Quels moyens les auteurs ont-ils choisi pour faire percevoir aux lecteurs les sentiments et les pensées qui agitent les personnages principaux ?
Publié le 04/12/2011
Extrait du document
Le roman, genre littéraire vaste et aux contours indéfinis, a su, au fil des époques, convaincre et séduire. Ses caractéristiques sont nombreuses et différentes selon les siècles, mais toute l’histoire du roman sera traversée par une dialectique du réalisme et de l’invraisemblance. Ainsi, le personnage de roman ne peut être confondu avec une personne : le second est fictif alors que la deuxième appartient au monde réel. Pourtant, le personnage doit apparaître comme une personne, la difficulté pour le romancier réside donc dans le fait qu’il doit à la fois donner aux lecteurs une illusion de réalité et donner vie à ses personnages. Les caractéristiques du personnages et les détails réalistes tels que un patronyme, un statut social, un âge, ou encore le point de vue du narrateur sont des éléments qui nous en apprennent plus sur le personnage et qui l’inscrivent dans le réel. La psychologie du personnage romanesque possède une grande place dans ce soucis du réel. Ainsi, l’écrivain doit se soucier de nous transmettre les sentiments et les pensées du personnage.
«
Madame de la Fayette, par des procédés divers et recherchés, arrive alors à transmettre
pensées et sentiments du personnage au lecteur.
En 1836 paraît La Confession d’un enfant du siècle , d’Alfred de Musset.
Ce roman quasi
autobiographique, dépeint la liaison tumultueuse de l’écrivain avec George Sand.
L’auteur se
met en scène et tente d’analyser le « mal du siècle ».
Dans ce passage, qui est un extrait du début du roman, Octave, le héros, raconte ici l’épisode
d’un souper, au cours duquel il apprit que sa maîtresse le trompait.
Ici, le narrateur est interne, comme le soul igne la présence du pronom personnel « je » à
travers le récit et les pronoms possessifs « mes amis » l.2, « ma tête » l.5, « ma maîtresse » l.6,
« mes veines » lignes 10 et 11.
Ce choix de narration nous permet d’assister directement aux
sentiments et pen sées du personnage.
Les lignes 11 à 15 sont très révélatrices des sentiments
et des sensations que ressent le personnage en présence de sa maîtresse : « […] c’était un de
ces moments d’ivresse où tout ce qu’on voit, tout ce qu’on entend vous parle de la bi en-
aimée » ; « On embrasserait volontiers tous ceux qu’on voit sourire, et on se sent le frère de
tout ce qui existe ».
Octave communique presque littéralement avec le lecteur, comme le
souligne les pronoms « vous » et « on ».
Pour lui, c’est une sensation que tout le monde peut
ressentir du moment qu’on est amoureux.
La comparaison entre la nature, c'est-à -dire tout
l’environnement extérieur du personnage et la pierre précieuse est aussi un procédé par lequel
le romancier communique au lecteur les sentimen ts d’Octave.
La description et les adjectifs
mélioratifs présents au début du texte sont autant d’éléments qui appuient sur ce que ressent
Octave pendant ce souper : « mes amis richement costumés » lignes 2 et 3, « […] des jeunes
gens et des femmes, tous étincelants de beauté » lignes 3 et 4, « à droite et à gauche des mets
exquis » l.4, et enfin, pour parler de sa maîtresse, « créature superbe que j’idolâtrais » l.6.
Le
texte prend une toute autre tournure une fois que le personnage remarque le rapprocheme nt
intime mais caché de sa maîtresse et d u jeune homme.
Les troisième et quatrième paragraphes
sont détaillés en gestes et en actions (« je me relevai parfaitement calme, demandai une autre
fourchette et continuai à souper » l.22, « Le jeune homme avait le s coudes sur la table » l.24,
« Ma maîtresse était immobile » l.26) mais totalement dépourvus de sentiments,
contrairement au début du texte, ce qui renforce la prise de conscience par le lecteur que le
personnage est atteint par ce qu’il vient de voir et que l’euphorie qu’il ressentait quelques
instants plus tôt c’est évaporée.
À la fin du texte, le lecteur comprend à quel point Octave se
sent trahi et blessé par ce qu’il vient de se passer grâce à l’adjectif « détruit » et à l’adverbe
« gravement » ligne s 36 et 37.
Proust, au début du XX è siècle, publie un nouveau livre de son œuvre « À la Recherche du
Temps Perdu » , intitulé Un Amour de Swann.
Dans cet extrait, Swann vient un soir devant
chez Odette, après qu’ils aient passé du temps ensemble et qu’elle lui ai demandé de partir
plus tôt afin qu’elle puisse se reposer.
Swann, d’un tempérament jaloux, ne peut résister à
l’espionner.
Dans ce passage, le narrateur est omniscient, ce qui est pour le lecteur une occasion idéale de
saisir le moindre sentiment du personnage.
C’est comme si, pendant tout le texte, le lecteur
était dans la tête du personnage de Swann et qu’il s’enrichissait de cette façon pour pouvoir
compatir avec lui.
Chaque phrase est riche en détails et en sentiments.
Le lecteur a même
accès aux images que se fait Swann : « […] comme sous la couverture enluminée d’or d’un de
ces manuscrits précieux à la richesse artistique elle- même desquels le savant qui les consulte
ne peut rester indifférent.
» lignes 10 à 13.
De plus, le champ lexical est très riche : « honte »
l.1, « détester » l.5, « l’aimait- elle » l.6, « bonheurs » l.7, « désir » l.8, « passionnait » l.13.
Les sentiments et pe nsées de Swann sont donc clairement expos és au lecteur..
»
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