PONSON DU TERRAIL Paul Alexis, vicomte : sa vie et son oeuvre
Publié le 27/11/2018
                             
                        
Extrait du document
PONSON DU TERRAIL Paul Alexis, vicomte (1829-1871). Né à Montmaur (Hautes-Alpes), le vicomte Pon-son du Terrail, qui se présentait volontiers comme le descendant du chevalier Bayard, s’imposera sous le second Empire comme le maître incontesté du roman-feuilleton. Primitivement destiné à la marine, puis garde mobile — il réprima les émeutes de juin 1848 —, il se consacre définitivement à la littérature dans la voie tracée par Eugène Sue, Frédéric Soulié et Dumas père. Dès 1853, les Coulisses du monde augurent de la brillante carrière que, grâce à une imagination sans bornes et surtout à une fécondité restée légendaire, l'auteur soutiendra sans faille durant quinze années. Travailleur acharné, il peut écrire simultanément et sans collaborateurs cinq feuilletons que lui ont commandés cinq journaux différents (la Patrie, le Petit Journal, l'Opinion nationale, la Petite Presse, le Moniteur du soir), produisant ainsi une moyenne de dix mille pages par an...
Un héros populaire
Le cycle des aventures de Rocambole, commencé dès 1859 et publié en 1884 sous le titre générique des Dra
mes de Paris, fournit à Ponson tous les avantages d’une matière romanesque étirable et modelable à souhait, adaptable aux exigences du découpage en feuilletons et aux besoins financiers des journaux où il publie. Véritable mine d’or pour les directeurs de ces journaux, qui se livrent, à son sujet, à un énorme battage publicitaire, cette œuvre, dont le genre hésite entre le roman historique à la Dumas et le roman de mœurs, comporte un nombre impressionnant de titres : outre des romans entièrement autonomes, comme la Tour des Gerfauts (1854, 5 vol.), Diane de Lancy (1855, 4 vol.), la Cape et l'Épée (1857, 5 vol.), le Diamant du Commandeur (1860,
«
                                                                                                                            demandes 
de ce public  ou sur  les instances  des directeurs 
de  publication,  ses romans  s'étirent  indéfiniment  de cha
pitre  en chapitre  pour se terminer  le plus  souvent  de 
façon abrupte lorsque  l'intérêt des lecteurs  ou les  recettes 
du  journal  viennent  à s'affaiblir.
                                                            
                                                                                
                                                                     Le découpage  en feuil
letons  se reflète  parfaitement,  à la  fin  des  chapitres,  où 
un  point  fort, lié à une  question,  à une  énigme,  doit 
retenir  l'attention  du lecteur  : «Ce  qui se passa  entre ces 
deux  hommes,  nul ne le sut  jamais,  mais lorsqu'  [il) quitta 
la  rue  Serpente,  un pacte  ténébreux  le liait  à sir 
Williams  ».
                                                            
                                                                                
                                                                    
L'œuvre  offre beaucoup  de points  communs  avec le 
mélodrame,  et le récit  cède  souvent  la place  au dialogue 
ou  à un  monologue  prononcé à haute  voix.
                                                            
                                                                                
                                                                    Les coups  de 
théâtre  se succèdent  de  manière précipitée;  quelquefois 
même,  les morts  redevenus  vivants entrent dans  une 
action  déjà au comble  de la tension  dramatique.
                                                            
                                                                                
                                                                     Avec 
un  ton  semi-héroïque,  semi-larmoyant,  des métaphores 
pseudo-poétiques  et stéréotypées  qui se manifestent  sur
tout  dans  les portraits  (Martha  était « comme  une fleur 
éclose  au tiède  soleil  du Nord  >>; Hermine  était « frêle 
comme  ces  belles fleurs des champs  » ),  des  expressions 
péremptoires  dans leur banalité  redondante  ( «  Cerise 
était  jolie et gaie  comme  le bonheur»),  le style  négligé 
de  Ponson  n'évite ni la lourdeur (« la berline [ ...
                                                            
                                                                                
                                                                     ) apparut 
au  versant  de la côte  du haut  de laquelle  on apercevait  le 
vallon  au fond  duquel  était le  manoir  des Genêts  >>)  ni  le 
ridicule  du lyrisme  dilué dans son emphase.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Conscient  de ses  maladresses,  le narrateur  intervient 
constamment  : au  début  de chaque  chapitre  pour effec
tuer  des rappels  (du type  « faisons  un pas  en arrière  ») 
ou  pour  résumer  une action  inextricable;  en cours  de 
narration,  directement  ou sous  le couvert  d'un person
nage,  pour excuser  le manque  de rigueur  et le  caractère 
invraisemblable  de son  récit  :  «Tout  cela, fait-il  avouer  à 
l'un  de ses  héros,  est plus  terriblement  embrouillé qu'un 
drame  du boulevard  ».
                                                            
