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SEGALEN Victor : analyse et critique de l'oeuvre

Publié le 13/10/2018

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SEGALEN Victor (1878-1919). Denses, abrupts, sans complaisances ni facilités, les écrits de Victor Segalen n’ont trouvé leur audience et leur rang qu’au lent fil des années qui éloignaient à tout jamais l’Occident, conquis par la machine et la matière, de l’Orient spirituel et immémorial de Stèles ou de Peintures. C’est qu’ils transgressaient les frontières admises entre les écoles, les genres et les tons, dans leur nostalgie d’un monde plein où s’accordent la gravité de la parole et l’éminence de l'acte.

De la littérature à la réalité

 

Ces translations se traduisent, par une critique des idéologies et des écoles qui se partagent l’espace culturel dans la première décennie du siècle. Hostile aux platitudes et aux myopies du réalisme, Segalen n’éprouve que mépris pour son temps, où il ne voit ni valeur ni progrès, mais décadence et uniformisation. Le clinquant de l’exotisme — celui de Loti dans Madame Chrysanthème (1887) ou de Mirbeau dans le trouble et décadent Jardin des supplices (1898) lui apparaît dérisoire. «J’habite, écrit-il dans Équipée, une chambre aux porcelaines, un palais dur et brillant où l’imaginaire se plaît». Le symbolisme? Il en rejette la convention, le flou, l’inconsistance, la circularité livresque, les élégances frelatées, et veut une charnelle confrontation avec les choses : ainsi recueille-t-il, sur le terrain, les légendes des Maoris et s’enfonce-t-il au cœur de la Chine, jusqu’au Tibet, en adoptant la vie et les coutumes du pays (au contraire d’un Paul Claudel, sagement cantonné dans ses légations). Cette existence de méditation et de découverte pose la question essentielle du moment où s’épuisent réalisme et symbolisme : « L’imaginaire déchoit-il ou au contraire se renforce quand il se confronte au réel? »

« Claudel répond en chantant l'unité, retrouvée dans la foi, de la nature et de la surnatu re; les surréalistes vou­ dront réconcilier, dans la surréalité, le rêve et la vie.

Segalen choisi t la voie d'un exotisme e ssent iel qui est chemin vers la suprême réalité, et non déploiement de contrefaçons : ascèse du corps e t de l'espri t vers > : ni la description, qui « tue le geste comme un air g lacé tue le souf fle» ; ni la ressemblance, similitude «faite pour les sots»; mais l'allégorie, le sen s baudela i­ rien de l'analogie universelle, qui ouvre « l es Marches d'arrière -monde », les primes hypostases de l'Être.

L'entreprise comman de une rupture des forme s li tté­ raires occide nta les, un éclatement des coup les concep­ tue ls qui les fonden t et les limitent : le sujet et l'objet, la vé r it é et la fiction ...

Commen t défin.ir les Immémoriaux? Le roman du prêtre Térii, dépositaire des anciennes his­ toires, aux prises avec les missionnaires, ces « hommes aux nouveaux parlers», qui l'annexent; l'évocation illus­ trée d'une vie tahitienne dont le bonheur sc ternit au contact de la grisa ille chrétienne; une rhap sodie de myt hes.

tquipée, donnée pour un « voyage au pays du réel», n'est qu'une expédition rêvée; odyssée ima gi­ naire, elle confond et superpose souvenirs et désirs pour mieux atteindre une immatérielle réalité .

René Leys,. »

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