ROMAN BOURGEOIS (Le) d'Antoine Furetière : sa vie et son oeuvre

ROMAN BOURGEOIS (Le)

Antoine Furetière. Roman, 1666.

La dénonciation des conventions du genre romanesque, à laquelle se livre Furetière (1619-1688) dans le récit des amours de la fille d’un procureur de la place Maubert, Javotte, est perceptible dès le titre. Pour les lecteurs du xviie siècle, les mots de «bourgeois» et de «roman» (celui-ci renvoyant à l’univers aristocratique des romans baroques ou même à ceux de Madame de La Fayette) sont antinomiques. La critique de Furetière est d’ailleurs plus radicale que celle des auteurs d’histoires «comiques» du début du siècle. Comme Sorel, dans l'Histoire comique de Francion, il se livre à la satire des milieux bourgeois, mesquins et ridicules. De même que Louis, l’anti-héros du Berger extravagant, Javotte, dans Le Roman bourgeois, brûlant de copier les modes à l’honneur dans les cercles précieux, est corrompue par la lecture de L'Astrée : le Céladon qui la courtise finit par l’enlever (il suffît pour cela d’enjamber le mur d’un potager) du couvent où ses parents l’ont enfermée. Enfin, les quiproquos résultant de l’utilisation (en particulier par Nicodème, le premier prétendant de Javotte) de la rhétorique amoureuse traditionnelle, face à un destinataire incapable de décoder son discours, provoquent des effets comiques déjà magistralement exploités par Sorel ou par Cyrano (dans Le Pédant joué).