Devoir de Philosophie

Soif de liberté: Dans quelle mesure la force d'une argumentation se nourrit-elle de l'expérience vécue ?

Publié le 12/09/2018

Extrait du document

ULTIMA VERBA 1

 

[ ... ]

 

Mes nobles compagnons, je garde votre culte ;

 

Bannis2, la République est là qui nous unit.

 

J’attacherai la gloire à tout ce qu’on insulte ;

 

Je jetterai l’opprobre3 à tout ce qu’on bénit !

 

 Je serai, sous le sac de cendre qui me couvre4,

 

La voix qui dit : malheur ! la bouche qui dit : non !

 

Tandis que tes valets te montreront ton Louvre,

 

Moi, je te montrerai, César5, ton cabanon6.

 

Devant les trahisons et les têtes courbées, Je croiserai les bras, indigné, mais serein Sombre fidélité pour les choses tombées,

 

Sois ma force et ma joie et mon pilier d’airain !

 

Oui, tant qu’il sera là, qu’on cède ou qu’on persiste,

 

Ô France ! France aimée et qu’on pleure toujours,

 

 Je ne reverrai pas ta terre douce et triste,

 

Tombeau de mes aïeux et nid de mes amours !

 

Je ne reverrai pas ta rive qui nous tente,

 

France ! hors le devoir, hélas ! j’oublierai tout.

 

Parmi les éprouvés je planterai ma tente :

 

 Je resterai proscrit2, voulant rester debout.

 

J’accepte l’âpre exil, n’eût-il ni fin ni terme ;

 

Sans chercher à savoir et sans considérer Si quelqu’un a plié qu’on aurait cru plus ferme,

 

Et si plusieurs s’en vont qui devraient demeurer.

 

Si 1’ on n’est plus que mille, eh bien, j’en suis ! Si même Ils ne sont plus que cent, je brave encor Sylla7 ;

 

S’il en demeure dix, je serai le dixième ;

 

Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là !

 

Jersey, 2 décembre 1852

1. Mes derniers mots.

2. Exilés, chassés, même sens pour proscrits, désigne les Républicains refusant le Coup d'État de Louis Napoléon.

3. J'attacherai le déshonneur à.

4. Le sac et la cendre sont dans la Bible les marques de la fonction prophétique et les symboles du deuil.

5. Désigne l'empereur Napoléon III.

6. Cellule où l'on enferme les fous dangereux.

7. Dictateur romain qui élimina ses opposants par les massacres et l'exil ; désigne ici Napoléon III.

1. J. de LA FONTAINE, Fables, « Le Loup et le Chien », 1668.

 

2. J. J. ROUSSEAU, Emile ou De réduction, livre IV, 1762.

 

3. V. HUGO, Les Châtiments, « Ultima verba », vers 37 à 64, 1853.

 

4. É. ZOLA, Germinal, troisième partie, chapitre III, 1885.

 

• Question

Qu'est-ce qui, selon les quatre textes du corpus, permet à l'homme d'être libre ?

Vous traiterez ensuite, au choix, l'un des sujets suivants

• Commentaire

Vous commenterez le texte de Hugo (texte 3).

• Dissertation

Dans quelle mesure la force d'une argumentation se nourrit-elle de l'expérience vécue ? Vous développerez votre propos en vous appuyant sur les textes du corpus, sur les œuvres que vous avez étudiées en classe et sur celles que vous avez lues.

• Écrit d'invention

Un descendant des Maheu, devenu médecin, a été sollicité par un journaliste dans le cadre d'une enquête sur les évolutions de la société. Dans la lettre qu'il lui adresse en réponse, il explique comment, en quelques générations, sa famille s'est libérée de la mine grâce à l'instruction.

► Exploiter les documents du corpus

 

• Texte 1 : La Fontaine a fréquenté la Cour de Louis XIV, il y a vu les courtisans et juge une liberté misérable préférable à des richesses asser-vissantes.

