirai-je, de cette représentation, si vous cherchez l'homme, vous le trouverez tel queje l'ai dit : désabusé en tout temps, triste au fond, amer quelquefois, poète plutôt qu'enthousiaste, mais généreux,courtois, chevaleresque par nature et sans nul effort.
Si la chevalerie n'eût pas existé, il l'aurait inventée et,véritablement, elle s'est surpassée en lui.
»
Vinet est revenu très souvent sur cette idée : Chateaubriand est en plein XIXe siècle le « type » de l'honneurchevaleresque : « Honnête, qui l'est plus que l'auteur du Génie du Christianisme ? Où faut-il chercher, sinon en lui, letype du parfait honneur ? »
Voici enfin ce qu'écrivait Mme de Swetchine après une lecture des Mémoires d'outre-tombe : « Quelle est donc labeauté morale dont M.
de Chateaubriand n'ait pas eu le sentiment, qu'il n'ait pas respectée, qu'il n'ait pas glorifiéede tout l'éclat de son pinceau ? Quel est donc le devoir dont il n'ait pas eu l'instinct et souvent le courage ? Onveut bien qu'il ait été quelquefois (sublime d'égoïsme.
Avec plus de justice, on pourrait le montrer dans bien descirconstances capable d'élan, de sacrifice et de dévouement, non pas à un homme peut-être, mais à une idée, à unsentiment incessamment vénéré.
»
Sans doute y-a-t-il des réserves à faire.
Reportez-vous au sujet intitulé « L'Honneur chevaleresque deChateaubriand » dans M.
Roustan, Le XIXe siècle : Enseignement supérieur.
V.
— Imagination.
Voilà, et de beaucoup, sa faculté maîtresse, à laquelle sont subordonnées toutes ses qualités.
Chateaubriand n'estpas un penseur profond et vigoureux.
Ses idées
apologétiques, ses idées critiques, il ne les a pas tirées de longues et profondes méditations.
Il va droit à YEncyclopédie et au XVIIIe siècle , prend les idées une à une, affirme le contraire et c'est fait.
Il mérite sansconteste le titre de moraliste pour avoir donné à des sentiments à la fois nouveaux et communs une forme presquedéfinitive.
Mais comment serait-il un moraliste éminent puisqu'il est incapable d'être un psychologue ? Il ne sait pasexpliquer des sentiments, les creuser, en chercher les éléments divers, remonter jusqu'à leurs sources.
Commedialecticien, ne lui demandons pas des analyses précises, des critiques serrées.
En somme, si son intelligence a étésupérieure, ses idées ont été médiocres, ou plutôt ce qu'il nous a donné, c'est le reflet de ses sentimentspersonnels.
C'est dire assez que Chateaubriand n'a pas fait œuvre de penseur.
Il a fait œuvre d'artiste, et envisagéainsi, nous le trouverons tout à fait admirable.
C'est bien là qu'est sa véritable gloire, et cela revient à dire qu'il estsurtout grand par sa sensibilité et son imagination.
(Cf.
M.
Roustan : Le XIXe siècle, Enseignement supérieur :«Chateaubriand grand artiste, grand poète, chercheur d'images », et R.
Canat : La Littérature française par lestextes, chap.
xxi, § 2, p.
505 sq.
Conclusion.
— Voilà pourquoi Vinet a pu écrire : « L'art a certainement sa place dans la vie, mais il n'a rien à voirdans la formation des convictions, les convictions relèvent uniquement de la science et de la conscience.
Eh bien!l'art ou, si on l'aime mieux, l'imagination et la poésie paraissent avoir eu leur part dans le système dont M.
deChateaubriand est devenu le représentant.
Son christianisme (je veux dire celui de ses livres) est littéraire, sapolitique est littéraire, et le lien qui unit cette politique et ce christianisme est littéraire aussi.
Tout cela fort sincère,je le crois, est une œuvre d'artiste.
Sa vie même, sa personnalité porte le même caractère.
Il l'a composée enpoète, et de tous ses ouvrages c'est encore le meilleur.
Mettre en question sa sincérité ne serait pas seulementinjuste, mais déraisonnable : ce poème vivant qui s'appelle M.
de Chateaubriand, n'est si parfait que parce qu'il estsincère.
» (Vinet, Etudes de la littérature française au XIXe siècle, t.
I : Chateaubriand, p.
246.).
»
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