VAN LERBERGHE (Charles)
Publié le 20/05/2019
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«
VAN
LERBERGHE Charles (1861-1907).
Né à Gand,
orphelin de bonne heure et recueilli par l'oncle de Mae
terlinck, il fut le condisciple de ce dernier avant d'entre
prendre des études littéraires à l'université de Bruxelles.
Outre beaucoup de vers brûlés, sa production de jeunesse
comporte les Flaireurs, «petit drame pour fantoches»
publié en 1889 et créé à Paris en 1892.
La critique a cru
à un plagiat d•: /'lnft·u.se de Maeterlinck.
Pour avoir été
créée un an plus tôt, la pièce de ce dernier date cependant
de 1890: même si l'hypothèse d'une inspiration com
mune ne doit pas être exclue, c'est, historiquement, Van
Lerberghe qui a inauguré le théâtre symboliste et qui a
engagé son compatriote dans cette voie.
Le sujet est simple, la donnée intemporelle : les émis
saires de la mort frappent à la porte d'une moribonde
veillée par sa fille; celle-ci tente vainement de leur
défendre l'accès cependant que la vieille, hagarde,
délire.
L'approche angoissante des trois « flaireurs » est
soulignée par des effets macabres d'un goût assez puéril,
qui finissent par prendre le pas sur le texte.
La pièce n'en
fut pas moins jouée dans plusieurs pays à cause de son
allure de manifeste.
Très « maeterlinckienne >>, elle
rompt délibérément avec les canons naturalistes pour
atteindre « l'idée à travers le réel >> : le drame, essentiel
lement statique, se joue surtout dans l'esprit des person
nages; la psychologie reste élémentaire.
Au cours de longs pèlerinages artistique en Angle
terre, en Allemagne, en Italie surtout, Yan Lerberghe
apprend à aimer les primitifs italiens; leur œuvre lui paraît
incarner une idée en même temps qu'elle exprime
le mystère.
Dès lors se prépare le recueil d' Entrevisions
(1898); le titre néologique évoque déjà un univers éva
nescent, hanté par des apparitions vaporeuses, suggéré
par des images embuées et des descriptions en demi
teintes.
La poésie de Van Lerberghe voile tout autant
qu'elle révèle; sans pouvoir la saisir, on y soupçonne une
présence.
Tout est attente d'un sens lui-même suspendu.
Annoncée par le fragment Solyane, aux accents par
fois mallarméens, l'œuvre maîtresse sera elle aussi
« autant peinte que chantée ».
Parue en 1904, aprè� avoir
été réécrite en partie en vers libres, la Chanson d'Eve est
un long poème, ou plutôt une série de poèmes, sur un
seul sujet -tentative rare dans les lettres symbolistes.
L'ensemble est conçu comme un drame wagnérien, avec
des proportions architecturales et des leitmotive.
L'idéal féminin de Van Lerberghe s'incarne cette fois
dans une seule figure, où se rejoignent la femme-enfant,
la fille-fleur et la fée; douée d'une âme très pure et très
rêveuse, Ève aura la sensualité séraphigue et la grâce un
peu languide des figures de Botticelli.
A travers elle, une
nature elle aussi idéalisée se découvre, restituée à a
pureté initiale.
La version authentique imaginée par Van
Lerberghe ressemble au jardin édénique des peintres
admirés; annonce ou écho de l'Après-midi d'un faune et
de la Jeune Parque tout ensemble, c'est la nature que
devait apercevoir en ouvrant les yeux la créature encore
virginale, « au premier matin du monde ».
Conformé
ment à la nouvelle poétique, cette médiatisation s'opère
par une identification du sujet et de l'objet.
qui fait cor
respondre les choses à des états d'âme.
L'univers ne peut être situé que dans un «brouillard
lumineux », parce que non perçu encore par l'homme et
formé par son verbe.,C'est alors que, chargée de donner
un nom aux choses, Eve compose avec les mots qu'elle
vient d'inventer le premier chant de l'humani.té (en un
langage lui aussi rendu à sa plénitude, « sans une image,
sans une ne ur >> ).
Seui 1 de la création et orée de la poésie,
cette parole crée effectivement le monde innomé, cepen
dant qu'en celle qui la prononce vient se mirer Je vérita
ble auteur de la>.
Le récit de la Genèse ne sert que de prétexte à cette
œuvre devenue hymne païel).
animée d'un panthéisme
diffus :.
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