Tout ce qui est dans la nature est dans l'art dit Victor Hugo dans la préface de Cromwell, et plus loin: Le domaine de l'art et celui de la nature sont parfaitement distincts. Comment concilier ces deux affirmations qui semblent contradictoires ?
Publié le 15/05/2012
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L'artiste doit-il se contenter d'imiter la nature, ou doit-il faire plus beau, plus noble, plus grand, ou plus gai, plus amusant, plus étrange? C'est l'éternelle question. Victor Hugo veut que l'art soit une imitation, une peinture, une résurrection intégrale. Tout ce qui est dans la nature est dans l'art. Puis il semble se ·reprendre : Le domaine de l'art et celui de la nature sont parfaitement distincts. Il n'y a aucune contradiction entre ces deux affirmations...
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154 SUJETS GÉNÉRAUX ET PENSÉES
Le domaine de l'art comprend non seulement ce qui est beau, noble, gracieux, mais le laid, l'horrible, le bouffon, le difforme.
Exemples: Les mendiants des peintres espagnols ...
, la peinture
des vices et des travers : Tartuffe, Néron, Triboulet.
2.
Là où Victor Hugo innovait, c'e$t quand il voulait que dans
une même œuvre, on mêlât le tragique etle comique, le sublime et le grotesque, sous prétexte qu'ils sont unis dans la nature 1
•
Les classiques professaient la distinction absolue des genres.
Mais de grands poètes étrangers n'avaient pas suivi cette
règle.
(Shakespeare.)
II.
Le domaine de l'art et celui de la nature sont
distincts.
1.
C'est évident.
L'art n'est pas un simple décalque; la pein ture, une photographie.
Chaque art a ses moyens d'expression
(en poésie, les mots, les vers, le rythme et les sons), sa tech nique, ses procédés, ses conventions, ses artifices.
D'un pinceau délicat l'artifice agréable Du plus affreux objet fait un objet aimable.
{Boileau.)
Si le peintre n'ajoutait pas quelque chose à son modèle (au
moins la personnalité de sa vision ou son émotion), ce qui nous répugne dans la réalité produirait en nous la même impres sion, imité par l'art.
2.
De plus, l'artiste fait toujours un choix dans la nature.
Il prend, dit Hugo, non le beau, mais le caractéristique.
Il élimine ce qui lui semble plat, inutile, sans signification ou
sans rapport à son dessein.
Enfin il peut ajouter, combiner,
grandir, embellir, ou au contraire grossir, caricaturer.
(Ex.
:
Corneille, Molière.)
3.
C'est que l'artiste veut produire une certaine impression :
tristesse majestueuse dans la tragédie, gaîté dans la comédie.
Et c'est ce qui explique la distinction des genres.
Le but de Hugo est différent, il veut surtout donner l'impression de la ~ie.
II n'en affirme pas moins que le drame doit être un miroir de concentration.
Il n'a donc pas méconnu les lois éternelles de l'art.
1.
Cf.
Chevaillier et Audiat, Les Te:rltl jranr;ail, x1x• sièele, p.t23l..
»
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