► Quelle image de la Cour présente La Bruyère à travers cette imitation du récit de voyage ?
Publié le 09/09/2018
Extrait du document
Texte étudié :
74 (I)
L'on parle d'une région où les vieillards sont galants, polis et civils ; les jeunes gens au contraire, durs, féroces, sans moeurs ni politesse : ils se trouvent affranchis de la passion des femmes dans un âge où l'on commence ailleurs à la sentir ; ils leur préfèrent des repas, des viandes, et des amours ridicules. Celui-là chez eux est sobre et modéré, qui ne s'enivre que de vin : l'usage trop fréquent qu'ils en ont fait le leur a rendu insipide ; ils cherchent à réveiller leur goût déjà éteint par des eaux-de-vie, et par toutes les liqueurs les plus violentes ; il ne manque à leur débauche que de boire de l'eau-forte. Les femmes du pays précipitent le déclin de leur beauté par des artifices qu'elles croient servir à les rendre belles : leur coutume est de peindre leurs lèvres, leurs joues, leurs sourcils et leurs épaules, qu'elles étalent avec leur gorge, leurs bras et leurs oreilles, comme si elles craignaient de cacher l'endroit par où elles pourraient plaire, ou de ne pas se montrer assez. Ceux qui habitent cette contrée ont une physionomie qui n'est pas nette, mais confuse, embarrassée dans une épaisseur de cheveux étrangers, qu'ils préfèrent aux naturels et dont ils font un long tissu pour couvrir leur tête : il descend à la moitié du corps, change les traits, et empêche qu'on ne connaisse les hommes à leur visage. Ces peuples d'ailleurs ont leur Dieu et leur roi : les grands de la nation s'assemblent tous les jours, à une certaine heure, dans un temple qu'ils nomment église ; il y a au fond de ce temple un autel consacré à leur Dieu, où un prêtre célèbre des mystères qu'ils appellent saints, sacrés et redoutables ; les grands forment un vaste cercle au pied de cet autel, et paraissent debout, le dos tourné directement au prêtre et aux saints mystères, et les faces élevées vers leur roi, que l'on voit à genoux sur une tribune, et à qui ils semblent avoir tout l'esprit et tout le coeur appliqués. On ne laisse pas de voir dans cet usage une espèce de subordination ; car ce peuple paraît adorer le prince, et le prince adorer Dieu. Les gens du pays le nomment; il est à quelque quarante-huit degrés d'élévation du pôle, et à plus d'onze cents lieues de mer des Iroquois et des Hurons.
La Bruyère, Caractères, De la cour
Tenir compte de la question
• La question vous invite à chercher ce qui fait ressembler ce texte à un « récit de voyage », mais aussi à interpréter cette description comme celle non pas d’un pays mais de la « Cour », donc à décrypter ce qu’il y a derrière cette description : l’image est-elle positive ? négative ?
• Vos titres d’axes doivent comporter des mots de la question.
Pour bien réussir l’oral : voir guide méthodologique.
Convaincre, persuader : l’essai : voir lexique des notions.
Trouver les axes
Utilisez les pistes que vous ouvre la question, mais composez aussi la « définition » du texte (voir guide méthodologique).
Récit de voyage (genre), sorte de fable (genre approché) qui décrit (type de texte) apparemment « un pays lointain », en fait la Cour (thèmes), satirique (registre), naïf, critique, en fait violent (adjectifs) pour critiquer les courtisans et la société française (buts).
• Le texte se situe dans une lignée littéraire de la satire des courtisans : Du Bellay, Les Regrets (« Seigneur, je ne saurais regarder d’un bon œil 1 Ces vieux singes de cour..., sonnet CL) ; La Fontaine, « Les obsèques de la Lionne » (« Peuple caméléon, peuple singe du maître »).
• Le texte annonce l’esprit des Lumières par le procédé de l’œil naïf qui aura un grand succès au XVIIIe siècle (Les Lettres persanes de Montesquieu et L’Ingénu de Voltaire) et le mythe du bon sauvage.
«
� Premier axe : une imitation de récit de voyage
• Analysez les procédés d'écriture qui font resse mbler ce texte à un récit de
voyage (vocabulaire, désignation des personnages ...
).
• Analysez la personnalité de celui qui décrit, son regard sur ce pays.
� Deuxième axe : une satire féroce de la Cour de Louis XIV
• Quelles sont en fait les " cibles , de La Bruyère ?
• Quels griefs leur adresse-t -il ?
PRÉ SENT ATION
Introduction Le thème de la satire des courtisans n'est pas nouveau au XVIIe siècle quand
La Bruyère écrit le chapitre des Caractères consacré à la Cour.
La Bruyère
fait ici une sorte de portrait collectif des courtisans, dans le ton de ses
caractères individuels, mais il adopte une forme originale : celle du récit de
voyage fait par un étranger ...
Rappel de la question + annonce des axes.
1.
Une imitation de récit de voyage :
le regard étr anger et la devine tte
1.
Une énigme : cherchez " le pays "···
• Décalage entre le sujet annoncé (cf.
date et titre : " De la Cour , de Louis
XIV) et la description d'un pays (ce n'est pas ce qu'a ttend le lecteur ) �des
cription géographique et ethnologique :
- les mots géographiques en font un pays lointain, avec frontières :
" région "• " contrée , ;
- " peuples '' : éloignement historique, linguistique, ethnique ;
- le regard du prétendu ethnographe :.
»
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