Vous direz — en faisant référence à des exemples précis — si pour vous le cinéma est « un instrument de distraction de qualité inférieure» ou bien si c'est un art au même titre que la musique, la peinture ou la poésie.
Publié le 22/02/2011
Extrait du document
1) un instrument de distraction de qualité inférieure ; 2) un art au même titre que la musique, la peinture ou la poésie. Première partie. a) Une technique au service d'une distraction. — L'évasion. — Le rire. b) Pourquoi déprécie-t-on le cinéma ? — Les critiques s'inscrivent dans le dénigrement généralisé à l'égard des média. — Les limites de l'image. Deuxième partie. a) Les critères artistiques des films. b) Ce qui différencie le cinéma des autres arts.
«
La Chevauchée fantastique de John Ford, La Ruée vers for de Chaplin peuvent, certes, être considérés comme desfilms porteurs d'évasion.
Pourtant il semble difficile de leur dénier une dimension plus grande, plus élevée que cellede la simple distraction.
Un film comme Ivan le Terrible d'Eisenstein, par la beauté plastique de ses images, accèdenettement au rang d'expression artistique.Quels seraient donc les critères qui valorisent le cinéma? La photographie, tout d'abord, donne souvent auspectateur le choc de la beauté : la beauté du Bois de bouleaux d'Andrzej Wajda par exemple est tout à faitsensible par la composition des couleurs.
Plus spécifique encore : le mouvement.
L'apport du cinéma est ici unique.
Ilest le seul à offrir véritablement le mouvement, même si certaines tentatives en peinture et en sculpture visentaujourd'hui à faire jouer la lumière sur des «mobiles».
Les effets de ralenti, les superpositions, les « trucages »nombreux sont les procédés techniques qui font du cinéma autre chose que la simple reproduction du réel.
Ainsidans le film du Polonais Wajda, la mort du jeune homme : le bois constitue l'arrière-plan, blanc, vert et or, les arbresdéfilent.
Au premier plan le personnage, fixe.
Entre les deux, animé d'un mouvement plus lent, le châssis d'unefenêtre crée une atmosphère étrange et surréelle.En outre le cinéma fait intervenir d'autres disciplines artistiques : la musique par exemple.
Il est bien évident qu'ellen'est pas spécifique du cinématographe.
Pourtant elle peut parfaitement être l'élément d'un langage filmique :l'utilisation que fait Ken Russell de Tchaïkovski est à ce titre remarquable, de même Orange mécanique ou BarryLindon de Stanley Kubrick permettent d'établir une véritable «correspondance» entre les sons et l'image.
Dans lemême esprit l'adaptation d'une œuvre littéraire peut être décevante, mais elle peut aussi donner lieu à une nouvellevision d'un auteur, comme c'est le cas pour les œuvres de Shakespeare à travers Othello, Macbeth servies parOrson Welles.Ainsi deux directions se dégagent : le film peut créer une nouvelle forme esthétique grâce à l'utilisation dumouvement.
Il peut aussi réintégrer des arts traditionnels dans un nouveau mode d'expression.Peut-on dire pour autant que le cinéma soit à placer sur le même plan que la musique, la poésie ou la peinture ? Onpeut certes reprocher au septième art certains effets faciles : ainsi le ralenti devient facilement un procédé, lamusique souligne artificiellement certaines scènes.
Mais la critique peut s'adresser également à d'autres disciplines :en poésie, la versification devient aisément procédé, « les chevilles » choquent souvent.
Ici le « faiseur de rimes »rejoint le médiocre metteur en scène.On assimilerait pourtant à tort le cinéma aux autres formes artistiques.
Il comporte en effet des problèmes bienparticuliers.
Il suppose tout d'abord un travail d'équipe.
Pas question ici de créations solitaires.
Même si le metteuren scène organise l'ensemble de la réalisation, même s'il contrôle les dialogues, la photographie, la création d'un filmnécessite l'intervention d'un grand nombre de techniciens, d'acteurs.
