VIGENÈRE Biaise de : sa vie et son oeuvre
Publié le 12/11/2018
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VIGENÈRE Biaise de (1523-1596). On sait que Biaise de Vigenère, né à Saint-Pourçain, a pris part à la guerre contre les Impériaux à la fin de ses études (1543). Il a aussi participé aux combats menés par la ligue de Smal-kalde et accompagné l’envoyé de France à la diète de Worms (1545). Sa vie restera marquée par la faveur constante de la Cour : son orthodoxie et sa prudence la méritaient. Il voyage pendant deux ans, en Allemagne et aux Pays-Bas, puis séjourne à Rome (1549), où il rencontre Michel-Ange et étudie les palais. A partir de 1551 et jusqu’à 1555, il assiste aux guerres allemandes avec le duc de Nevers, dont il est le secrétaire depuis 1547. En 1560, il se met au grec et à l’hébreu avec Turnèbc, Dorât, Genébrard (ligueur et hébraïsant) et les frères Guy et Antoine de La Boderie.
«
Entrée
du roi Henri Ill à Mantoue, 1576) ou scientifique
(Traité des chiffres, 1586; Traité des comètes, 1578;
Traité du feu e! du sel, posth., 1618).
Ces derniers textes,
petits monuments d'érudition, se distinguent mal des
compilations.
Enfin, d'autres écrits de Vigenère sont per
dus (dont un Traité de l'or et du verre).
« Sans dout•! ne fut-il pas une personnalité dominante,
un esprit original» (D.
Métral) : Vigenère cependant
mérite l'attention par la valeur qu'il accorde à l'expé
rience.
Son pragmatisme peut le rapprocher de Montai
gne.
Il semble qu'il ait pratiqué des expériences alchimi
ques, dont il donne les recettes dans un souci généreux
de vulgarisation : certaines peuvent prendre place dans
l'histoire de la chimie.
Sans méthode particulière, Vige
nère énonce le principe d'un réalisme empirique : «les
quelles démonstrations sensibles sont bien plus à propos
[ce semble] pour nous introduire la connaissance de
quelque chose que beaucoup d'argumentations frivoles,
vaines et fant&stiques à guise de chimères, qui ne nous
apprennent non pl us que ce que 1 'on vou droit escrire en
l'air avec le doigt [ ..
.
] car tout cela ne marque rien en
notre apprébe 'lsion, qui y puisse demeurer imprimé »
(Traité des C{:mètes).
Il se réclame des Arabes et des
« philosophes :::himiques »,qui ne croient, contrairement
aux aristotéliciens et aux « ratiocinateurs »,que ce qu'ils
ont expérimenté.
La traduction d'Onosandros lui fournit
l'occasion d'insérer des pages de géométrie élémentaire,
et le Traité de:; chiffres, si spéculatif, insiste sur l'intérêt
pratique de pcsséder un code de communication secret.
Dans ce même livre, il conteste la validité des expérien
ces de Heinrich Cornelius Agrippa et de Jean Trithème
sur la transmission de pensée.
Cependant cohabitent dans
ces différents ouvrages à la fois les récits de manipula
tions réelles et leur évidente utilisation à des fins idéalis
tes ou symboliques : on y trouve des techniques de com
bustion des métaux en même temps qu'un cumul
exhaustif des venus idéales du feu.
La traducti•)n commentée des Images de Philostrate
ne constitue pas véritablement un ouvrage de critique
artistique.
Dans ses annotations, Vigenère ne donne pas
une philosophte de l'art, mais plutôt une description des
tableaux, laissant une large place à la technique.
L'in
fluence de cette œuvre sera sensible encore dans la pre
mière moitié cu xvu• siècle.
La compétence de Vigenère
fait de lui un bon vulgarisateur des différents styles et
des recherche�.
archéologiques du temps.
Ces préoccupations pratiques n'enlèvent pas pour
autant à Vigenère sa place dans le courant encyclopédi
que, pythagoricien et spiritualiste de la Renaissance.
Dans la lignée de Pic de La Mirandole et de Georgius
Venetus (François Zorzi), il se laisse emporter dans un
syncrétisme ;�Jliant des aperçus scientifiques, des
connaissances cabalistiques (Zohar) et un mysticisme
dont témoignent la traduction des Psaumes et le Traité de
la pé nit en ce (1 587).
Son rationalisme justifie des visions
plus hautes et plus occultes du monde et de la science.
Le Traité des chiffres est certainement l'ouvrage le plus
remarquable de Vigenère : bien que touffu et peu métho
dique, il contient des tables des différents alphabets et
rend évidente la primauté de l'écriture, fidèle image de
la raison humaine et divine.
En ce sens, il suit la tradition
cabaliste.
vis-à-vis de laquelle il émet cependant certai
nes réserves : l'hébreu ne doit pas être considéré comme
un �oyen de connaissance directe de la nature.
Vigenère
expnme son admiration sans faire des chiffres ou
« secrètes manières d'écrire» une façon privilégiée d'at
teindre Dieu.
Cette distinction entre l'explication maté
rielle des phénomènes et la prudence à garder dans leur
interprétation est encore plus claire dans le Traité des
comètes : Vigenère avoue que les astres sont >,dans Bibliothèque d'hu
manisme et renaissance.
Case.
2, 1983, p.
235-268.
M.-L.
LAU NA Y.
»
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