Quelle est l’importance du personnage d’Athéna dans les chants V à XIII de L’Odyssée ?
Publié le 07/10/2018
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loin le premier des hommes/ en conseil et discours, moi fameuse entre tous les dieux/ pour ma finesse et mon astuce » Elle sourit même au mensonge que lui fait Ulysse et s’amuse de son inventivité, reconnaissant la supériorité de son protégé dans ce domaine : « Il serait fourbe et
astucieux, celui qui te vaincrait/ en quelque ruse que ce soit, fût-il un dieu !/ O malin, ô subtil, ô jamais rassasié de ruses,/ ne vas-tu pas, même dans ton pays, abandonner/ cette passion pour le mensonge et les fourbes discours ? », XIII, 291-295 Même force de persuasion également par le discours : Athéna face aux Olympiens/Ulysse face aux Phéaciens. 2) Athéna comme incarnation de la « métis » d’Ulysse -interrogation sur les « absences », la « discrétion » d’Athéna Bien que « omniprésente » aux côtés d’Ulysse, Athéna n’intervient pas du tout dans les chants VIII à XII, à partir du moment où Ulysse se trouve dans le palais d’Alcinoos. Absence particulièrement remarquable dans le récit qu’Ulysse fait lui-même de ses propres aventures à la cour du roi Alcinoos, du chant IX au chant XII. En particulier dans l’épisode chez Circé, où c’est Hermès, (qui a certes un certain nombre de points communs avec Athéna) qui lui vient en aide face aux sortilèges de la déesse, alors qu’on « attendait » plutôt Athéna. Athéna donne elle-même une raison à cette longue absence au chant XIII, face à Ulysse qui le lui fait remarquer (« je ne te revis plus, fille de Zeus, ni ne sentis/ ta présence à mon bord pour me défendre du malheur ») : « Pour moi, je n’ai jamais perdu confiance et je savais/ qu’ayant vu périr tous
tes gens tu rentrerais ;/ mais je ne voulais pas combattre Poséidon,/ le frère de mon père, qui, l’âme pleine de rancune,/ t’en voulait d’avoir aveuglé l’un de ses fils ». (XIII, 339-343). Est-ce Ulysse qui, n’étant pas omniscient comme l’aède, n’a pas su reconnaître la déesse, puisque lui-même affirme : « Déesse il n’est pas aisé de te deviner au passage,/même à l’homme éprouvé : tu prends tant de formes diverses ! » (XIII, 312-313) ? Cela semble peu probable puisque lui-même déclare ne pas avoir « senti » sa présence. Est-ce Athéna qui ne s’est pas du tout manifestée depuis le départ de Troie jusqu’aux sept années passées chez Calypso, encore froissée de l’impiété manifestée par les Grecs après leur triomphe sur les Troyens (ils n’ont pas fait les sacrifices requis) ? -Même en l’absence explicite de sa protectrice, l’esprit d’Ulysse fourmille d’idées et d’astuces, qui lui donneront à plusieurs reprises sa survie, avec le Cyclope surtout où sa « métis » se manifeste à plusieurs reprises (dans le nom qu’il se donne, dans le fait de ne pas tuer Polyphème, dans le subterfuge leur permettant de sortir sains et saufs de la grotte) mais aussi chez les Lestrygons et avec Charybde. Tout comme Poséidon ou Zeus peuvent incarner par leur colère le déchaînement des éléments naturels, contre lesquels les
hommes ne peuvent rien, Athéna peut incarner le génie humain (l’« étincelle » d’intelligence), les ressources de l’esprit humain, qui permettent aux uns et aux autres de se distinguer et révélateur de leur valeur (courage de Nausicaa, esprit avisé d’Ulysse) mais aussi le hasard des rencontres heureuses (la fillette de Phéacie, le jeune pâtre d’Ithaque). En cela, Athéna participe à la fonction étiologique (= étude des causes, de la raison d’être des choses du monde) du mythe. Aussi le retour d’Athéna auprès d’Ulysse peut-il se lire symboliquement comme l’achèvement de la quête initiatique d’Ulysse que les épreuves ont rendu plein de « sagesse et de raison », de son accomplissement.
«
aux côtés d’Ulysse au moment de la guerre de Troie.
-C’est un personnage -clé du merveilleux, du surnaturel divin,
dont l’action est toute « magique », conforme aux pouvoirs que l’on attribue aux dieux : apparition en rêve,
métamorphoses multiples, « magie » *elle se métamorphose à 2 reprises aux yeux d’Ulysse en prenant forme
humaine : en petite fille en Phéacie, puis en jeune pâtre à Ithaque *elle répand de la brume ou du brouillard autour
d’Ulysse afin de le rendre invisible à 2 reprises en Phéacie et à Ithaque et peut aussi faire souffler un vent
favorable et « barrer la route à tous les autres » (chant V, 383) *elle métamorphose Ulysse : le fait resplendir de
beauté et de force face à Nausicaa ou le transforme en vieux mendiant à Ithaque *Elle agit sur le « mental » : elle
inspire un rêve à Nausicaa, puis du courage face à Ulysse qui se présente à elle nu et
sale ; elle suggère à Ulysse de s’accrocher à un rocher et de se sauver en nageant le long de la côte de Phéacie
(chant V) puis elle l’endort.
Surtout, c’est elle qui convainc les Olympiens, en premier lieu son père Zeus, qu’il est
désormais temps de laisser Ulysse rentrer chez lui.
