MORT D'UN CHAT de Marcel ARLAND, Lumière du soir.
Publié le 14/07/2012
Extrait du document
Mon ami , mon compagnon de seize années et plus, mon chat Néron est mort. Je le savais proche de sa fin ; et que, le premier, il l'ait pressentie : aucun doute. Venu l'été, quand, le matin, je descendais de ma chambre : << Mais où est Néron ? >> Je l'appelais : plus de Néron . Je sortais, l 'appelant de nouveau . . . Ah ! oui, au bout de la pelouse , dans un léger creux, cette forme d'un gris sombre sous la douceur de la lumière , cette sorte de boule, d'abord immobile, qui remue un peu, s'allonge, dresse une pointe d'oreille, se hausse , s'étire, et voilà deux ou trois pattes, un museau qui se retourne, deux yeux, une langue, presque un chat. << Néron ! >> Mais il me fallait contourner la pelouse, soulever le chat, qui me prenait alors par le cou, et le porter jusqu'à la cuisine, au bol de lait, qu'il lampait à demi avant de retourner au creux de la pelouse. Ainsi chaque jour de l'été. Plus de Néron pour m'éveiller à la porte de ma chambre, plus de promenade à deux, plus de sieste côte à côte , chacun sur sa chaise ; le soir, plus de télévision regardée ensemble, lui sur mes genoux, tourné vers moi , suivant le film dans mes yeux. Et la nuit, s'il se résignait à la passer dans la maison, c'était à sa guise , tantôt sous un guéridon de l'entrée, ou sur un tapis du couloir, plus souvent au second, sur une caisse de livres ou de revues. On me disait parfois : << Un capricieux, votre chat ! >> Que non ! Un être qui sent venir la mort, qui se détache des apparences, des conventions et des jeux, mais pour communier plus intimement avec le monde, avec la tiédeur ou la fraîcheur du ciel , avec l'aube, l'éclat ou le crépuscule - pardessus tout avec la loi des créatures, la terre profonde où va s'effacer un destin. Cependant, de loin en loin, je sentais son regard se lever sur moi, comme s'il eût voulu m'avertir, ou peut-être m'interroger, me demander secours. Que répondre ? << Ami , mon pauvre Néron, oui, c'est toi, c'est nous. >>
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En
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pressentie : aucun doute.
Venu l'été, quand, le matin, je
descendais de ma chambre : > Je
l'a ppelais : plus de Néron .
Je sortais, l'appelant de nouveau ...
Ah ! oui, au bout de la pelouse , dans un léger creux, cette
forme d'un gris sombre sous la douceur de la lumière , cette
sorte de boule, d'abord immobi le, qui remue un peu,
s'allonge, dresse une pointe d'oreille, se hausse , s'étire, et
voilà deux ou trois pattes, un museau qui se retourne, deux
yeux, une langue , presque un chat.
> Mais il me
fallait contourner la pelouse, soulever le chat, qui me prenait
alors par le cou, et le porter jusqu'à la cuisine, au bol de lait,
qu'il lampait à demi avant de retourner au creux de la
pelouse.
Ainsi chaque jour de l'été.
Plus de Néron pour m'éveiller à
la porte de ma chambre , plus de promenade à deux, plus de
sieste côte à côte , chacun sur sa chaise ; le soir, plus de
télévision regardée ensemble, lui sur mes genoux, tourné vers
moi , suivant le film dans mes yeux.
Et la nuit, s'il se résignait
à la passer dans la maison, c'était à sa guise , tantôt sous un
guéridon de l'entrée, ou sur un tapis du couloir, plus souvent
au second, sur une caisse de livres ou de revues.
On me disait parfois : > Que
non ! Un être qui sent venir la mort, qui se détache des
apparenc es, des conventions et des jeux, mais pour commu
nier plus intimement avec le monde, avec la tiédeur ou la
fr aîch eur du ciel , avec l'aube, l'éclat ou le crépusc ule-par
dessus tout avec la loi des créatures, la terre profonde où va
s' effacer un destin.
Cependa nt, de loin en loin, je sentais son regard se lever
sur moi, comme s'il eût voulu m'avertir, ou peut-être
m'int erroger, me demander secours.
Que répondre ?
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Marcel ARLAND, Lumière du soir..
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