Un critique contemporain écrit des Confessions qu'elles sont « infiniment variées, brillantes comme un recueil de poèmes mais offrant des maximes aux moralistes, en tous les cas uniques par leur accent, et par la mélodie inimitable du style ». Vous commenterez ce jugement sur le style de l'oeuvre de Rousseau.
Publié le 26/07/2013
Extrait du document
Introduction
I. Le choix de la variété
— Le mélange des tons : « tantôt grave tantôt gai «
— Le mélange des genres
II. Une écriture proche de la musique
— Une sensibilité musicale
— La musique du texte
Conclusion
Introduction
La lecture et la musique sont les deux passions que décrivent les
quatre premiers livres des Confessions. Ce goût profond ne quittera
jamais Rousseau et il concevra l'écriture comme une composition
musicale. Nombreux sont donc les lecteurs qui, jugeant du style de
l'écrivain, ont mis en avant son caractère musical. Ainsi, un critique
contemporain écrit plus particulièrement au sujet des Confessions qu'elles
sont « infiniment variées, brillantes comme un recueil de poèmes mais
offrant des maximes aux moralistes, en tous les cas uniques par leur
accent, et par la mélodie inimitable du style «. Le critique insiste sur la
variété de l'écriture, et même ses contradictions puisqu'elle allie selon lui
l'analyse morale et le brio poétique. Il met également en lumière ce
qu'elles doivent à la musique : leur « mélodie « et leur « accent «.
«
je entourer d'un balustre d'or cette heureuse place ! Que n'y puis -je
attirer les hommages de toute la terre ! » Ce ton exalté est pourtant
souvent terni par la tentation élégiaque : « J'aimais trop sincèrement, trop
parfa itement, si j'ose dire, pour pouvoir aisément être heureux.
»
Pourtant, le registre lé ger ne manque pas dans les quatre premiers
Livres.
Rousseau puise largement dans l'imaginaire picaresque : le
pe rsonnage de l'orphelin seul sur les routes, sa douloureuse expérience de
l'apprentissage, son initiation forcée à l'indépendance, tout cela donn e au
livre les promesses d'un roman.
L'écrivain s'autorise même des écarts
satiriques.
Les catéchumènes de Turin sont ridiculisés, et quelques
portraits visent à la caricature.
Enfin, il fait preuve d'un humour tendre,
d'une sy m pathie pour son personnage q ue l'ironie ne parvient pas à
entacher.
— Le mélange des genres
Cette variété de tons s'accompagne d'une variété d'intentions.
Le
narrateur se fait ainsi parfois romancier, décrivant des scènes, rapportant
des dialogues, campant un décor.
Mais il peut tout aussi bien prendre ses
distances avec ses fonctions de romancier et se parodier lui -même.
L'ép isode du jeune saule à Bossey est en effet introduit par une invocation
comique à l'adresse du lecteur : « Ô vous, lecteurs curieux de la grande
hi stoire du noye r de la terrasse, écoutez -en l'horrible tragédie, et vous
ab stenez de frémir, si vous pouvez.
» Le rythme de la phrase mime le ton
oratoire, l'influence des lectures du jeune garçon se devine sous la plume
de l'homme adulte.
Rousseau se fait aussi parfois méditatif : quittant le récit, il ouvre
une brèche sur le présent en se laissant aller à l'autoportrait, ou sur
l'un iversel, en se laissant aller à la maxime 1 morale.
L'écrivain retrouve
alors les accents plus rigides de la langue du XVIIe siècle, avec ses
imbrications complexes : chiasmes, effets de symétrie, balancements
rythmiques, etc.
Telle est ainsi la conclusion qu'il tire de sa séparation
avec son père : « J'en ai tiré ce tte grande maxime morale [...] d'éviter les
situations qui mettent nos devoirs en opposition avec nos intérêts, et qui
nous montrent notre bien dans le mal d'autrui.
» Le ton moraliste rappelle
ici La Roch efoucauld.
Le lexique moral ajoute à la rigueur de la syntaxe,
tout comme les pronoms « nous » à valeur générale ou le présent
gnomique 2 à portée universelle.
I. Une écriture proche de l a musique
— Une sensibilité musicale
Plusieurs notations, au cours des quatre premiers Livres, révèlent
une sensibilité musicale.
Au Livre IV, le héros se fait même professeur de
musique.
Il s'engoue successivement de deux musiciens, M.
Le Maître et
1 Une maxime est une formule courte énonçant une règle de conduite, de morale. 2 Gnomique : du grec gnômikos, sentencieux, caractérise ce qui se présente sous forme de
sentence, de maxime, de précepte..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Diderot reprochait aux moralistes du XVIIe siècle d'être tous «pénétrés du plus profond mépris pour l'espèce humaine». Un critique contemporain précise et nuance cette accusation : «Dans cette peinture de l'homme, peut-être nos écrivains (classiques) ne manifestent-ils pas le même équilibre qu'ailleurs. Entre l'optimisme et le pessimisme, ils penchent fortement du second côté. L'augusti-nisme qui imprègne la culture du temps les a fortement marqués. La dénonciation de l'amour-propre, p
- Un critique contemporain écrit : « Les Confessions n'ont pas seulement pour fonction d'être une justification et un témoignage : pour un Rousseau meurtri, elles sont ... une consolation, une chanson qui berce la misère humaine. » Vous direz dans quelle mesure cette phrase peut servir de définition aux quatre premiers livres des Confessions.
- Un critique contemporain définit ainsi la poésie d'Apollinaire : « [La poésie d'Apollinaire] opère un agencement sur le langage plutôt que sur les thèmes ; d'où une victoire sur la contingence et un espoir de faire du poème, plutôt qu'un reflet de l'âme, une sorte de mouvement perpétuel, source d'une énergie nouvelle, tremplin de sauts dans l'inconnu et d'un accroissement des pouvoirs de l'esprit. » Vous commenterez et discuterez ce jugement en l'appliquant au recueil Alcools
- Un critique écrit : « Le réalisme grossier des Fleurs du mal souleva dès la publication de l'ouvrage les tempêtes de la critique et l'accueil favorable des Parnassiens reposait sur un malentendu. Nul ne semblait se rendre compte pleinement qu'il y avait dans ce recueil toutes les promesses d'un art nouveau. » Vous commenterez ce jugement.
- Un critique contemporain écrit : « Les Confessions n'ont pas seu-lement pour fonction d'être une justification et un témoignage : pour un Rousseau meurtri, elles sont [...] une consolation, une chanson qui berce la misère humaine». Vous direz dans quelle mesure cette phrase peut servir de définition aux quatre premiers livres des Confessions.