Mouvement n°1 (du vers 1 au vers 4) – Un poème-tableau : l’installation d’un décor idyllique Comment le poète peint-il sous les yeux de son lecteur un décor idéal ?
Publié le 18/06/2024
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Mouvement n°1 (du vers 1 au vers 4) – Un poème-tableau : l’installation d’un décor idyllique
Comment le poète peint-il sous les yeux de son lecteur un décor idéal ?
C’est un trou de verdure où [chante une rivière]
[Accrochant follement] aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de [la montagne fière],
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.
1 – Le poète crée une hypotypose, soit une image vivante et nette dans l’esprit du lecteur.
Le poème
s’ouvre donc sur l’emploi d’un démonstratif (« c’est ») qui invite le lecteur à regarder ce qui se présente à lui,
l’hypotypose étant rendue davantage vivante par l’emploi du présent de l’indicatif dans sa valeur de présent de
narration( lorsqu’on utilise le présent pour raconter une histoire, ou faire une description dans une histoire).
2 – Ce lieu-tableau est décrit comme un lieu idyllique où la tranquillité règne.
Ainsi :
– le champ lexical de la nature
– [les personnifications] qui rendent vivante, festive et lumineuse la nature, comme si elle avait sa
propre volonté.
– l’importance de la couleur verte > « verdure, herbes, val »
– l’adverbe à caractère festif « follement »
– la métaphore « haillons d’argent » pour parler de la rosée → belle et brillante
– l’omniprésence de la lumière : son champ lexical et les enjambements (d’argent // luit)
– les allitérations et les assonances créant des sonorités harmonieuses : [r] ; [an] ; [on]
– La métaphore « qui mousse de rayons », rendant la lumière douce et accueillante
– l’harmonie des éléments : l’eau (la rivière), la terre (la montagne), le feu (le soleil)
3 – Néanmoins, lorsqu’on a lu le poème jusqu’à la fin, on sait que Rimbaud a déjà dissimulé des indices
préparant la mort du soldat.
Ce décor ressemble étrangement à un lieu de dernier repos : la lumière peut faire
penser à la lumière divine donnant accès au paradis ; mais c’est surtout la présentation du lieu comme un
« trou » qui suggère discrètement au lecteur qu’il est face à une tombe.
On relèvera aussi l’opposition entre le
caractère vivant de la nature et le triomphe de la mort qui va surgir par la suite.
=> C’est un décor idéal et serein qui crée une image harmonieuse, un tableau bucolique, de la quiétude.
Mouvement n°2 (du vers 5 au vers 14) – Une révélation progressive : la description du soldat
Comment le poète décrit-il le soldat pour faire comprendre que le dormeur est un cadavre ?
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
1 – Ce second quatrain s’ouvre sur l’irruption inattendue d’un personnage au milieu de ce décor bucolique : « un
soldat ».
Cette irruption crée un premier contraste entre le caractère apparemment idyllique du lieu et ce qui s’y
trouve, ce qui est une façon d’attirer l’attention du lecteur.
2 – Ce soldat a un caractère universel : ce pourrait être n’importe quel soldat, comme le montre l’emploi de
l’article indéfini « un » qui insiste sur l’anonymat de l’individu (c’est une sorte de soldat inconnu).
Rimbaud
n’oublie pas de rappeler que c’est un soldat « jeune », ce qui est peut-être une dénonciation de l’horreur de la
guerre.
3 – La posture du soldat oscille entre le sommeil et la mort.
Il se trouve apparemment dans un état harmonieux,
comme le suggère le rythme ternaire du vers 5, ou le rejet du verbe « dormir » au vers 7.
Sa position pourrait
aussi bien renvoyé à un enfant en train de dormir qu’à un cadavre ; le poète joue ici sur la polysémie des mots
utilisés, comme la bouche ouverte, la nuque qui « baigne » paisiblement, la tête nue… L’euphémisme qui
domine tout le poème commence ainsi – pour atténuer la mort du soldat, le poète l’évoque par le champ lexical
du sommeil (« dort », « lit ») et celui de la baignade (« baignant »).
4 – On remarque que l’évocation du décor idyllique initiée au début du sonnet se poursuit aux vers 7-8 :
- le soldat est «....
»
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