 

• Texte 2 : Rousseau expose ce qui fut son mode de vie : il vécut chez des amis fortunés, mais préféra une errance libre et source de réflexion (cf. Les Rêveries du promeneur solitaire).

 

• Texte 3 : Hugo a combattu Napoléon III et choisi de vivre exilé durant vingt ans pour défendre ses idées. Les Châtiments rendent compte de ce combat, mais aussi de sentiments plus personnels, comme la nostalgie de la patrie.

 

• Texte 4 : Zola s'est rendu dans le Nord de la France où I a vécu parmi les mineurs, dans les corons. Il est descendu avec eux dans les mines et a réalisé une véritable enquête pour son roman. Il y a donc de Zola dans le personnage d'Étienne Lantier, même si le héros n'est pas l'auteur.

 

► Mobiliser vos connaissances

 

• Repérez les traces autobiographiques dans une argumentation, mais regardez si ces données appuient la visée de l'auteur et comment.

 

• Réfléchissez à ce qui peut nuire dans ces données personnelles à Fefficacité argumentative : comment passer du cas personnel de l'auteur à une réflexion plus générale susceptible d'intéresser le lecteur ?

 

► Élaborer le plan

 

La problématique étant une alternative interrogative, le plan est critique. Partie I : on essaie d'aller du plus évident : l'utilisation de son vécu par un auteur est source d'efficacité argumentative.

 

Partie II : à ce qui est le moins évident : le vécu personnel de l'auteur peut ne pas toucher le lecteur ou réduire la portée de son argumentation ancrée dans un hic et nunc (ici et maintenant).

« Moyennant quoi votre salaire Sera force reliefs de toutes les façons : Os de pou lets, os de pigeons ; Sans parler de mainte caresse.

» 10 Le loup déjà se forge une félicité Q ui Je fait pleurer de tendresse.

Chemin faisant, il vit Je cou du chien pelé : « Qu'est-ce là? lui dit-il.

-Rien.

-Quoi rien ?- Peu de chose Mais encor ? -Le collie r dont je suis attaché 15 De ce que vous voyez est peut-être la cause.

-Attaché ? dit Je Loup : vous ne courez donc pas Où vous voulez ?-Pas toujours, mais qu'importe ? - n importe si bien que de tous vos repas Je ne veux en aucune sorte, 4fJ Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.

» Ce la dit, maître loup s'enfuit, et court encor.

1.

Le poil l uisant .

2.

Chien puissant.

3.

Hommes misérables et de peu de cons idération .

4.

Nourr irure abondante et fac il e .

S.

Orthographe de l'époq ue, même remarque poor" mendiants"· 6.

Restes.

�axte 2 Jean-Jacques Rousseau.

Émile ou De r édt.r:ation, llvre IV.

1762 Encore un coup, les plais irs exclus ifs sont la mort du plais ir.

Les vrais amusements sont ceux qu'on partage avec Je peuple ; ceux qu'on veut avoir à soi seul, on ne les a plus : si les murs que j'élève autour de mon parc m'en font une triste clôture, je n ai fait à grands frais que m'ôter 5 Je plais ir de la promenade ; me voilà forcé de l'aller chercher au loin.

Le démon de la propriété infecte tout ce qu'il touche.

Un riche veut être partout Je maître et ne se trouve bien qu'où il ne l'est pas; il est forcé de se fuir toujours.

Pour moi, je ferai là-dessus dans ma richesse ce que j'ai fait dans ma pauvreté.

Plus riche maintenant du bien des autres que 10 je ne serai jamais du mien, je m'empare de tout ce qui me convient dans mon voisinage; il n'y a pas de conquérant plus déterminé que moi; j'usurpe' sur les princes mêmes; je m'accommode sans distinction de tous les terrains ouverts qui me plaisent ; je leur donne des noms, je fais de l'un mon parc, de l'autre ma terrasse, et m'en voilà Je maître ; dès. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles