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Sainte-Beuve (vie et oeuvre)

Publié le 13/10/2018

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1840 Sainte-Beuve, objet d’attaques convergentes dans la presse (en particulier de la part d’A. Michiels et de Balzac), y répond avec rudesse, mais garde en portefeuille sa réplique la plus brutale (« Des gladiateurs littéraires »).

 

Août : Sainte-Beuve nommé conservateur à la bibliothèque Mazarine.

1840 Janv. : article sur « M. de La Rochefoucauld », manifeste de scepticisme et de renonciation aux idéologies du progrès.

 

Avr. : Port-Royal, t. I, chez Renduel. Poésies complètes, chez Charpentier.

1844 Mars : élection à l’Académie française.

 

1845 Févr. : réception à l’Académie, par Hugo.

1842 Févr. : Port-Royal, t. II, chez Renduel.

 

1843 Févr. : début d’une collaboration secrète à la Revue

 

suisse', elle durera jusqu’en 1845, et forme une série de piquantes chroniques de la vie parisienne.

 

Mars : Tableau historique et critique de la poésie française et du théâtre français au XVIe siècle, éd. revue et très augmentée, chez Charpentier.

 

Nov. : impression du Livre d’amour (quarante et un poèmes consacrés aux amours avec Adèle), mais pas de publication.

 

1844 Avr. : Portraits de femmes, chez Didier. Portraits litté-

 

raires, t. I et II, chez Didier.

1848 Avr. : après la révolution de Février, des listes publiées

 

de bénéficiaires des fonds secrets distribués par l’ancien gouvernement mentionnent « Sainte-Beuve » (sans autre indication) pour de très faibles sommes. Attaqué dans son honneur, le critique démissionne de son poste de conservateur.

 

Sept. : départ pour Liège, où Sainte-Beuve donne deux cours à l’Université : sur l’histoire de la littérature française jusqu’au xvme siècle; sur Chateaubriand.

 

1849 Août : retour à Paris.

 

1850 17 nov. : mort d’Augustine Sainte-Beuve, mère du criti-

 

que. Sainte-Beuve hérite de sa maison, 11, rue du Mont-Parnasse, qu’il habitera jusqu’à sa mort.

 

1851 Déc. : Sainte-Beuve favorable au régime autoritaire

 

qu’inaugure le coup d’État du 2 Décembre.

Sept. : refus de la chaire d’éloquence française à la faculté des lettres de Paris.

1846 Avr. : Portraits contemporains, t. I et II, chez Garnier.

 

Sept. : Portraits contemporains et divers, t. III, chez Garnier.

 

1848 Sept. : Port-Royal, t. III, chez Hachette.

1849 1er oct. : premier article du lundi au Constitutionnel.

1851

Févr. : Causeries du lundi, t. I, chez Garnier. Quinze tomes se succéderont jusqu’en 1862.

 

Août : « les Regrets », article polémique contre les nostalgiques des régimes politiques anciens.

 

Déc. : Sainte-Beuve publie désormais ses causeries au Moniteur, journal officiel de l’État.

1852

1852

1854

1855

1857

1857

1858

Déc. : choisi par l’assemblée des professeurs du Collège de France pour la chaire de poésie latine, Sainte-Beuve est nommé par décret impérial.

 

Mars : empêché par un chahut monstre de se faire entendre, le professeur abandonne au bout de deux leçons.

 

Oct. : Sainte-Beuve nommé maître de conférences de littérature française à l’École normale.

 

Avr. : début des leçons à l’École normale (elles dureront jusqu’en juil. 1861) sur la littérature française des origines au xvme siècle.

Mars : Étude sur Virgile, suivie d’une Étude sur Quintus de Smyrne, chez Garnier (études issues du projet de cours au Collège de France et publiées en 1855-1856).

Sept. : Sainte-Beuve quitte le Moniteur pour revenir au Constitutionnel.

Avr. : Sainte-Beuve est nommé sénateur.

 

Avr. : scandale du « dîner du Vendredi saint » qui réunissait, chez Sainte-Beuve, le prince Napoléon, Edmond About, Renan, Taine, Flaubert, le docteur Robin.

 

Mai : discours, au Sénat, sur la liberté de la presse.

 

Juin : discours, au Sénat, sur la liberté de l’enseignement.

