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Sur le commerce: LETTRE X (Lettres philosophiques de Voltaire)

Publié le 22/02/2012

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A Paris, il publie la satire Le Mondain, qui fait scandale. Après s'être exilé en Hollande, il est rappelé à Paris en 1744, protégé par Madame de Pompadour. Il devient historiographe du roi de France et est élu à l'Académie Française en 1746. A Berlin, reçu par Frédéric II, il écrit Micromégas. En 1753 il quitte précipitamment Berlin (il est disgracié et retenu prisonnier). Indésirable en France, il doit chercher un asile. Possédant beaucoup d'argent, Voltaire s'installe à Genève : il écrit le Poème sur le désastre de Lisbonne et Candide en 1759. En 1763, il écrit le Traité sur la tolérance. En 1778, il fait un retour triomphal à Paris où il meurt la même année. En 1792, ses cendres sont transférées au Panthéon.
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« grandeur de l'État » anglais, mais Voltaire cherche à transformer l'événement en véritable exploit. Pour rendre inattendu et d'autant plus extraordinaire le rayonnement anglais à travers le monde, il limiteexagérément l'éclat de sa source et l'Angleterre devient sous sa plume « une petite île » aux très maigres richessesnaturelles : « un peu de plomb, de l'étain, de la terre à foulon, et de la laine grossière ».

Voltaire, propagandiste,n'hésite pas à trahir la réalité (l'Angleterre est exportatrice de textile et de minerais) pour obtenir un maximumd'effet : ce serait un point minuscule du globe, privé de tout et misérable en soi, qui serait devenu le maître dumonde et ce, grâce à son seul commerce. La phrase, anormalement longue chez un Voltaire qui préfère le propos bref et acéré, est animée par un vastemouvement d'amplification : « une petite île [...] assez puissante pour envoyer, en 1723, trois flottes à la fois entrois extrémités du monde, l'une [...], l'autre [...], et la troisième [...] » ; ce mouvement mime l'expansion de lapuissance commerciale et militaire de l'Angleterre à travers le monde. On remarquera au passage que Voltaire prend grand soin de spécifier à chaque fois la mission de ces trois flottesanglaises : il ne s'agit jamais de conquérir des pays ni d'asservir Clés peuples, mais de garantir des intérêts légitimes(contrôler Gibraltar, c'est se préserver un accès commercial à la Méditerranée, et « ôter au roi d'Espagne lajouissance des trésors des Indes », c'est affaiblir un vieil et redoutable ennemi) et de maintenir la paix du monde («empêcher les Puissances du Nord de se battre »). La puissance militaire n'est pas une fin en soi ; c'est un moyen qui, au service d'une nation non belliqueuse, permetd'exercer une action pour ainsi dire civilisatrice : assurer le libre-échange, équilibrer les puissances, préserver la.paix. « Quand Louis XIV [...] satisfaction.

» Pour illustrer une fois encore l'importance durôle du commerce et des marchands, Voltairerappelle un événement historique et militaire :la victoire du prince Eugène sur les troupes deLouis XIV. Une fois de plus, Voltaire arrange les faits pourmieux servir sa thèse.

D'abord les marchandsanglais ne furent pas les bailleurs de fonds duprince, ils ne servirent dans cette affaire qued'intermédiaires Mais l'éloge des marchandsexigeait que ce fût leur argent qui permît lavictoire du prince.

Ensuite la somme prêtée nefut pas de cinquante millions mais de sixseulement, il fallut plus de six jours pleins pourla réunir et non pas une petite « demi-heure detemps » comme Voltaire le prétend.

La trahisonde la vérité historique contribue ici à donnerune image flatteuse des marchands anglais :des hommes énergiques et puissants, deshommes de décision disposant de moyensconsidérables. L'anecdote, sous la plume de Voltaire, finit parressembler à une fable : elle raconte la victoireinattendue du faible sur le fort grâce àl'intervention décisive d'un tiers — lesmarchands anglais — qui vient bouleverserl'ordre pour ainsi dire naturel des choses.

Tel le lion des fables, en effet, le roi Louis XIV, figure même en France de la toute-puissance, faisait «trembler » son voisin, et sa victoire semblait assurée sur plus faible que lui.

Mais argent fait plus que force ni querage : avec la somme extraordinaire qu'on lui prêta, le prince Eugène « délivra Turin, battit les Français, et écrivit »à ses bienfaiteurs anglais ; juxtaposition d'indépendantes très courtes, cascade de verbes exprimant des actions denature différente, accélération du rythme de la phrase, tout cela donne une impression de quasi-simultanéité entrele prêt d'argent et la victoire du prince, victoire qui, grâce à l'intervention des marchands, ne semble plus qu'uneformalité. À travers cette anecdote, ce n'est pas le commerce en lui-même que Voltaire célèbre mais l'argent, la puissanceéconomique qu'il génère.

L'efficacité militaire, comme dans l'illustration précédente, est subordonnée au pouvoiréconomique.

Grâce à leurs ressources financières, les marchands de Voltaire interviennent donc sur le cours del'Histoire ; c'était là un privilège réservé aux monarques et aux généraux.

Les nouveaux et vrais acteurs de l'Histoire,ce sont eux ; Voltaire entend dans cette lettre mettre en lumière le rôle décisif joué par ces acteurs de l'ombre —. »

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