C’est sans doute son action la moins spectaculaire mais la plus
emblématique de ce qu’est Athéna : déesse de la « métis »
2) Un personnage « fondateur » de l’Odyssée -Elle occupe une place-clé dans l’Odyssée : elle apparaît au début
du chant V comme à la fin du chant XIII, en protectrice complice d’Ulysse oeuvrant à son retour, tout comme on la
trouve à l’ouverture de l’Odyssée, au début du chant I tout comme dans les trois derniers chants de l’Odyssée, en
particulier dans le dernier où l’Odyssée se termine sur l’image d’Athéna ramenant la paix à Ithaque.
« Artisan » du
retour d’Ulysse, elle sera aussi celui de sa vengeance et de son rétablissement comme roi d’une Ithaque pacifiée.
-
Elle est à l’origine de la décision du départ d’Ulysse de l’île d’Ogygie, et donc en quelque sorte à l’« initiative » du
récit lui -même qui débute par cet « acte fondateur » : fille du Porte-Egide, son action est décisive auprès des
autres dieux de l’Olympe, Zeus en premier lieu, en l’absence de Poséidon : elle tient face à eux un
discours plein de persuasion, en montrant la menace qui pèse sur les sociétés face à tant d’ingratitude vis à vis
d’Ulysse.
C’est elle qui, en fait, décide et agit, mais elle a besoin de l’aval de Zeus.
Cet aspect apparaît encore
mieux au tout début de l’Odyssée, au chant I, où l’on trouve une première évocation de l’assemblée des dieux
présente également au chant V : au chant I le discours persuasif d’Athéna est plus développé et surtout c’est elle
qui prend l’initiative d’envoyer Hermès chez Circé et décide d’elle -même d ‘aller à Ithaque guider et conseiller
Télémaque.
C’est donc à l’initiative d’Athéna que se fait le retour d’Ulysse, c’est-à-dire d’une certaine manière le
récit de l’Odyssée, qui raconte ce retour.
Mais ce n’est pas par la magie qu’Athéna est ici au centre de l’épopée
mais par une qualité qu’elle partage avec Ulysse : la « métis ».
III.
Aspect symbolique : double d’Ulysse et
incarnation, personnification de la « métis » d’Ulysse 1) Une complicité extrême avec Ulysse : Athéna comme
double divin d’Ulysse mortel -Un lien particulier et très privilégié, unit Athéna et Ulysse *contrairement à Achille qui
est fils d’une déesse (Thétis), Ulysse n’est pas le fils d’un dieu ou d’une déesse.
Il a peut -être une lointaine
ascendance divine (plusieurs hypothèses existent sur la généalogie
d’Ulysse) mais l’aide inconditionnelle et « gratuite » que lui procure Athéna n’est pas due à une proximité «
généalogique ».
*ce qui est assez remarquable, c’est qu’Ulysse n’a pas besoin de l’implorer ou de lui faire de
sacrifice pour obtenir son aide : l’action d’Athéna est totalement spontanée, la seule exception étant à la fin du
chant du VI où Ulysse l’implore dans le bois qui lui est consacré, non loin du palais d’Alcinoos.
*cet aspect apparaît
également dans le fait qu’elle se montre sous sa véritable apparence à Ulysse, privilège rare pour un mortel : «
Athéna […] reprit les traits d’une femme/ belle, grande et savante en splendides ouvrages » *l’aide fournie par
Athéna est avant-tout une aide fournie à un Achéen : en effet à l’origine de cette aide on trouve la querelle qui
opposa les trois déesses, Aphrodite, Héra et Athéna, qui revendiquaient chacune pour elle la pomme d’or du jardin
des Hespérides, qui devait être accordée à la plus belle.
Pâris -Alexandre, le fils du roi de Troie Priam, choisi pour
être l’arbitre lors de cette querelle, la donna à Aphrodite, qui lui avait promis en échange de lui offrir la plus belle
femme du monde, qui n’était autre qu’Hélène, l’épouse de Ménélas, roi de Sparte et frère d’Agamemnon.
Par dépit
Héra et Athéna décidèrent de soutenir les ennemis de
Pâris le Troyen.
Mais Pourquoi Ulysse en particulier parmi les Achéens ? Si elle apporte son aide à Ulysse en
particulier, c’est qu’elle a reconnu en lui un semblable.
-Athéna est née de l’union de Zeus avec Métis ; comme il
avait avalé Métis, Athéna est sortie toute armée du crâne de Zeus.
Athéna est la déesse dont « l’oeil étincelle » ou
« aux yeux brillants », signe de son intelligence, de son acuité intellectuelle.
Elle est la déesse de la « métis ».
La
qualité principale d’Ulysse est la « métis », l’intelligence rusée, la prudence.
Ulysse est même qualifié de «
polumétis », « ingénieux » chez Jaccottet.
Lors de l’épisode avec le cyclope Polyphème, Ulysse se nomme « outis
» dont la variante syntaxique est « métis » en grec : il est donc la ruse incarnée.
Sa prudence avisée est à de
nombreuses reprises montrée tout au long des chants V à XIII.
Athéna déclare ainsi à Ulysse qui vient d’arriver à
Ithaque et lui fait un « beau mensonge », au chant XIII, 296 -299 : « nous sommes toi et moi/ des astucieux : toi de.
»
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