Déc. : Port-Royal, t. IV et V, chez Hachette.

 

Nov. : Chateaubriand et son groupe littéraire sous VEmpire, chez Garnier (ouvrage fondé sur les leçons professées à Liège en 1848-1849).

 

Sept. : premier des articles qui formeront les Nouveaux Lundis.

 

Mars : Nouveaux Lundis, t. I, chez Michel Lévy (la parution des treize tomes se terminera en 1870).

 

Oct.-déc. : articles sur Proudhon.

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« La prend dans sa chanson, pousse en sifflant un cri, Et lance les graviers de son poumon meurtri.

Sans doute les Consolations (1830), qui épanouissent la confidence, tranche de vie intime, et Pensées d'août (1837), qui cèdent trop souvent au mode narratif, témoi­ gnent, dans l'ensemble, d'une moindre originalité, mais elles continuent d'entraîner le poème dans des contrées où la prose l'encercle et le subvertit; il reste que la thématique de l'humble et de l'intime revendiquée par le « Werther carabin » (selon 1 'expression de Guizot), les efforts vers une poésie sans rhétorique de convention, proche du langage quotidien, ont frappé.

Sainte-Beuve aurait voulu établir un « lakisme français » (il est d'ail­ leurs le grand introducteur en France du poète intimiste William Cowper, et l'un des premiers traducteurs de Wordsworth et de Coleridge) : un lyrisme simple, sin­ cère, réaliste, qui chante la nature et le foyer, les joies et les peines de tous les jours.

Il y est parvenu une petite décennie durant (de 1831 à 1838) : maint poème de Nerval, de Gautier et, surtout, les Feuilles d'automne (1831) de Hugo en témoignent (pour ne pas citer les minores).

Admiré par Verlaine, Sully Prudhomme et Coppée, Sainte-Beuve apparaît aussi comme un des pères du néo-intimisme qui surgit vers 1865.

Mais son «réalisme poétique», où le sens de l'art et de la morale tempère la représentation du réel, aurait sans doute exercé une influence plus considérable s'il ne s'était pas compromis avec une religiosité héritée du romantisme catholique, ou s'il ne débouchait parfois sur les laborieu­ ses bizarreries d'un« style artiste», pesant et rocailleux.

Les recueils poétiques se rangent en une séquence qui converge fatalement avec le discours critico-biogra­ phique; Volupté (1834), roman d'une âme, abonde en essais littéraires ou philosophiques, en dissertations de moraliste et en tournures ou métaphores proprement poé­ tiques; c'est ce qui le rend si déroutant pour le lecteur qui attendait une fiction et trouve un récit où font défaut le sens romanesque et la puissance d'envoûtement, où un narrateur « homodiégétique » sans cesse commente et analyse : on l'entend trop pour le voir et pour croire en 1 ui.

L'activité critique multiplie encore les complexités issues de cette tendance à l'hybridation des genres.

Les premiers articles (de 1824 à 1828) sont des comptes rendus évaluatifs : une introduction, pour rattacher le livre étudié à un courant plus général; un discours des­ criptif et normatif sur les centres d'intérêt notables; une conclusion, qui tranche, en dernier ressort, sur le rang et la valeur de l'ouvrage.

Cette critique d'inspiration staëlienne, où l'historique tend à l'emporter sur le dog­ matique, aboutit au Tahleau historique et critique de la poésie française et du théâtre français au XVIe siècle (1828) : un examen stylistique pointilleux s'y allie à une audacieuse redécouverte de la Pléiade, louée comme réformatrice des formes d'expression, condamnée pour avoir rompu avec les racines gauloises de l'ancienne littérature médiévale; mais surtout un rapport vivant d'analogie avec le présent le plus immédiat, sans cesse suggéré, est utilisé à des fins de polémique ou de propa­ gande romantique : la jeune école, à un moment aussi crucial, saura, elle, réaliser une réforme complète qui prenne en compte la spécificité nationale et l'esprit du temps, au lieu d'importer un modèle.

Cette actualisation du passé par sa mise en métaphore ouvre la voie à l'his­ toire littéraire allusive, pamphlet où les morts sont enrô­ lés et « prophétisent ».

