Voltaire, Lettres philosophiques, Lettre 10 « Sur le commerce » , 1734 - Commentaire composé
Publié le 10/11/2013
Extrait du document
La lettre X, consacrée à un thème qui intéressait particulièrement Voltaire à la fois sur le plan personnel et sur le plan d'une réflexion économico-philosophique, est conçue comme une unité démonstrative. Le texte se présente en effet, dans sa totalité, comme une argumentation visant à prouver l'importance du commerce à partir de l'exemple de l'Angleterre. Voltaire s'efforce de montrer, preuves historiques à l'appui, que le commerce est le moteur non seulement de l'économie mais de la grandeur d'une nation dont il favorise à la fois la liberté et le bonheur. Cette conception, qui s'inscrit dans toute une réflexion caractéristique des préoccupations du siècle, est assez représentative de l'idéologie voltairienne. Elle sera reprise dans Le Mondain et alimentera, plus tard, la polémique engagée avec Rousseau. Vanter les prestiges du commerce et en faire la base de la liberté et du bonheur, c'est en effet remettre en cause un certain nombre de croyances religieuses (celles qui attribuent le bonheur à la providence ou celles qui dissocient catégoriquement le bonheur des biens matériels). C'est aussi affirmer la nécessité du progrès. C'est enfin, sur le plan social, établir une distinction entre les classes inactives, jugées de ce fait peu utiles à l'État, et les classes laborieuses (la bourgeoisie, essentiellement, mais aussi une petite partie de l'aristocratie) qui constituent l'élément clef de la vie économique d'un pays.
Le texte, très structuré, débute par l'énoncé d'une thèse illustrée ensuite par des arguments qui se confondent avec des exemples historiques. Le commentaire pourra mettre en relief la structure argumentative du texte, les éléments de critique qu'elle contient et l'importance de la relation commerce/liberté/bonheur.
«
ne dédaigne point le négoce.
Milord Townshend, ministre d’Etat, a un frère qui se contente
d’être marchand dans la Cité.
Dans le temps que Milord Oxford gouvernait l’Angleterre, son
cadet était facteur à Alep, d’où il ne voulut pas revenir, et où il est mort.
Cette coutume, qui pourtant commence trop à se passer, paraît monstrueuse à des
Allemands entêtés de leurs quartiers; ils ne sauraient concevoir que le fils d'un pair
d'Angleterre ne soit qu'un riche et puissant bourgeois, au lieu qu'en Allemagne tout est prince;
on a vu jusqu'à trente altesses du même nom, n'ayant pour tout bien que des armoiries et de
l'orgueil.
En France est marquis qui veut, et quiconque arrive à Paris du fond de sa province
avec de l'argent à dépenser et un nom en ar ou en ille peut dire "un homme comme moi, un
homme de ma qualité", et mépriser souverainement un négociant; le négociant entend lui -
même parler si souvent avec dédain de sa profession qu'il est ass ez sot pour en rougir; je ne
sais pourtant lequel est le plus utile à un Etat, ou un seigneur bien poudré qui sait précisément
à quelle heure le roi se lève, à quelle heure il se couche, et qui se donne des airs de grandeur
en jouant le rôle d'esclave dans l'antichambre d'un ministre, ou un négociant qui enrichit son
pays, donne de son cabinet des ordres à Surate et au Caire, et contribue au bonheur du
monde. »
C o m m e n t a i r e c o m p o s é
I n t r o d u c t i o n
La lettre X, consacrée à un thème qui intéressait particulièrem ent Voltaire à la fois sur
le plan personnel et sur le plan d'une réflexion économico -philosophique, est conçue comme
une unité démonstrative.
Le texte se présente en effet, dans sa totalité, comme une
argumentation visant à prouver l'importance du commerc e à partir de l'exemple de
l'Angleterre.
Voltaire s'efforce de montrer, preuves historiques à l'appui, que le commerce est
le moteur non seulement de l'économie mais de la grandeur d'une nation dont il favorise à la
fois la liberté et le bonheur.
Cette con ception, qui s'inscrit dans toute une réflexion
caractéristique des préoccupations du siècle, est assez représentative de l'idéologie
voltairienne.
Elle sera reprise dans Le Mondain et alimentera, plus tard, la polémique engagée
avec Rousseau.
Vanter les p restiges du commerce et en faire la base de la liberté et du
bonheur, c'est en effet remettre en cause un certain nombre de croyances religieuse s (celles
qui attribuent le bon heur à la providence ou celles qui dissocient catégoriquement le bonheur
des bien s matériels).
C'est aussi affirmer la nécessité du progrès.
C'est enfin, sur le plan social,
établir une distinction entre les classes inactives, jugées de ce fait peu utiles à l'État, et les
classes laborieuses (la bourgeoisie, essentiellement, mais aussi une petite partie de
l'aristocratie) qui constituent l'élément clef de la vie économique d'un pays.
Le texte, très structuré, débute par l'énoncé d'une thèse illustrée ensuite par des
arguments qui se confondent avec des exemples historiques.
Le commentai re pourra mettre en
relief la structure argumentative du texte, les éléments de critique qu'elle contient et
l'importance de la relation commerce/liberté/bonheur.
I.
L A S T R U C T U R E A R G U M E N T A T I V E D U T E X T E E T S O N
E F F I C A C I T É
Le texte est construit en cinq paragrap hes dont aucun ne commence réellement par une
articulation logique.
La continuité des idées est assurée par la reprise constante des éléments
d'un champ lexical du commerce et par l'illustration, à travers plusieurs exemples, de
l'association efficace comm erce/grandeur.
La thèse est énoncée au début du texte et illustrée
ensuite dans une alternance régulière Angleterre/autre pays.
Le caractère argumentatif du.
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