Quel est le sens du titre Les Caractères ? (La Bruyère)
Publié le 09/08/2014
Extrait du document
«
Il.
Du caractère au portrait
Quand on a bien compris Je sens généralisant du terme caractère, on comprend aussi Je contre-sens que l'on ferait à prendre les portraits pour ceux de simples individus.
La Bruyère,
qu'il écrive des réflexions générales
ou qu'il brosse des portraits, se livre toujours à la même
activité.
Un parti pris d'extériorité
Alors que La Rochefoucauld, par exemple, insiste sur des sentiments intérieurs et cachés
qu'il dévoile, comme
l'amour-propre, La Bruyère, dans ses Caractères, prend Je parti de ne
montrer les hommes que par !'extérieur.
Dans DC, 31, par exemple : «je vois un homme
[ ...
]mais
il est en place.
J'en vois un autre[ ...
] mais il est en faveur[ ...
] je veux un homme
[ ...
]»:les« je vois», qui pourraient passer pour des observations d'individus, aboutissent
en fait
à un «je veux» qui révèle que l'observation est ici purement morale.
Quand il
intitule son ouvrage Les Caractères ou les mœurs de ce siècle, La Bruyère fait de caractères
et de mœurs des synonymes.
Le caractère des hommes (au sens actuel) est modifié par les
circonstances et par le milieu.
Ce ne sont donc pas des caractères seulement au sens
psychologique
mais toujours aussi au sens sociologique.
La Bruyère décrit plutôt des conduites
que des caractères
au sens moderne du terme.
Un jeu sur le mot
La Bruyère établit en outre une confusion volontaire entre le caractère comme terme psy
chologique
ou sociologique (caractéristiques d'un type de personne) et Je caractère comme
genre littéraire.
Dans Je Discours de réception à /'Académie, il emploie l'expression «faire des
caractères ».
Celle-ci renvoie à l'expression/aire des portraits et à la mode des portraits de
salon, genre oral et mondain derrière lequel se cachent des individus réels.
C'est là que réside
l'ambiguïté:
La Bruyère utilise cette mode pour créer un nouveau genre littéraire: le caractère, qui consiste à extraire du réel des marques, à les isoler et à les organiser pour qu'elles se trans
forment
en signes clairs, comme dans OC, 94, où les traits du «favori qui tombe» sont réper
toriés par
le moraliste.
C'est pourquoi nombre de remarques portent sur le langage, car toute
réflexion sur
ce qu'il observe amène La Bruyère à une réflexion sur l'expression par laquelle
il traduit Je caractère observé.
Ill.
Une observation rationnelle
Le caractère intéressant se situe entre Je particulier et le général, et lon perçoit chez
La Bruyère
le désir de noter des règles, de repérer des lois comme un observateur scien
tifique, ce qui correspond
à une attitude caractéristique de la fin du XVII° siècle et du début
des Lumières.
D'où l'allure sociologique
de certaines remarques, comme lorsque, dans DG,
41, La Bruyère observe la différence de comportement à la guerre entre le simple soldat, qui
n'a aucun intérêt à mourir même si sa vie est rude, et le grand, qui quitte une vie douce mais
espère
la gloire de la mort au combat.
Dans cette société de cour qui se caractérise par I' ap
parence,
le déchiffreur qu'est le moraliste tente d'interpréter des traits pour dresser un tableau
révélant à la
fois une société et la nature humaine..
»
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