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Mythe et ordre

Publié le 18/09/2018

Extrait du document

Lors du dénouement, en effet, le héros contestataire est mis en minorité et réduit au silence. Dans La Machine infernale, Œdipe est confondu. Il laisse le pouvoir à Créon qu'il avait affronté et s'incline devant Tirésias qu'il avait bravé. On le voit quitter la scène de manière pitoyable, guidé par Antigone et par l'ombre de Jocaste.

 

Même déconvenue pour Hector, dans La guerre de Troie n'aura pas lieu. Le conflit s'impose et le héros comprend que ses efforts pour imposer la paix auront été vains. C'est d'ailleurs lui qui annonce, comme pour donner tout son poids à sa défaite : « Elle [la guerre] aura lieu » (GT, Il, 14, p. 163).

 

À la fin des Mouches, Oreste quitte Argos alors même que le trône s'offre à lui. Il refuse de régner et demeurera éternellement «un roi sans terre et sans sujets» (LM, Ill, 6, p. 246). Il s'en va donc, poursuivi par les mouches. Ce retrait du héros témoigne de ce qu'il ne cherche pas à instaurer un ordre. Ayant mené à bien son œuvre de contestation, Oreste abandonne les lieux.

« des lignes géométriques.

On pou rrait dire de lui ce qu'il dit d' Hélène.

Face à l'opinion des autres et à l'équil ibre du monde, Hector est un «bloc de négation » (G T, 1, 9, p.97).

L' Éle ctre de Girau doux se dresse également contre l'ordre établi.

Elle affronte Égisthe qui a assuré la prospé­ rité d'Argos.

L'héroïne est du côté de ce qui «ruine l'É tat, l'i ndividu et les meilleur es famill es» (É , 1.

2, p.

22).

«Un de ces jours », dit le Mendiant, elle va «m ettre la ville sens dessus dessous » (ibid.

, 3, p.

36) .

L'expression fait d'Électre, non la représentante d'un ordre, mais une adepte du désordre et du chaos.

Dans Les Mouches, c'est Oreste qui incarne la contes­ tation, face à Jupi ter.

Celui-ci revendique «l'ordre moral» (LM .

1, 1, p.

11 0) et l'ordre cosmique (LM.

Ill, 2, p.

233).

Il lance à Or este une sorte de menace : «L 'ordre d'une cité et l'or dre des âmes sont instables : si vous y touchez, vous provoquerez une catastr ophe» (LM .

1, 1, p.

119 ).

Te lle est précisément l'ambition d'Oreste : faire écrouler les croyances qu'Égisthe a accumu lées pour se maint enir au pouvoir .

Antigone, enfin, s'attaque au pouvoir de Créon et aux lois de la cité.

Mais sa révolte n'est pas seulement poli­ tique.

Antigone refuse le temps qui passe et les obl iga­ tions de la vie.

«Je suis là pour vous dire non et pour mou­ rir », dit-elle (A.

p.

82).

Elle ne conteste pas seulement les lois, mais toutes les contraintes.

--· LE RETRAIT DES PERSON NAGES À la fin des pièces, ces héros contestataires ne pren­ nent pas le pouvoir dans les cités.

Après avoir détruit ou remis en cause l'ordre qui y régnait, ils n'instaurent pas le leur .

Ils se retirent, à la différence des héros mythiques qui prennent possession d'un lieu pour s'y installer1 .

1.

De nombr eux mythes montrent comment un héros, au prix de mille difficultés, s'empare d'un lieu et fonde une ville.

Ënée s'en­ fuit de Troie en flammes et découv re le site de Rome.

Romulus al laité par une louve fonde la ville de Rome.

Quant à Ulysse, il accomplit un long parcours avant de retrouver sa patrie, Ithaque, où il reconquiert le pouvoir et s'ins talle sur le trône.. »

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