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Un ami conseille à Malherbe de ne point répondre à la Satire de Régnier.

Publié le 09/02/2012

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malherbe

Monsieur et cher Ami,

J'ai ouï dire que, contrairement à votre habitude, vous vous proposiez de répondre à une violente satire qui vous attaque sans vous nommer. Ce n'est point sans de solides raisons, j'en suis convaincu; néanmoins, permettez-moi de vous soumettre quelques observations, capables, je pense, de vous en détourner. Pardonnez à mon audace; pas plus que vous je ne conçois l'amitié sans la franchise. Or, j'estime qu'en la circonstance une réponse, si sensée, si éloquente qu'elle soit, ne saurait porter les fruits que vous en attendez... Qu'en espérez-vous donc ? Votre justification ? L'approbation du public ? La  conversion de vos ennemis? La confusion de l'auteur? ... Voici là-dessus mon sentiment.

malherbe

« besoin pour goûter ces vers, de remonter au déluge, ou tout au moins aux fables compliquées de l'antiquité : cela est près de nous, est écrit pour nous.

» Aucun ne veut reconnaître votre style dans la caricature qu'on en a maligne­ ment tracée.

Ne courez donc pas après les suffrages du public; ils viennent à vous, laissez-les venir.

En soumettant votre cause à des gens acquis par avance, vous pourriez la compromettre.

« D'où lui vient, pourt·aient-ils opi­ ner, une telle émotion? Se sentirait-il troublé?» Un silence dédaigneux, soyez-en convaincu, trouvera plus d'approbateurs que la plus victorieuse des réponses.

Vos contempteurs sont-ils donc si considérables ou si dangereux qu'il faille absolument leur riposter? En partant contre eux en camp,agne, ou vous leur conférerez une importance qui passe leur mérite, ou vous aurez l'air de vous aller battre, comme feu le chevalier de la Triste Figure, contre des moulins à vent.

Demeurez plutôt en votre tour d'ivoire, où: leurs traits empoi­ sonnés ne sauraient vous atteindre.

Quant à vos vers, frappés.

dans l'airain, ils bravent la critique impuissante et la morsure des sièeles.

~ Ce que Malherbe écrit dure éternellement~ Que si vous avez rêvé de convertir vos détracteurs, quittez· cette chimère : ils ont passé l'âge des conversions littéraires.

Desportes ne· fait qu'entrer dans la soixantaine, mais la bonne chère n'assure point les Io·ngues vieiiiesses; sa santé, paraît-il, est fort ébranlée, et avec elle, son crédit~.

qui tombera tout à fait le jour où il ne pourra plus héberger princièrement ses admirateurs.

Vauquelin de la Fresnaye serait, m'a-t-on affirmé, ame portes· du tombeau.

M11" de Gournay pourrait bien, en vérité, nous enterrer- tous tdeux, mais ses goûts surannés placent cette laide personne parmi les très vieilles gens.

Laissez mourir ceux-là dans leurs illusions.

Les autres, v:alent-ils seulement.

la peine d'être nommés? Il en va tout autrement de l'auteur de la satire; ce. »

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