Refusant le slogan naturaliste ou réaliste « rien que la vérité, toute la vérité », Maupassant prétendait que les « Réalistes de talent devraient s'appeler plutôt des Illusionnistes ». Comment comprenez-vous cette phrase ?
Publié le 15/03/2015
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L'esquisse, un art de la suggestion
Écrire, c'est enfin mettre en oeuvre les ressources du style, qui suggère comme l'illusionniste fait voir un monde qui n'existe pas. Par l'art de l'esquisse ou de la caricature, Maupassant évoque ainsi un personnage ou une scène comme on dit d'un magicien qu'il évoque les esprits : « une chevelure scientifique « et le médecin charlatan de Mont-Oriol est là, devant nous ; deux rivaux affrontés, « les dents près des dents, [...] l'un maigre et la moustache au vent, l'autre gras et la moustache en croc «, et nous voyons Bel-Ami défier Laroche-Mathieu.
La métaphore ou les métamorphoses de l'imaginaire
Caricaturiste, Zola brosse lui aussi parfois ses personnages d'un trait comme la Levaque dans Germinal, qui s'avachit, « la gorge sur le ventre et le ventre sur les cuisses «, mais c'est surtout par la métaphore qu'il fait naître un monde irréel du monde réel, comme le magicien fait naître une colombe d'un foulard. La métaphore est en effet l'art des métamorphoses : la maison de la Goutte-d'or ouvre des mâchoires d'ogre qui mangeront Gervaise, le Voreux jette son haleine de bête mauvaise tapie au fond d'un trou et la Lison expire comme une femme aimée.
«
DISSERTATIONS LITTÉRAIRES
Il serait en effet totalement impossible de tout montrer.
La vie ne choisit pas,
elle met sur le même plan une multitude d'incidents insignifiants qui encombrent
nos journées.
Or le romancier vise le sens, il lui faut donc, par la composition, gui
der le lecteur, lui permettre de décrypter la vérité enfouie sous les faits.
Les choix du récit
Le romancier de talent est un escamoteur qui, sans recourir aux ficelles
voyantes
du romanesque, organise subtilement l'intrigue pour convaincre.
Chez
Zola comme chez Maupassant, des scènes se répondent en écho ; elles font sens
parce qu'elles font signe.
Les scènes doubles qui jalonnent le récit, par exemple, donnent la mesure
d'une désillusion : Renée, les yeux dessillés, retrouve à la fin de La Curée les
grâces factices du Bois de Boulogne qui l'ont perdue; Gervaise, reléguée dans le
coin des pouilleux,
se revoit, dans L'Assommoir, pleine d'espérance, ambitionnant
un appartement dans la maison ouvrière qui
l'a corrompue; Jeanne, dans Une vie,
retourne dans le petit bois où elle a connu le premier frisson de !'amour pour y
découvrir la trahison de son mari.
Les artifices de la description
De la même manière, décrire, c'est toujours choisir.
Choisir le petit fait vrai
qui fonctionne comme un indice: le bruit de
l'or rythme ainsi la quête de l'arri
viste dans
Bel-Ami, des amours de coccinelles disent au lecteur d' Une vie le piège
de la nature auquel
se laisse prendre Jeanne, emportée dans le grand rut universel,
et
le crachat noir de Bonnemort, leitmotiv obsédant de Germinal, insiste sur la ter
rible condition des damnés de la mine.
Ill -LES JEUX DU STYLE
L'esquisse, un art de la suggestion
Écrire, c'est enfin mettre en œuvre les ressources du style, qui suggère comme
l'illusionniste fait voir un monde qui n'existe pas.
Par l'art de l'esquisse ou de la
caricature, Maupassant évoque ainsi
un personnage ou une scène comme on dit d'un magicien qu'il évoque les esprits : «une chevelure scientifique» et le méde
cin charlatan de Mont-Oriol est là, devant nous ; deux rivaux affrontés, « les dents
près des dents, [ ...
]l'un maigre et la moustache au vent, l'autre gras et la mous
tache en croc», et nous voyons Bel-Ami défier Laroche-Mathieu.
La métaphore ou les métamorphoses de l'imaginaire
Caricaturiste, Zola brosse lui aussi parfois ses personnages d'un trait comme la
Levaque dans
Germinal, qui s'avachit,« la gorge sur le ventre et le ventre sur les
cuisses», mais c'est surtout
par la métaphore qu'il fait naître un monde irréel du
monde réel, comme le magicien fait naître une colombe
d'un foulard.
La méta
phore est en effet l'art des métamorphoses : la maison de la Goutte-d'or ouvre
des mâchoires d'ogre qui mangeront Gervaise, le Voreux jette son haleine de bête
mauvaise tapie au fond
d'un trou et la Lison expire comme une femme aimée.
Conclusion : Le paradoxe de Maupassant n'est donc qu'apparent,
c'est
bien en effet par l'illusion, par les choix narratifs et descriptifs, par les arti
fices
du style que les naturalistes atteignent la vérité..
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