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Publié le 11/09/2014
Extrait du document
«
XXe SIÈCLE : LE ROMAN 233
I.
LE PERSONNAGE PRINCIPAL
D'emblée nous faisons connaissance avec le personnage prin
cipal qui nous communique ses impressions à l'occasion d'un événement particulièrement tragique de son existence : la mort de sa mère.
C'est à travers ces impressions que nous nous faisons
une idée de l'homme.
A vrai dire, le premier trait qui frappe chez
lui c'est son insensibilité.
La triste nouvelle qui vient de lui
parvenir sous la forme sèche, impersonnelle et laconique d'un télégramme ne provoque en lui autant dire aucune émotion.
II semble enregistrer avec une morne passivité et une étrange
indifférence le malheur qui le frappe.
On s'attendrait au moins à un choc de douloureuse stupéfaction.
Or il n'en est rien.
Et l'on ne peut même pas imaginer, à sa décharge, un mouvement
de pudeur instinctive qui 1 'amènerait à nous taire certains de ses
sentiments : la douce familiarité
d'un souvenir d'enfance par exemple qui pourrait prendre une valeur poignante dans la
mesure où s'y trouverait associée la disparue.
Car dans la transcription fidèle qu'il nous fait de ses impres
sions, il ne cherche pas à nous dissimuler quoi que ce soit de ce
qu'il éprouve.
La meilleure preuve sans doute nous en est donnée par un détail inattendu.
Ce qui le préoccupe en somme, ce n'est pas l'événement pénible annoncé mais un élément tout à fait
extérieur et accessoire : la date exacte du décès de sa mère sur
laquelle
le télégramme ne lui apporte aucune précision.
Il y revient à deux reprises : avant de donner le contenu du message qu'il a reçu et après l'avoir communiqué.
Cela constitue chez
lui un peu comme une hantise, et l'ignorance où il est tenu de ce détail sans importance visiblement le préoccupe et l'agace.
Son insensibilité s'accompagne donc de futilité.
Et cette futilité est elle-même révélatrice de son manque de
bon sens.
Il ne voit pas l'importance des choses à leur véritable
niveau.
Il n'a pas une vision dominée des faits.
Sans doute tout cela ne 1 'empêche pas de prendre sur-le-champ les dispositions
qui s'imposent.
Il a tôt fait d'envisager et de décider l'heure de
son départ, le mode de transport qu'il empruntera et l'heure
aussi de son retour, après la cérémonie.
Mais cet homme à vrai
dire ne semble pas s'apprêter à rendre à sa mère un dernier et
pieux devoir.
Il s'acquitte simplement avec correction d'un rite
que les conventions sociales lui imposent et c'est pour la même
raison qu'il emprunte à un ami la cravate noire et le brassard dont il a besoin pour le jour de l'enterrement.
La tenue de deuil
- même réduite à sa plus simple expression -fait partie, pour.
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