En ce sens il rejoint plutôt le théâtre à ceciprès que le «scénariste-auteur» est beaucoup plus lié à la mise en scène puisque celle-ci est définitive.
Le film sefige dans une interprétation qui conditionne l'écriture.
Au théâtre, au contraire, l'auteur sait que les interprétationspourront être diverses.Mais surtout les préoccupations commerciales sont bien plus importantes que dans les autres disciplines.
Lapeinture, la musique n'excluent pas ces problèmes financiers, mais les sommes engagées dans la création d'un filmsont souvent considérables.
Il faut donc rentabiliser la production, attirer le plus possible de spectateurs.
Le publicconcerné est très important.La réduction des entrées alerte immédiatement les «professionnels » et l'on parle de crise du cinéma.
Lesréalisateurs sont alors tentés de séduire les spectateurs par les moyens les plus artificiels, au détriment parfois de laqualité.
* * *
Ainsi, le cinéma est bien un instrument de distraction.
Cette fonction ne doit pas être sous-estimée et elle n'est pasnécessairement de « qualité inférieure».
Certains films montrent bien que la dignité artistique peut être réalisée.Toutefois ce serait une erreur de considérer la production cinématographique comme semblable aux autres moyensd'expression.
Elle a ses problèmes propres.
Plus que d'autres arts la médiocrité la guette, mais ce n'est pas uneraison pour la considérer, a priori, comme une genre mineur.
« En face de l'écran le spectateur est comme l'animal fasciné par le serpent : mangé d'avance.
» Jean Leirens, LeCinéma et le temps, 7e art, Édit.
du Cerf.
«Le public est un enfant toujours prêt à accepter ce qui le divertira : parfois une œuvre excellente, parfois uneniaiserie.
» René Clair, Cinéma d'aujourd'hui.
Gallimard..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- R. Huyghe affirme que, par l'art, « le monde devient plus intelligible et accessible, plus familier ». Sans vous limiter au seul domaine de la peinture, mais en vous appuyant sur votre expérience de la littérature, de la musique, du cinéma ou de toute autre forme d'expression artistique, vous direz, dans un développement composé, si l'art vous apparaît comme le mode privilégié de compréhension du monde.
- Né de l'union de plusieurs formes d'expression préexistantes qui ne perdent pas entièrement leurs lois propres (l'image, la parole, la musique, les bruits même), le cinéma, d'emblée, est obligé de composer, à tous les sens du mot. Il est d'entrée de jeu un art, sous peine de n'être rien du tout. Sa force ou sa faiblesse est d'englober des expressivités antérieures : certaines sont pleinement des langages (l'élément verbal), d'autres ne le sont qu'à des sens plus ou moins figurés (la mu
- Expliquer et commenter en l'illustrant ce jugement du sculpteur Rodin: « Le vulgaire, s'imagine volontiers que ce qui est laid n'est pas matière artistique. Il voudrait nous interdire de représenter ce qui lui déplaît. C'est une profonde erreur. Qu'un grand artiste ou un grand écrivain s'empare de la laideur, instantanément il la transfigure, il en fait de la beauté. Tout ce qu'on nomme laideur dans la nature peut dans l'art devenir admirable. » - Vous pourrez tirer des exemples variés
- Un écrivain actuel a défini récemment la poésie en ces termes: «La poésie est défoulement des sentiments, protestation véhémente plus éloquente que tous les discours, alchimie des structures et des mots, ... elle est cri ou message, musique et grâce. » Vous direz dans quelle mesure cette définition vous satisfait sans oublier d'éclairer votre développement à l'aide d'exemples précis.
- «Il faut consulter les connaisseurs (...) mais il ne faut pas oublier le public.» Vous expliquerez le sens de cette formule et discuterez ce point de vue en empruntant, à votre gré, vos exemples à diverses formes d'art (littérature, peinture, musique, cinéma...).