« Vous commenterez ces propos du poète contemporain Jean-Claude Renard : « La poésie ne donne qùe des mots. Mais les donnant avec l'origine et le mystère qui sont en eux, elle convie à posséder ce que disent les mots. »
Publié le 01/09/2012
Extrait du document
Mais il ne suffit pas de penser, comme un certain courant de critique (Meschonnic), le langage en antériorité. Cette origine que questionne Jean-Claude Renard en sa thèse et qui fait le mystère du verbe poétique trouve son ancrage dans la matière affective du poète. Il peut s'agir de souvenirs littéraires imprécis, mais dont restent un rythme, une consonnance particulière. Prévost, je crois, critique de Baudelaire, montrait que la création n'est jamais totale, mais doit beaucoup aux emprunts, transformés ou non, assimilés, faits par un poète à d'autres auteurs.
«
de ses outils, de ses moyens du bord, pour reprendre une
métaphore sartrienne, et gère cette mystérieuse transsubstantation
de
la chose en mot et vice versa.
Il y a d'abord une question de définition, qui nous fait entrevoir
l'originalité du projet poétique :
le mot du poète n'est pas celui du
" parleur » de la terminologie sartrienne dont le discours est en
perpétuel sursis d'anéantissement à mesure que sa durée se
déploie, révélant
la signification qu'il porte.
La force ici se borne à
une instrumentalité de bon
aloi, celle qui régit les rapports humains
de communication : en cela,
elle est saturée d'humanité.
Girau
doux
n'a fait que redorer la prose de tous les jours, etc' est la forme
même qui convient
le mieux avec cet humanisme de l'homme
ridicule,
fat, mais sympathique dans ses petites faiblesses.
La poésie, elle, commence par un règlement de comptes du
prosaïsme; elle peut débuter par une expérience pessimiste du
langage : pour un
Ponge qui est de la même génération qu'un
Brice Parain, la prose s'assimile aux beaux discours enguirlandés
de ceux qui, en 1914, soutenaient
le moral des troupes.
Il n'y a
plus de rapport entre
les charniers décrits dans un roman de
Giono,
le Grand Troupeau, et ce langage qui, dans la philosophie
bergsonienne, produit par une surabondance d'intelligence inuti
lisée, se désenglue du réel et survole, libre en son extrême
mobilité, les choses et n'est requis par aucun impératif
vital.
Cette
expérience du langage, qu'on pourrait comparer à
celle d'un Hugo
avec son
Dernier j0ur d'un condamné - avec cet argot de
bagnards, cette langue monstrueuse, qui se gonfle jusqu'à essayer
de combler tous
les possibles que laisse encore la vie à l'approche
d'une mort imminente, et
qui, vaincue, fuse de tous les côtés
semble déterminante : elle fonde la poésie moderne.
La poésie est
insurrectionnelle,
elle s'oppose à la poésie classique qui, comme l'a
montré brillamment Barthes, n'est qu'un continu, où
le mot en
appelle un autre avant qu'il n'ait pu se
figer en sa densité propre.
La poésie moderne, au contraire, porte au
faîte le mot ; elle se
précipite en orgueilleux monolithes, se
taille en blocs, qui hachent
le vers et le poème.
La poésie instaure un discontinu où le mot seul
résonne, retentit pour parler comme Bachelard.
Ici, on aperçoit la
thèse de J.-C.
Renard : si la poésie classique et le langage
quotidien dont nous usons sont une nature,
la poésie moderne, est
une surnature.
Elle ne donne que des mots, mais elle est plus que
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L
L_J.
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