Quels rôles jouent les villageois dans le roman ?

« 162 comme on le verra ensuite-, ceux auxquels ils ont assisté -l'évolution de Langlois -, et ils dialoguent avec Saucisse pour obtenir des explications sur ce qui leur parut incompréhensible et surtout pour porter des jugements sur les relations entre Langlois et eux ou Langlois et les principaux personnages, ou Saucisse et Delphine, après la mort de Langlois.

Ils servent donc à éclairer la compréhension du lecteur, à la manière du chœur antique des tragédies grecques, qui raconte, commente et juge : « A la longue, on prit l'habitude de se dire que, en ce qui concernait Langlois, rien ne signi­ fiait rien.

» (p.

100) Les chasseurs de la battue au loup Dans la seconde partie du roman, lorsque le loup a attaqué le bétail du village, les villageois -qui sont aussi les narrateurs -sont réquisitionnés par Langlois pour participer à la battue : « Nous apprîmes dans la même heure que, sous forme de pres­ tation communale, nous passions avec armes et bagages sous les ordres directs de Langlois pour une battue générale » (pp.

118-119); et ils le font avec fierté et enthou­ siasme, pleins de gratitude pour l'attention que Langlois leur porte et d'admiration pour le sens de l'organisation de leur chef, et pour le cérémonial mis en place:« On le buvait des yeux le Langlois.

Ça, c'était un homme! ».Mais cela ne les empêche pas de percevoir un certain malaise dans cette situation inhabituelle, ce dimanche insolite, et surtout dans la mort du loup, comme attendue par lui.

Ill.

Un cas particulier: Frédéric Il Un homme ordinaire C'est le troisième protagoniste du premier récit et il joue un rôle déterminant dans l'action d'un bout à l'autre, c'est pourquoi il fait l'objet d'une présentation plus complète que les autres villageois : son père ouvre le récit, et il est présenté comme le maillon d'une dynastie, d'où son surnom humoristique, Frédéric II.

Sa scierie se trouve près du hêtre qui abrite les corps des victimes, aussi est-il confronté à deux reprises à l'assassin.

Mais lors de leur première rencontre, il ne fait preuve d'aucune intuition à son égard et il met sur le compte de la bêtise le comportement irrationnel de l'homme qui s'abrite sous un hêtre par temps d'orage:« On voit tout de suite que c'est un homme qui croit à la bêtise des autres.

».

(p.

34) C'est encore un être imbu de ses certitudes.

Sur la voie de l'initiation à la cruauté Lors de sa seconde apparition, il se montre beaucoup plus curieux et il est sur le chemin de l'initiation à la cruauté, puisqu'on le voit d'abord chercher un divertisse­ ment grâce à la réparation d'une horloge, puis s'échapper dans un nouveau monde pendant la traque de l'assassin où il lui semble devenir renard:« Entièrement diffé­ rent du Frédéric II de la dynastie de la scierie; [ ...

]Heureux d'une nouvelle manière extraordinaire! » (p.

70) Sa métamorphose animale se poursuit tout au long du par­ cours pour le rapprocher du prédateur le plus cruel et le plus symbolique du roman, à la fin: « [ ...

]car c'est ici qu'il a fallu se dépouiller d'une peau de renard qui était presque une peau de loup.» (p.

73) Il n'aurait pas fallu grand-chose pour que Frédéric II devienne comme M.V., le loup, et Langlois,« un roi sans divertissement».. »