Le «portrait», en 1829, répond d'abord aux besoins de cette critique « avant-courrière » où Sainte-Beuve se fait le héraut et le proclamateur de son ami Hugo : alors que la Pléiade est remémorée, il s'agit, en un mouvement inverse, de « désactualiser » les maîtres du xvu" siècle, Corneille, Racine, Boileau, La Fontaine, en les traitant comme des objets d'histoire, à distance, en une biogra­ phie-nécrologie.

Mais bientôt l'intérêt, voire la passion (momentanée) du peintre pour son modèle, remplace cette hostilité toute circonstancielle.

Le portrait - bio­ graphie entrecoupée d'essais sur les œuvres, le milieu de l'écrivain, la lignée dans laquelle il se situe- devient un genre singulier, à mi-chemin entre l'histoire, la criti­ que et la poésie; il permet au jugement de s'insinuer sous l'éloge et concilie des attitudes idéologiques contradic­ toires : une sympathie romantique envers l'homme irré­ ductible que révèlent l'observation et les témoignages, sceptique sur les pouvoirs de la raison, encline à l'image et au symbole; et une démarche scientifique qui vise à sortir du pur individuel par inductions, déductions et classifications.

Cette critique de compréhension, de com­ munion, intuitive et contemplative, au terme d'une ascèse qui exige une connaissance approfondie de l'homme et de l'époque, anime l'immense entreprise de Port-Royal (1840-1859), commencée sous l'empire d'une tendresse qui tenait lieu de piété, achevée sur une profession de scepticisme absolu : « Jeune, inquiet, amoureux et curieux des fleurs les plus cachées, je vou­ lais surtout, à l'origine, en pénétrant le mystère de ces âmes pieuses, de ces existences intérieures, y recueillir la poésie intime et profonde qui s'en exhalait [ ...

].J'ai eu beau faire, je n'ai été et je ne suis qu'un investigateur, un observateur sincère, attentif et scrupuleux.

Et même, à mesure que j'ai avancé, le charme s'en étant allé, je n'ai plus voulu être autre chose ».

D'une manière encore plus aiguë, dans Chateaubriand et son groupe littéraire sous l'Empire (1860) s'inscrit cette rupture qui se préparait dès les années 1840 : si le patron du romantisme français est encore ménagé dans le corps des chapitres, un réseau de notes vimlentes res­ treint les anciens éblouissements, corrode la louange de convention et, aux yeux du public, prend l'allure d'un véritable reniement des amitiés d'autrefois.

Le retour progressif d'une norme éthico-littéraire, les désillusions de 1848 concourent, en 1849, à l'émergence d'une nou­ velle forme : la « causerie», qui prétend « dire enfin nettement [ ...

] la vérité sur les ouvrages et les auteurs >>, essai où le jugement, parfois sévère, prend décidément le pas sur les caresses de la biographie poétique.

On a retenu les froides réserves envers la poésie de Baude­ laire, le réalisme de Flaubert ou des Goncourt, et la surestimation de maint talent mineur : il faudrait aussi mettre en balance d'admirables pages sur l'Antiquité, le classicisme éternel, sur les salons et les groupes des XVIII 0 et xrxe siècles, sur Maurice et Eugénie de Guérin, et même sur les poètes du second Empire.

Critique mar­ quée, idéologiquement, par des variations et des glisse­ ments : depuis l'espérance d'un classicisme césarien, d'un ordre moral des lettres, jusqu'à la nostalgie des libertés déliées et impertinentes du siècle des Lumières et à l'espérance d'une ère libérale où la science des esprits appuiera le goût des arts et renforcera l'admira­ tion due aux grands modèles helléniques et latins.

Mais la causerie elle-même reste indéfinissable :jaillissement primesautier de traits d'esprit, d'aperçus vifs et sugges­ tifs, de piques ou de saillies, régularisé et dominé par une narration calme, un sourire épars qui reflète le bon­ heur des livres et la sagesse de l'âge, indulgente, gron­ deuse, amère parfois, apaisée et désabusée.

L'unité d'une quête D'aucuns virent dans la succession des attitudes, des convictions, des esthétiques ou des manières, les signes concordants d'une irrémédiable superficialité et d'une inanité fantasque; Barbey d' Aurevilly écrit sans amba­ ges : «Il est le caméléon_ des œuvres qu'il étudie et qu'il scrute, mais c'est tout».

Verdict un peu court pour. »

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