Un roman doit-il chercher à faire oublier au lecteur que ses personnages sont fictifs ?
Publié le 07/09/2018
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De façon similaire à ce qu’il se passe sur une scène de théâtre, le roman déploie les mirages d’une intrigue et anime des personnages de fiction. Les procédés qui donnent l’illusion du réel se multiplient à tel point que l’on pourrait croire qu’ils sont inhérents au genre lui-même, voire qu’ils en constituent la finalité du roman. Or le roman par définition est mensonge et se devrait donc de nous faire oublier que ses personnages sont fictifs. En effet, le lecteur n’est pas dupe et sait bien que les personnages de romans ne sont pas réels : alors comment comprendre ce recours quasi constant au réel dans la fiction ? Les procédés qui créent l’illusion du réel ou ceux qui les dénoncent (comme texte de Kundera) sont avant tout les ressort de notre plaisir et si le romancier mêlent réalité et fiction c’est avant tout pour nous séduire et nous amener à poser sur le réel qui nous entoure un regard sensible et interrogateur.
D’ailleurs n’y aurait-il pas un danger à nous faire oublier que les personnages sont fictifs ? si le naturalisme ne survit pas à Zola, peut-être est-ce par dégoût face à un monde trop déprimant et trop réaliste qui empêche tout divertissement ou toute évasion pour le lecteur. De même le nouveau roman qui récuse la notion de personnage ne risque-t-elle pas de nous ennuyer par cette uniformité de la vie banale comme le montre les gestes mécaniques du personnage des Gommes de Robbe-Grillet ?
La question du réalisme du personnage romanesque est, pour beaucoup d'écrivains, une question dépassée, démodée. L'enjeu est moins de faire croire à la réalité d'un protagoniste que de faire accepter qu'il soit porteur d'une vérité malgré son caractère et son statut fictionnels. Les romanciers modernes l'ont bien compris : malgré leur volonté revendiquée de tuer l'illusion réaliste, ils n'ont pas tué le roman, ni ses personnages.
«
tous les procédés pour y arriver : cadre spatio -temporel réaliste ou caution apportée par une époque historique
réelle ; analyse des sentiments qui montrent la complexité des personnages imaginaires et nous émeuvent,
transformant les personnages de papiers en être de chair et de sang.
Ces multiples procédés permettent soit de
nous identifier à eux soit de les rendre réels.
Cependant les lecteurs savent bien que les personnages de romans
sont fictifs et certains romanciers prennent le parti d’en jouer.
II – Le lecteur sait bien pourtant que les personnages de roman sont fictifs
a) Le roman est par définition mensonge
Part de faux dans le roman est plus ou moins grande, mais elle est bien présente dès sa définition // définition.
Elle peut être très large comme dans le Seigneur des Anneaux de Tolkien ou les romans de
science-fiction.
Ou elle peut être réduite dans A la recherche du temps perdu où Proust donne son prénom au
narrateur (Marcel) et s’inspire de sa propre vie ou comme nous l’avons vu dans les romans historiques qui
prennent des libéralités par rapport à l’Histoire.
Pacte passé à travers le roman entre l’auteur et le lecteur : ce dernier sait que les personnages sont fictifs.
b) Les personnages fictifs sont bien différents des personnages réels
Par conséquent certains personnages apparaissent bien différents des êtres de chair.
En effet, pour le moment,
nous avons surtout évoqué les romans qui cherchaient à représenter le réel mais certains romanciers pour
répondre à l’attente des lecteurs, font au contraire de leur roman des échappatoires.
Dans ce cas-là, la lecture
permet au lecteur de s’évader, d’oublier un réel ennuyeux ou douloureux.
Le lecteur va vivre par procuration dans
un monde imaginaire séduisant et palpitant dans lequel il pourra rencontrer des personnages invraisemblables
comme les Lilliputiens que rencontre Gulliver (Les Voyages de Gulliver, 1726 de Swift) ou Harry Potter.
Le lecteur se trouve ainsi arraché à son quotidien.
Mais même les personnages de fiction qui ressemblerait à des êtres réels ne sont que des mirages.
// Mme Bovary
(Emma Rouault) ou Jeanne dans Une Vie de Maupassant peuvent-elle entrer dans le monde des hommes ? Non,
car l’imitation au réel n’est que trompe-l’œil à l’image des
peintres baroques qui déforment les proportions lorsqu’ils peignent leur fresque sur les courbes d’une voûte afin de
donner à un spectateur placé en bas l’illusion du vrai ; les personnages de roman ne ressemblent pas aux êtres
que nous côtoyons réellement.
Leurs passions sont plus grandes, leurs pensées plus explicites, leurs destins plus
marqués c'est-à-dire que toutes les Emma Rouault de notre société ne se suicident pas toutes à l’arsenic !
Mauriac dans Le Romancier et ses personnages : « On ne pense pas assez que le roman qui serre la réalité du
plus près possible est déjà tout de même menteur par cela seulement que les héros s’expliquent et se racontent »,
alors que dans la réalité « le drame d’un être vivant se poursuit presque toujours et se dénoue dans le silence ».
c) Certains romanciers montrent les coulisses du roman en cassant l’illusion du réel
Ex : Milan Kundera dans l’Immortalité.
Les nouveaux romanciers, dont Alain Robbe -Grillet qui remettent en cause la notion de personnage = personnage
de Robbe -Grillet : pas de nom, vie mécanique, uniformité de la vie banale.
Transition : Dès sa définition le roman est mensonge et par conséquent le lecteur sait bien que les personnages de
romans sont des personnages fictifs.
D’ailleurs, certains lecteurs recherchent à travers le roman le divertissement.
Pour cela le romancier optent soit pour des êtres imaginaires soit cassent l’illusion du réel en en jouant
comme le texte B et C.
De surcroît, même les personnages qui semblent réels ne le sont pas car leurs passions,
leurs destins restent au service de l’histoire c'est-à-dire de la fiction et ne sont pas similaires à la réalité.
Aussi il
serait intéressant de se demander si au-delà de l’élément de réalité ou le choix de la fiction pure, le roman n’aurait
pas le devoir d’amener le lecteur à s’interroger sur le réel.
III – Le roman à pour devoir d’amener le lecteur à s’interroger sur le réel.
a) Difficulté de démêler fiction et réalité dans le roman
Le romancier utilise la réalité pour élaborer sa fiction (cadre spatio -temporel précis et réaliste ; référence à l’histoire
ou aux faits divers ex : Le rouge et le Noir, sous titre Chronique de 1830.
Donc la fiction tend bien à imiter le réel, avec des personnages qui ne sont ni tout à fait réel, ni tout à fait
imaginaires mais vraisemblables.
Ou illusion parfois les personnages de roman sont plus vrais que la réalité
(Balzac = type)
De plus faire oublier la fiction est impossible :
Fiction visible = susciter le plaisir du lecteur
Fiction atténuée = crédibilité et identification.
Ex : auteurs qui l’acceptent et en jouent : Kundera et Gide.
Mais justement l’intérêt du roman ne réside-t -il pas dans cet entremêlement de la fiction et de la réalité ?.
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