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Scène 2 de l’acte III Les Mouches: Chaque homme doit inventer son chemin. Jean-Paul Sartre

Publié le 19/03/2020

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mouches

« Il y a des hommes qui naissent engagés : ils n’ont pas le choix, on les a jetés sur un chemin, au bout du chemin il y a un acte qui les attend, leur acte; ils vont, et leurs pieds nus pressent fortement la terre et s’écorchent aux cailloux. Ça te paraît vulgaire, à toi, la joie d’aller quelque part?»

(acte I, scène 2)

 « A présent, vous voilà jeune, riche et beau, avisé comme un vieillard, affranchi de toutes les servitudes et de toutes les croyances, sans famille, sans, patrie, sans religion, sans métier, libre pour tous les engagements et sachant qu’il ne faut jamais s’engager, un homme supérieur enfin...»

(acte I, scène 2)

«JUPITER. — Le mal n’est pas si profond: il date d’hier. Reviens parmi nous. Reviens : vois comme tu es seul, ta sœur même t’abandonne. Tu es pâle, et l’angoisse dilate tes yeux. Espères-tu vivre? Te voilà rongé par un mal inhumain, étranger à ma nature, étranger à toi-même. Reviens: je suis l’oubli, je suis le repos. oreste. — Etranger à moi-même, je sais. Hors nature, contre nature, sans excuse, sans autre recours qu’en moi. Mais je ne reviendrai pas sous ta loi: je suis condamné à n’avoir d’autre loi que la mienne. Je ne reviendrai pas à ta nature: mille chemins y sont tracés qui conduisent vers toi, mais je ne peux suivre que mon chemin. Car je suis un homme, Jupiter, et chaque homme doit inventer son chemin. La nature a horreur de l’homme, et toi, toi, souverain des Dieux, toi aussi tu as les hommes en horreur.

Jupiter. — Tu ne mens pas : quand ils te ressemblent, je les hais. » (acte III, scène 2)

 

«Ah, s’il était un acte, vois-tu, un acte qui me donnât droit de cité parmi eux; si je pouvais m’emparer, fût-ce par un crime, de leurs mémoires, de leur terreur et leurs espérances pour combler le vide de mon cœur, dussé-je tuer ma propre mère... »

(acte I, scène 2)

mouches

« 41 • THÉÂTRE À THÈSE (et mythololgie grecque) / 311 toutes les croyances, sans famille, sans.

patrie, sans reli­ gion, sans métier, libre pour tous les engagements et sachant qu'il ne faut jamais s'engager, un homme supé­ rieur enfin ...

» ( acte I, scène 2) Telle est la culture que lui a transmise, dix ans durant, le Pédagogue, et qui correspond, pour nous, à la culture humaniste héritée de la Renaissance.

Mais Oreste souffre d'un défaut d'ancrage dans une patrie, dans un peuple, dans une famille.

Son exil loin d'Argos, sa ville natale, qu'il retrouve maintenant, l'a privé d'un passé qu'il se surprend à imaginer.

Il est devenu un étranger partout car, bien qu'il soit libre d'emprunter en voyageant tous les chemins, il ne va nulle part et ne possède rien en propre.

Il lui faut donc trouver son chemin, s'il veut agir en· homme véritablement libre, alors que, dans l'immédiat, il ne pèse pas plus lourd que les fils des toiles d'araignée ;,, qui flottent à dix pieds du sol».

Homme supérieur, à en croire le Pédagogue, Oreste n'existe qu'en pensée, et en­ vie le commun des hommes pourtant privé de la liberté de choisir son destin : « Il y a des hommes qui naissent engagés: ils n'ont pas le choix, on les a jetés sur un chemin, au bout du chemin il y a un acte qui les attend, leur acte; ils vont, et leurs pieds nus pressent fortement la terre et s'écor­ chent aux cailloux.

Ça te paraît vulgaire, à toi, la joie d'aller quelque part?» ( acte 1, scène 2) Une fois le meurtre d'Egisthe accompli ainsi que la ven­ geance consommée par le matricide (Oreste tue sa mère Clytemnestre), Oreste sait qu'il a inventé son chemin, qui n'est pas celui, tout tracé, que lui assignait Jupiter: «JUPITER.

- Le mal n'est pas si profond: il date d'hier.

Reviens parmi nous.

Reviens: vois comme tu es seul, ta sœur même t'abandonne.

Tu es pâle, et l'an­ goisse dilate tes yeux.

Espères-tu vivre? Te voilà rongé par un mal inhumain, étranger à ma nature, étranger à toi-même.

Reviens: je suis l'oubli, je suis le repos.

ORESTE.

- Etranger à moi-même, je sais.

Hors nature,. »

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