                                                                                
                                                                    Mais  le commentateur  nuit au 
narrateur;  loin de racheter  un texte  trop vite écrit,  le 
commentaire,  en brisant  le rythme  endiablé  du récit,  met 
en  relief  l'irréalité  des  situations,  les anachronismes 
(parfois  énormes)  que le lecteur  aurait peut-être  négligés 
lors  d'une  lecture  rapide.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Le  récit  de Ponson  ne manque  pas de dynamisme.
                                                            
                                                                        
                                                                    
Soumis  à la  règle  des «trois  multiplicités  >> comme  la 
tragédie  classique  l'était à celle  des trois  unités,  chacun 
de  ses  romans  réorganise le monde  réel en un  monde 
mythique  et manichéen  dans lequel  temps et espace  se 
trouvent  abolis.
                                                            
                                                                                
                                                                     Du bouge  infâme  à l'hôtel  de luxe,  en 
passant  par la mansarde  proprette de l'ouvrière,  de Paris 
aux  Indes,  ce ne  sont  que substitutions  ou pertes  d'iden
tité,  enlèvements,  séquestrations  de pures  jeunes  filles, 
tentatives  de viol,  internements  abusifs en prison  ou en 
maison  de santé,  captations  d'héritages,  meurtres  horri
bles,  activités  de polices  et de  sociétés  secrètes,  fausses 
lettres,  puissants  narcotiques,  médaillons, taches de nais
sance  et signes  divers de reconnaissance  ...
                                                            
                                                                                
                                                                    Quant  aux 
personnages  (le génie  du  bien et le génie  du mal,  souvent 
frères  ou amant  et maîtresse,  la frêle  aristocrate  et les 
honnêtes  ouvriers, la courtisane  impure et le  vieillard 
lubrique,  les  serviteurs  fidèles  comme des chiens,  sans 
oublier  la faune  insolite  de la pègre),  ils gravitent,  appa
riés  en couples  antithétiques,  privés de psychologie  jus
qu'à  la caricature,  dans une rotation  d'événements  qui 
s'auto-alimente  à l'infini  de sa propre  substance  stylisti
que  et thématique.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Cette  répétition  illimitée des  données  initiales ainsi 
que  la systématisation  des symboles  et des  constantes 
mythiques,  qui  délimitent  un  monde d'entités  livrées à 
l'état  brut, trahissent  avant tout l'absence  d'un langage 
propre,  ce langage  que le roman  populaire  «héroïque», 
pourtant  issu du roman  noir anglais  et du  romantisme 
byronien,  n'a pas  su se forger.
                                                            
                                                                                
                                                                     Mais il semble  bien que  ce 
genre  de problème  n'ait jamais  préoccupé  le père  de 
Rocambole.
                                                            
                                                                                
                                                                     Comme l'a si justement  dit Paul Dalloz dans 
l'éloge  funéraire  qu'il prononça  à la  mort  de Ponson  du 
Terrail  : «Son  principal  but était  d'intéresser,  d'émou
voir,  de captiver  ses lecteurs.
                                                            
                                                                                
                                                                     C'est par le cœur,  par les 
passions  qu'il était sOr de les  tenir».
                                                            
                                                                                
                                                                    
BIBLIOGRAPHIE 
Textes.
                                                            
                                                                                
                                                                     -Nombreuses  rééditions depuis 1970 : la  Baronne 
trépassée  et  le  Chambrion,  Paris, Marabout,  1975; Rocambole, 
Paris,  Garn ie r,  1977,  3 vol.
                                                            
                                                                                
                                                                    , etc.
                                                            
                                                                                
                                                                    
A  consulter.
                                                            
                                                                                
                                                                     -J.
                                                            
                                                                                
                                                                    Dubois  (dir.), Rom cm cie-rs  populaires  du 
XIX"  siècle,  univ.
                                                            
                                                                                
                                                                    de Liège,  1979; Y.
                                                            
                                                                                
                                                                    Oliv ie r- M artin ,  Histoire  du 
roman  populaire  en France,  Paris, Albin  Michel,  1980.
                                                            
                                                                                
                                                                    
C.
                                                            
                                                                                
                                                                    BARBÉ.
                                                                                                                    »
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- SAINT-JOHN PERSE, pseudonyme d'Alexis Saint-Leger Leger, dit aussi Alexis Leger (vie et oeuvre)
 
    
     
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                             
                